En 2018, Antoine Griezmann avait marqué le Mondial de son empreinte, par son style et par ses buts. Il était alors au faîte de sa carrière, idole de l'Atlético de Madrid avec qui il venait de remporter la Ligue Europa avant de terminer 3e du Ballon d'Or. Depuis, beaucoup de choses se sont produites, de son transfert manqué au FC Barcelone à son retour chez les Colchoneros.
En équipe de France, l'émergence de Kylian Mbappé et le retour de Karim Benzema l'avaient poussé sur le côté. Moins influent, moins décisif, au point que le voir en super sub pendant la Coupe du monde, comme il a pu l'être avec l'Atleti en début de saison en raison de la clause qui l'empêchait de jouer plus de 45 minutes.
Le meilleur dans le tiers adverse
Le forfait de dernière minute de KB Nueve a remis Griezmann sur le devant de la scène. Le passage à 4 en défense a provoqué un remodelage du milieu de terrain. Et c'est finalement le Mâconnais le principal bénéficiaire. Appuyé par Aurélien Tchouaméni et Adrien Rabiot, "Grizi" a reculé sur le terrain pour mieux se convertir en meneur de jeu, tout en ne sacrifiant pas le repli défensif.
Contre l'Australie, et comme l'indique sa heat map, Griezmann a principalement évolué côté droit pour avoir davantage de possibilités à l'intérieur et laisser le couloir droit à Ousmane Dembélé. Une forme de nécessité, car le jeu de l'équipe de France tend naturellement de l'autre côté, vers Kylian Mbappé. Avec 88 ballons touchés et un seul perdu en 90 minutes, qui plus est dans le camp australien, le Rojiblanco a fait étalage de sa conversation de balle, même si le pressing des Socceroos n'était guère intense. Par ailleurs, c'est lui qui a été le plus influent dans le dernier tiers du terrain, avec 28 passes adressées et 6 occasions créées. La preuve d'une emprise sur le jeu et d'une volonté de servir ses coéquipiers.
Prise de pouvoir en douceur... mais avec fermeté
Mais au-delà des statistiques, c'est dans le comportement qu'Antoine Griezmann a fait montre de leadership. Alors que l'avant-match a été principalement consacré aux capacités de Kylian Mbappé à se muer en taulier indépassable, c'est au contraire celui que l'on attendait presque plus qui s'est mué en première rampe de lancement offensive, en compagnie d'Adrien Rabiot en mode bianconero pour ce premier match du Mondial. On l'oublie souvent mais Griezmann a aussi un ego fort et il n'avait jamais eu l'intention de perdre en influence au sein du groupe France. Et c'est dès le début de la reine des compétitions qu'il a rappelées quel type de joueur protéiforme et complet, il était.
Par son placement, mais aussi par son goût prononcé par le collectif, Griezmann est un leader naturel dans l'axe du jeu. En l'état actuel des choses, c'est beaucoup plus logique car, Mbappé, par sa situation excentrée et par sa faculté à créer des décalages sur le côté, tient plus du soliste. En somme, deux rôles différents et complémentaires, dans la veine de la Coupe du monde 2018... mais avec un Mbappé forcément plus influent et bien plus attendu.
Contraint de revoir ses plans, Didier Deschamps a peut-être trouvé une solution pour son organisation offensive. Certes, l'Australie constitue un miroir déformant, car le niveau était faible, ce qui a offert beaucoup d'opportunités et la possibilité de répéter les gammes. Face à un milieu plus dense, plus rugueux et plus expérimenté, il faudra voir si ce positionnement est adéquat.
Après deux défaites consécutives contre le Danemark en Ligue des nations, les retrouvailles donneront un aperçu plus précis des capacités de Griezmann en cornac des Bleus. Après ce match inaugural, "Grizou" a posé les bases pour que cette version 2022 soit "son" équipe. Reste à savoir si cette prise de pouvoir, si elle tendait à se confirmer, sera acceptée de tous.
