Il ne s'agit pas d'un exploit. C'est même un terme à proscrire. Car ce que vient de réaliser le Maroc relève de la plus pure logique au vu de son tournoi. Avec sa défense de fer et son réalisme offensif, les Lions de l'Atlas ont renversé le Portugal. Un modèle de solidarité, de lucidité tactique, de constance dans le plan de base. Les hommes de Walid Regragui sont dans l'Histoire : ils sont en 1/2 finale de la Coupe du Monde. Le Maroc a réussi là où le Cameroun, le Sénégal et le Ghana avaient échoué. Une première pour un pays africain.
En-Nesyri surprend Costa
A force de prévenir, ce n'est plus une surprise. Solide en défense depuis le début de la compétition, avec un seul but encaissé contre le Canada, le Maroc, même privé de Nayef Aguerd et Noussair Mazraoui, même avec son capitaine Romain Saïss diminué, a fait preuve d'une rigueur absolue contre les Quinas. Mais cette fois-ci, contrairement aux 1/8 de finale contre l'Espagne, les Lions de l'Atlas ont marqué. A la 40e minute, alors que Diogo Costa pensait se saisir sans problème d'un centre venu de la gauche par Yahya Attiat-Allah, Youssef En-Nesyri a surgi pour devancer le gardien portugais. Une tête plein de lucidité et de réalisme qui sanctionnait une possession portugaise outrageuse mais jusqu'alors sans danger, hormis sur une tête de Joao Félix repoussée par Yassine Bounou.
La frappe excentrée de Bruno Fernandes dont la trajectoire a fini sa course sur la transversale adverse (45e) a sonné un début de révolte juste avant la pause. Mais comment faire pour forcer ce verrou dont ni la Croatie ni la Belgique ni l'Espagne n'a trouvé le code ?
El Yamiq manque le 2-0, Ronaldo entre
En pleine confiance, les Marocains sont revenus sur la pelouse avec l'intention de jouer chaque opportunité à fond. A la suite d'un coup franc très bien frappé, Jawad El Yamiq a eu une balle de 2-0 alors que le cuir avait ricoché sur Costa. La tête du défenseur n'a pu trouver le cadre, au grand dam des très nombreux supporters des Lions de l'Atlas (50e). Conscient que le piège se refermait, Fernando Santos a fait entrer Joao Cancelo et Cristiano Ronaldo pour apporter de la vitesse côté gauche et du soutien à Gonçalo Ramos, bien moins en verve que face à la Suisse, en atteste une occasion énorme caviardée avant l'heure de jeu (58e). Portugais le plus en vue, Fernandes a cru égaliser mais sa frappe sèche déclenchée de l'extérieur de la surface a fini sa course au-dessus de la transversale de Bounou.
Privé de Saïss qui a dû renoncer la mort dans l'âme à la 57e minute, le Maroc résistait, avec un bloc de plus en plus bas. Avec CR7 comme nouveau d'appui, les Quinas ont cherché la tête du quintuple Ballon d'Or mais ni Cancelo (66e) ni Fernandes (68e) n'y sont parvenus.
Les Quinas pris dans la toile
Il ne restait plus que 20 minutes à disputer hors taxes. Santos a alors replacé Felix dans l'axe et Rafael Leao s'est positionné sur le côté gauche, tandis que Vitinha entrait pour densifier le milieu et rajouter une solution de passe. D'emblée, Leao a gagné un coup franc une sorte de mini-corner à l'entrée de la surface adverse. Fernandes a trouvé Bernardo Silva mais le Citizen, pourtant seul, a manqué de vivacité pour reprendre la passe du Red Devil (71e).
Le combat s'intensifiait plus que jamais. Les Marocains, toujours aussi solidaires, ont eu des opportunités de contres, à l'image de Walid Cheddira repris in extremis par Diogo Dalot, ce qui lui a peut-être coûté une blessure musculaire quelques instants plus tard. (75e).
Les secondes défilaient mais, vu les scenarios de la veille, impossible de dire que l'affaire était pliée. Sur une rare erreur de relance marocaine, Ricardo Horta a trouvé Ronaldo qui, en une touche, remisait sur Félix dont la frappe puissante a été détournée par Bounou (82e). Les regards portugais traduisaient de la résignation. A leur tour, ils étaient englués dans la toile marocaine. Alors que 8 minutes supplémentaires étaient annoncés, Ronaldo a enfin eu un ballon exploitable mais sa frappe a fini dans les gants de Bounou (90+1e).
Coupable d'une contestation puis d'une semelle à quelques secondes d'intervalle, Cheddira a été exclu (90+3e). Un signe d'espoir pour les Quinas ? Replacé dans l'axe, Zakaria Aboukhlal a eu la balle de match au bout du pied mais, trop gourmand, il a voulu piquer le ballon par-dessus Costa (90+6e). Le lactique envahissait les cuisses marocaines quand Pepe, au deuxième poteau, n'a pu cadrer sa tête (90+7e).
L'arbitre a sifflé la fin du match. Alors que les larmes envahissaient les joues de Ronaldo et de ses coéquipiers, le Maroc entrait de plain pied dans l'Histoire de la Coupe du Monde. Et c'est tout sauf un exploit tant c'est mérité.
