Lucas Broto (Directeur sportif du centre de formation Section Paloise) : "L'identité de garçons valeureux fait l'essence de nos équipes de jeunes"

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Lucas Broto (Directeur sportif du centre de formation Section Paloise) : "L'identité de garçons valeureux fait l'essence de nos équipes de jeunes"
Théo Attissogbe, issu du centre de formation.
Théo Attissogbe, issu du centre de formation. Profimedia
Au coup d'envoi ce vendredi soir (19h30) d'Italie-France comptant pour la 1re journée du Tournoi U20 des 6 Nations, 3 joueurs de la Section Paloise (Hugo Parrou, Brent Liufau et Théo Attissogbe) seront titulaires et Axel Desperes sera sur le banc. Avec Hugo Auradou, convoqué mais laissé à la disposition de club pour jouer les doublons en Top 14, Thomas Souverbie et Grégoire Arfeuil qui, sans une blessure, auraient fait partie de l'effectif de Jean-Marc Béderède et sans oublier Emilien Gailleton, appelé par Fabien Galthié, le club béarnais démontre sa réussite au plus haut niveau. Flashscore France a demandé à Lucas Broto, directeur sportif du centre de formation, quelles étaient les raisons de ce succès.

La Section Paloise a 7 joueurs de son effectif qui évoluent dans les différentes Équipes de France à l'occasion du Tournoi (6 en U20, 1 chez les A) : quel est ce secret béarnais sur la formation ?

Je ne suis pas convaincu qu'il existe un secret, mais il y a eu une méthode mise en place sur les 18 derniers mois, portée par le staff et toute la direction sportive. Il fallait non seulement croire en cette méthode, mais aussi la mettre en oeuvre, la rendre opérationnelle chaque jour, et concerner les garçons pour qu'on fasse corps et constituer une équipe tous ensemble. Notre idée est de détecter les joueurs qui pourront évoluer en Top 14 et s'y affirmer demain ou après-demain. 

Est-ce une obligation pour un club comme la Section Paloise de développer une politique de détection et de formation pour espérer lutter face aux grosses écuries du championnat ?

Il y a d'une part le recrutement interne, avec nos équipes cadets (catégorie U16, ndlr) et Crabos (catégorie U18, ndlr) et, d'autre part, le recrutement externe réalisé dans les effectifs d'autres clubs. La valorisation de notre potentiel interne est aussi importante que le recrutement externe. Il faut bien connaître ses joueurs pour espérer se projeter. Bien les connaître, c'est aussi être lucide quant à ceux qui ne passeront pas le cap. A ce moment-là, on se penche sur un recrutement externe qui peut être local, régional ou national. Il s'agit dès lors de cibler des postes et des joueurs qui correspondent à un profil. C'est un pari, un challenge et la manière dont on veut travailler pour être proche des joueurs et leurs familles en leur proposant un projet sincère, honnête, avec toute la liberté de s'exprimer dans toutes les équipes. Le meilleur exemple, c'est Axel Desperes, un jeune issu du club qui n'était pas au centre de formation au 1er juillet 2022, et qui a disputé ses premières minutes en Top 14 contre Toulon. C'est un local, il a participé au Super Sevens, une compétition qui tient à coeur à la Section où on a disputé les 4 finales. Il s'est développé, il a bien progressé, on lui a fait confiance et on l'a intégré au centre en cours de saison. Depuis juin 2022, il a dispute une 1/2 finale du championnat Crabos, il a joué en Espoirs, puis au Super Sevens, puis en Challenge européen, puis en Top 14 et il a été sélectionné en U20 en étant surclassé en 2023. On met en place un environnement, un cocon autour du joueur pour qu'il réussisse, et pour en obtenir sa meilleure version. Notre travail de détection, de recherche et d'analyse nous offre quelques garanties pour augurer que le joueur aura sa place en Top 14. 

C'est important de mettre en place une identité de jeu béarnaise ? 

L'identité de garçons courageux et valeureux fait l'essence de nos équipes de jeunes, et c'est toujours maintenu au fur et à mesure des années. C'est profondément ancré. L'important est d'être transparent, de ne pas mentir aux joueurs et aux familles. Cela réside aussi bien dans le fait de leur dire que nous trouvons parfois peu de projection, comme de les aider car on croit en eux. C'est difficile d'être un jeune joueur de haut niveau, mais si tout le monde travaille bien, on aura la sensation qu'il y arrivera sur du court-moyen terme. 

Existe-t-il une tradition à Pau qui oriente davantage vers la formation d'avants ou d'arrières ?

Non, c'est très équilibré. Ce qui nous intéresse, c'est la colonne vertébrale 2-8-9-10-15. Sur ces dernières années, nous sommes très performants à ce niveau. Nous avons 3 talonneurs, 2 ou 3 numéro 8, 3 ou 4 demi de mélée, 3 ou 4 ouvreurs. L'idée est de toujours fournir des profils à l'équipe première, les meilleurs jeunes sur des profils dont le staff professionnel a besoin. Cela part d'un plan qui va jusqu'en Crabos. 

La saison dernière, la Section Paloise a régulièrement débuté avec une charnière Clovis Le Bail-Antoine Hastoy (parti à La Rochelle l'été dernier), c'est très gratifiant pour le centre de formation ?

Nous avons 35% de notre effectif qui est local, sur un périmètre de 100km à la ronde. On travaille beaucoup avec le Stado Tarbais depuis un an, nous avons des discussions avec les clubs alentours et nous voyons aussi dans les Landes, le Gers et les Hautes-Pyrénées. Il faut avoir l'énergie pour la mettre en place, mais cela nous ouvre de nouvelles portes pour travailler différemment et l'assumer. 

Les échanges avec le staff de l'équipe première et notamment Sébastien Piqueronies sont-ils quotidiens, et centrés sur quels aspects ? 

Le dialogue est permanent. Le projet pour chaque joueur est très ouvert et la progression est vite perçue, par le staff formateur comme par le staff de l'équipe première. Notre proximité fait que le joueur est valorisé par des temps d'entraînement, des entretiens, des prolongations de contrat, une confiance mutuelle. 

La génération en 2e poule du championnat Espoirs est-elle prometteuse ? 

Aujourd'hui, sur les 7 avec les U20, 5 ont déjà joué en pro. On bâtit avec eux. Tout dépend de ce que l'on insinue en disant prometteur. Nous voulons qu'ils s'imposent en Top 14, c'est-à-dire avoir au moins 200 ou 250 matches de championnat, mais aussi d'être capables de viser l'Équipe de France. Antoine Hastoy et Baptiste Pesenti ont été les premiers à avoir été convoqués en étant issus du centre de formation. C'est une ambition, sans manquer d'humilité. Il peut y avoir une génération prometteuse, mais nous travaillons déjà sur la suivante, qui mettra de la concurrence saine et positive. Nous construisons cela en phase avec l'effectif professionnel. Nous avons des ambitions élevées et on s'en donne les moyens. C'est qui fait l'intérêt de notre travail au quotidien. 

La Section Paloise dispose d'un sponsor d'envergure (TotalÉnergies) : cela aide-t-il pour mettre de l'huile dans les rouages, notamment au niveau des infrastructures ? 

C'est un sponsor certes, mais ce n'est pas un mécène. Le club s'appuie sur un réseau de 350 entreprises partenaires. Ce sponsor majeur n'est pas tout seul. La force du club est d'avoir à la fois su trouver un tel partenaire pour nous accompagner, mais aussi de bénéficier d'un tissu local fort financier et humain. Cela participe à être matériellement à l'aise pour travailler, évoluer, grandir. Notre centre d'entraînement a 6 ans, on pousse les murs chaque saison car les besoins sont croissants. L'identité locale ressort aussi par cette proximité. Il faut qu'on reste une petite ville avec toutes les commodités et c'est bien de rester dans cette énergie. Pau est une ville très sportive et très familiale, et c'est ce qui contribue à ses succès. 

On constate souvent que les effectifs de Top 14 recrutent avec plusieurs mois d'avance. La dynamique est la même avec les centres de formation, avec des tentatives de débauchage ?

Cela peut arriver mais il y a plusieurs types de recrutement. Il y a les joueurs qui arrivent lors de leur première années Espoirs, aux alentours de 18 ans. D'autres viennent en milieu de formation vers 20-21 ans, et qui changent parce que dans leur club de départ, une porte est en train de se fermer. 

La place du scouting est de plus en plus importante, mais la question du déracinement reste une inconnue ?

Faire déplacer un joueur de 18 ans de 500 ou 600 km, cela peut fonctionner mais si l'éloignement familial lui pèse et qu'il s'en ressent, personne n'est gagnant. Il faut travailler en amont, lui faire connaître le club, lui transmettre de la confiance, lui montrer qu'il est la bonne personne au bon moment. 

Le travail mental sur les jeunes joueurs représente quelle proportion ? 

La tête guide tout mais c'est difficile de le quantifier. Cela prend la forme d'entretiens formels mais aussi informels, notamment sur du retour de match. On parle de prise de conscience, et c'est la réalité. Le grand constat que l'on fait et que l'on expose aux joueurs, c'est le phénomène du temps. Tout le monde a 24 heures dans sa journée mais la question est de savoir ce qu'on en fait, comment et pourquoi. On a mis en place des créneaux éducatifs participatifs et on espère que bientôt cela sera co-construit par les joueurs voire totalement construit par eux. Si nous avons un chemin commun, il faut travailler ensemble et en connaissance de cause, autrement dit être le plus lucide possible sur ses capacités, et les efforts à fournir pour y arriver. 

Y a-t-il des suivis psychologiques réguliers au sein du club ?

Sur le volet psychologique, il y a 3 pans importants. D'une part, la très grande proximité du staff avec les joueurs, et c'est une partie très affirmée de notre modèle de formation. Ensuite, nous avons des tests psychologiques en début de saison qui sont pris en compte par le staff, notamment quant à l'évolution en cours de saison sur plusieurs sujets, que cela soit au niveau sportif, personnel, scolaire. Enfin, depuis 2 ans, nous avons noué une collaboration avec un partenaire du club, Lumanisy, avec des assistants sociaux d'entreprise qui interviennent chaque semaine de manière individuelle, une clinicienne qui contribue aussi à l'orientation, et une assistante sociale conseille sur des thèmes divers comme la CAF ou les impôts. Grâce à tout ça, on peut détecter des signaux s'il y a des soucis et trouver des solutions. 

Les familles sont-elles en demande par rapport au médical, plus précisément quant aux commotions cérébrales ?

Les coups et les commotions sont des sujets qui ne sont pas évoqués par les familles lors des rendez-vous. En revanche, le staff médical est partie prenante et c'est mis en avant lors de la présentation du projet. Nous parlons davantage de l'accompagnement du joueur que des blessures. Très souvent, les parents arrivent avec beaucoup de fraîcheur et peu de recul sur ce qu'est un centre de formation au sein d'un club, mis à part que c'est une étape pour devenir professionnel. Ils ne savent pas vraiment tout ce qu'il y a derrière, et ce sont nous qui leur apportons ces éléments-là. 

Pour les joueurs qui ne perceront pas en Top 14, y a-t-il un accompagnement voire un engagement moral pour le suivi scolaire et l'orientation dans la vie active ? 

Nous avons 25 joueurs au centre de formation sur un maximum de 30 autorisés. On tend à maintenir cet effectif entre 22 et 25 joueurs pour faire le moins de déçus possibles et pour les amener vers le haut. On accompagne les garçons dans leur suivi, mais aussi dans la sortie de leur parcours de formation de haut niveau, soit en travaillant avec d'autres clubs, soit sur les aspects scolaires et professionnels. De plus, en fonction de l'âge et du poste, rebasculer en Nationale peut être un bon moyen de rebondir, surtout que le niveau se rapproche de plus en plus de la Pro D2 avec des clubs très bien structurés. On peut aussi très bien se réaliser humainement avec un travail la semaine et le rugby en fin de semaine. 

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