À 27 ans, Ingrid Tandrevold arrive à maturité pour s'installer au sommet de la hiérarchie mondiale du biathlon féminin. Après les étapes d'Oestersund et d'Hochfilzen, c'est en tous cas elle qui a pris le meilleur départ. Avec 271 points, la Norvégienne compte 20 points d'avance sur Lou Jeanmonnot et 22 sur Lisa Vittozzi. 

Pour la dernière étape de 2023, à Lenzerheide en Suisse, Tandrevold pourra profiter de l'absence de Jeanmonnot sur le sprint et la poursuite après son contrôle positif à la Covid. L'absence de la native de Pontarlier pourrait même s'étendre jusqu'à dimanche et la première mass-start de la saison. 

Dans les traces d'Eckhoff et Roiseland

Pour l'heure, la championne du monde de Mass Start en 2021 n'a jamais été hors des 7 premières, lors de l'individuel qui a ouvert la saison à Oestersund. Sixième sur le sprint puis 5e de la poursuite auxquelles s'ajoutent une victoire sur le relais et une deuxième place sur le relais mixte, Tandrevold a frisé la perfection à Hochfilzen avec une victoire sur le sprint, une 3e place sur la poursuite et une nouvelle victoire en relais. De quoi prendre un peu d'avance, notamment sur Elvira Oeberg, sa dauphine sur le spint et le relais et qui a remporté la poursuite en Autriche. 

Plus que jamais, la régularité est la clef pour remporter le général, à l'instar de Julia Simon la saison dernière. Avec 5 deuxièmes places en 2022-2023, Tandrevold a terminé 6e, son meilleur classement. A présent, sans Tiril Eckhoff et Marte Olsbu Roiseland qui ont pris leur retraite respectivement en 2022 et 2023, c'est donc à elle ainsi qu'à Karoline Knotten de prendre le flambeau. 

Tandrevold assure aussi le service après-vente de sa vie sur le circuit. Elle édite un vlog régulièrement, avec une bonne dose d'humour. Elle raconte l'éloignement avec ses proches, la difficulté de préparer ses bagages, notamment sur les vêtements "normaux" pour Noël, les trajets en pullman et l'intimité de l'équipe norvégienne où elle est notamment de corvée de vaisselle avec Knotten. 

Par le passé, elle proposait un podcast avec Eckhoff, sa meilleure amie. "C’est absolument fantastique d’avoir sa meilleure amie dans l’équipe, disait-elle dans Biathlon Live en 2021. Avec autant d’entraînements à Oslo en commun et les voyages ensemble pendant la Coupe du Monde la moitié de l’année, je passe plus de temps avec Tiril qu’avec mon copain !".

L'exigence et bonne humeur

C'est dans les interviews anciennes que l'on trouve les clefs de la réussite présente. En 2021, alors qu'elle venait de fêter ses 25 ans en septembre, Tandrevold estimait être "un peu plus calme" et capable de relativiser "si les choses ne se passent pas exactement comme prévu ou comme je le souhaite. J'ai appris que le plus important est de faire des entraînements de qualité, de travailler dur. Et ça finira par payer. C’est mon meilleur conseil pour les jeunes athlètes féminines. N’oubliez pas que ce que vous faites maintenant vous l’emmagasinez et vous le récupérerez plus tard même si vous ne voyez peut-être pas les résultats tout de suite".

En quête de perfectionnement, elle a voulu imiter Erling Haaland et Iga Swiatek qui dorment en se scotchant la bouche pour mieux respirer par la bouche. "J'ai été un peu malade cet été (une infection respiratoire qui l'a empêché de disputer ses championnats nationaux estivaux à la mi-septembre, ndlr), puis j'ai remarqué que je respirais beaucoup par la bouche et j'ai eu un très mauvais pressentiment, a-t-elle déclaré sur TV2. Puis je me suis demandé ce que je devais faire. Je dois à nouveau passer à la respiration nasale. Et puis j'ai décidé de scotcher ma bouche. Je crois fermement qu'il faut respirer avec le nez et non avec la bouche, sauf quand on skie. Je pense que c'est mieux, c'est pour ça que tu es fait". 

Dans Nordic Magazine, l'ancien entraîneur de l'Équipe de France féminine Frédéric Jean a constaté après l'étape d'Hochfilzen que "Tandrevold s’est immédiatement imprégnée du rôle de leader et le tient parfaitement. Il ne lui aura pas fallu longtemps pour prendre le maillot jaune en rehaussant le ton sur les skis où elle est vraiment très rapide (elle est passé de Fischer à Salomon en 2022, ndlr). Elle a aussi passé un cap au tir, notamment au niveau de son approche. Elle est beaucoup plus sereine et engagée sur les tapis. Ce sont les ingrédients qu’il faut pour aller chercher les gagnes et les podiums". 

Et tout ça sans perdre son sourire communicatif : "n’oubliez pas que le but n’est pas l’arrivée mais le voyage...et il est très important de s’amuser aussi pendant le trajet !".