Cette fois-ci, Tony Yoka s'en remettra-t-il ? Battu sur décision partagée par le Belge Ryad Mehry (96-94, 96-94, 94-96), "L'Artiste" a semblé hébété, hagard à l'annonce des cartes des juges. Pourtant, les touches les plus nettes, les meilleures initiatives ont été prises par son adversaire, devenu poids lourd après le confinement car il avait pris trop de kilos mais qui envisage avant tout une ceinture mondiale dans la catégorie nouvellement inventée des bridgerweights (entre les lourds et les lourds-légers). Don Charles aura beau râlé au micro de Canal + après le combat, son boxeur a proposé trop peu ce samedi soir alors qu'il était plus que jamais attendu après deux défaites de rang contre Martin Bakole et Carlos Takam.
Un début de combat pas à la hauteur des promesses
Tony Yoka a enjambé la 4e corde pour entrer dans le ring. Sur le court Philippe-Chatrier, à Roland-Garros, là où il avait remporté son ultime succès, contre Petar Milas, en septembre 2021, "L'Artiste" a mis sa carrière en jeu, ni plus ni moins. Vingt centimètres plus grand, doté d'une allonge très supérieur, le Français partait favori.
Après les 10 reprises, la décision est tombée : Yoka a perdu. Ce n'est pas seulement une histoire de pointage, c'est aussi une question d'état d'esprit. Il avait promis du rythme dès le début du combat mais le premier enchaînement a été l'oeuvre de Mehry, venu toucher au corps avant de remonter au visage. Don Charles réclamait une meilleure utilisation du direct du gauche qui a perforé la garde de son adversaire.
Un round d'observation qui laissait supposer que Mehry ne se jetterait pas. Effectivement, c'était à Yoka de faire le combat, à la fois pour lui mais aussi pour reconquérir son public et convaincre Canal + de renouveler son contrat qui arrivera à terme en 2024. Malin et patient, le Belge a de nouveau pu travailler en séries lors du 2e round et si Yoka n'était pas spécialement touché hormis sur un beau crochet du droit, il subissait ce début de combat.
Dans le 3e round, Mehry cherchait le corps et profitait de sa vitesse pour toucher, alors que Yoka, attentiste, essayait de cadrer le Belge. L'Artiste a enfin pu toucher avec une droite en ligne nette, dans la dernière minute. Joli mais assez peu pour un boxeur qui devait faire le spectacle.
Trop timoré, jamais emballant
Dès le début de la 4e reprise, Yoka était contré par Mehry qui multipliait les combinaisons. La main droite trop basse, le Français essuyait une nouvelle gauche. Mehry était plus vif, plus précis et voulait faire mal sur chaque frappe.
Sermonné par Don Charles, Yoka a débuté la 5e reprise avec une belle droite. Mais les crochets du Belge étaient toujours puissants, et ses directs fonctionnaient aussi. Yoka a enfin utilisé son uppercut. Passif pour la première fois, Mehry semblait en quête de récupération.
Le Belge confirmait sa baisse de rendement dans la 6e reprise mais Yoka ne proposait pas davantage, se contentant du minimum, scolaire et aux ordres de Don Charles. Pour autant, son travail de sape avec son direct du gauche faisait son oeuvre. Appliqué, le Français suivait son plan, peu spectaculaire. Néanmoins, il commençait à sérieusement marquer au niveau du nez et de la pommette droite, preuve que Mehry était toujours dans le coup.
Dès les premières secondes du 8e round, le Belge a signé une belle combinaison, suivi d'un direct du gauche et d'une autre combinaison. Mehry a terminé la reprise sur une autre série, alors que les sifflets commençaient à raisonner. "Tu es le champion olympique, montre-lui !", lui a hurlé Don Charles lors de la minute de repos.
Vivifié, Yoka a mieux débuté la 9e reprise et Mehry semblait puiser dans ses réserves. Mais à une minute de la cloche, le Belge a accéléré, quitte à être contré par la gauche de Yoka.
Dans l'ultime round, le Français a pris l'initiative mais le Belge a répliqué. Yoka a même cherché à s'accrocher. Un crochet du gauche dans la dernière minute l'a ébranlé et il n'a pas essayé de lancer une ultime série pour achever le combat. La cloche a tinté, les sifflets sont descendus des travées, la décision est tombée.
Yoka a perdu à domicile, devant son public, alors que, traditionnellement, le local est légèrement avantagé par les juges. Un round d'écart pour les trois juges, c'est à la fois peu mais aussi beaucoup car le Français n'a pas essayé de sortir de sa zone de confort, peut-être bridé par son coach, celui qui devait tout changer. Yoka est resté trop dans la retenue alors qu'il avait annoncé l'inverse. À présent sur 3 défaites consécutives et encore un combat à disputer sous les caméras de Canal +, "L'Artiste" est plus seul que jamais.
