Jouer avec un maillot à damier laisse supposer une certain appétence pour le jeu d'échecs. Après une qualification acquise au terme d'un match difficile contre le Japon et au prix d'une séance de tirs au but survolée par Dominik Livakovic (1-1, 3 tab à 1), la Croatie n'avait pas l'intention de se faire trimbaler par le Brésil, vainqueur flamboyant de la Corée du Sud en 1/8 de finale (4-1).
Pour le finaliste de 2018, la principale difficulté du début de match était de limiter les assauts initiaux de la Selaçao, ceux qui ont fait sombrer les guerriers Taegeuk en quelques minutes. Avec leur trident au milieu Luka Modric-Marcelo Brozovic-Mateo Kovacic, les Vatreni se sont appliqués à dicter le rythme de la rencontre, avec un bloc haut et coordonné à même de limiter les possibilités de contres adverses. Vinicius Jr (5e, 20e), Neymar (20e, 42e sur coup franc direct) et Casemiro (23e) se sont procurés des positions de tirs, sans inquiéter le gardien croate.
Pendant les 45 premières minutes, la Canarinha n'a guère eu l'opportunité de s'exprimer. Grâce au travail collectif opéré et à la fermeture des couloirs avec Borna Sosa à gauche et Josip Juranovic à droite, les Croates ont très bien contenu la vivacité brésilienne, même si le milieu de terrain auriverde a su couper certaines transmissions, appuyé notamment derrière par un Thiago Silva tranchant. Jamais inquiété, Alisson Becker a vécu un premier acte tranquille, les Vatreni ne parvenant pas trouver le déséquilibre qui permettrait de faire basculer devant au tableau d'affichage. Pour autant, alors que les hommes de Zlatko Dalic jouaient ensemble, c'était moins le cas côté brésilien, avec un manque de repli des joueurs offensifs, Neymar et Vinicius en tête.
Le Brésil domine mais ne trouve pas la faille
De retour des vestiaires, les Brésiliens ont accéléré. Côté droit auriverde, Raphinha a enfin eu un ballon exploitable. La transmission pour Éder Militao a provoqué un centre tendu détourné dans son propre but par Josko Gvardiol mais paré in extremis par Livakovic (46e). Dans la continuité, Juranovic, au duel avec Neymar, a touché le ballon de la main involontairement mais les arbitres à la VAR ont annoncé une position de hors-jeu initiale (47e).
La Croatie a répliqué sur corner mais Andrej Kramaric n'a pu profiter de sa position un peu excentrée dans la surface pour délivrer un bon ballon (49e). Après un double renversement de jeu, Ivan Perisic a cherché la tête de Kramaric lancé mais la balle est passée au-dessus du crâne de l'attaquant (52e).
Après avoir vu le milieu de terrain croate resplendir en première période, c'est Livakovic qui a pris un peu de lumière. Après un excellent mouvement de corps pour se mettre dans le sens du jeu, Richarlison a ouvert la voie à Neymar mais le gardien croate a bondi pour repousser la frappe du numéro 10 auriverde (55e). Après avoir jaugé son adversaire, la Seleçao était proche de faire craquer les Vatreni sur un nouveau centre de Richarlison sans destinataire mais témoignant de la volonté de mettre de la verticalité et de la vitesse (56e).
L'orage semblait passé mais Livakovic s'est encore employé pour détourner en corner une opportunité de Lucas Paqueta (66e). Les entrées d'Antony puis Rodrygo à la place de Raphinha et Vinicius ont contribué à étirer davantage le bloc croate qui commençait à se lézarder. Neymar s'est une nouvelle fois empalé sur Livakovic (76e), Paqueta a trouvé les gants du rempart croate (80e), Richarlison n'a pu rabattre sa tête sur un centre rentrant de Casemiro (82e), Militao a vu sa frappe du gauche suffisamment déviée pour s'échapper du cadre (86e) et Antony, à la dernière seconde, a essayé sans succès d'éviter la prolongation (90+4e). Au courage, en acceptant de subir en bloc bas quitte à ne se procurer aucune occasion exploitable, les Vatreni ont tenu pour disputer 30 minutes supplémentaires.
L'éclair de génie de Neymar, la réplique de Petkovic
Toujours à l'attaque, la Canarinha a maintenu la Croatie en apnée en début de prolongation, même si les hommes de Tite, à l'image d'Antony et Neymar, paraissaient aussi vexés que nerveux. A raison. Sur un contre amorcé par Modric, Nikola Vlasic a réalisé un geste technique remarquable pour offrir une balle en or à Brozovic, en position idéale, mais sa frappe en déséquilibre arrière est passée nettement au-dessus (102e).
Mais alors que les arrêts de jeu de la 1re période arrivaient à leur terme, Neymar a surgi. A l'initiative du mouvement à 35 mètres des cages adverses, il s'est appuyé sur Rodrygo pour s'enfoncer dans la défense croate, devancer Gvardiol, résister à Sosa et dribbler Livakovic pour ouvrir le score, délivrer tout le peuple auriverde et égaler le record de buts d'O Rei Pelé, avec 77 réalisations (105e+1).
Dépassé par une fulgurance individuelle, les Vatreni se sont rués à l'attaque pour enfin inquiéter Alisson Becker. Sur un circuit de passes rapides initié de l'arrière avec Gvardiol et enclenché véritablement par Modric, les Croates ont trouvé le décalagr sur leur côté gauche. Et au bout du centre de Mislav Orsic, Bruno Petkovic a trouvé les filets brésiliens, aidé par une déviation involontaire de Marquinhos (116e). Sur un coup franc obtenu par Antony sur le côté droit brésilien, Casemiro a eu le ballon de la gagne après une déviation de Marquinhos mais Livakovic n'a pas tremblé, juste avant la séance de tirs au but (105+2).
Livakovic, évidemment
Le gardien du Dinamo Zagreb, immense contre le Japon, a tout de suite flambé. Après que Vlasic a inauguré la séance de tirs au but avec succès, Rodrygo a vu sa tentative repoussée. Si Casemiro et Pedro ont transformé leur tir, aucun Croate, à commencer par Modric, n'a failli non plus. Contraint de marquer, Marquinhos a embrassé le ballon mais malheureusement pour lui, le ballon est allé embrasser le poteau. Cruel dénouement pour un joueur exemplaire. En pleurs, Neymar quitte cette Coupe du Monde et son absence sur les tirs au but ne manquera pas de faire parler au pays.
