Vieux, usé, fatigué. On force le trait mais, quand il est arrivé Porte d'Auteuil, on ne savait pas trop où en était Novak Djokovic. Double vainqueur à Roland-Garros, le Serbe inquiétait depuis plusieurs semaines sur terre battue. Même "son" tournoi à Banja Luka s'était achevé précipitamment, puis Lorenzo Musetti avait eu son scalp à Monte Carlo et, après un forfait à Madrid, Holger Rune l'avait fait craquer en 3 sets à Rome.
Mais à Paris, le manchon qui renforçait les articulations de son coude. À plus de 36 ans, "Nole" voulait envoyer un premier message, même si on commence à être habitué à sa résistance à la douleur quand les tours passent et que le trophée se rapproche. À ce niveau-là, sa quinzaine s'est déroulée sans accroc majeur. Il a tenu le choc contre Alejandro Davidovich Fokina puis contre Karen Khachanov alors que le Russe a failli basculer à 2 sets à 0 en 1/4 de finale. Djokovic connaît son corps et veut toujours améliorer ses connaissances sur son organisme, notamment avec cette puce très intriguante accrochée à son torse.
Son coup de maître est cette 1/2 finale où, grâce à une énorme entame, il a poussé Carlos Alcaraz aux crampes alors que la perte du 2e set augurait un cavalier seul de l'Espagnol d'autant que le coude manquait d'huile dans les rouages. Le Serbe a connu ça et le Murcien a découvert cette sensation terrible de sentir ses muscles se contracter des pieds à la tête. Une telle chose serait-elle arrivée si le "Djoker" n'avait pas fait all-in dès son entrée sur le Philippe-Chatrier ?
Ruud en mode Wawrinka
Ce match au sommet, appelé à tort une finale avant la lettre, a montré que Djokovic restait un métronome incroyable avec son revers. Alcaraz n'a pas trouvé la clef pendant le premier set et une bonne partie du deuxième. Sa capacité à tenir l'échange et faire céder l'adversaire demeure un aspect prépondérant de son jeu. Ses petites provocations lors des 3e et 4e sets ont aussi démontré qu'il tenait impérativement à maintenir sa concentration au maximum car, même à 25%, Alcaraz lâchait encore quelques coups de fusil, foutu pour foutu. Si le public a sifflé, prenant cela pour un manque de classe, cela a surtout mis en exergue la hargne de Djokovic, refusant tout sentimentalisme et pensant déjà à dimanche après-midi.
Pour autant, cela suffira-t-il contre un Casper Ruud aussi discret que souverain à la Porte d'Auteuil. L'an dernier à la même époque, il était novice en finale de Grand Chelem et la montagne Rafael Nadal était trop haute. Douze mois plus tard, il dispute à présent sa troisième finale de Majeur lors des 5 derniers tournois. Certes, il a plié face à Alcaraz mais désormais, il a non seulement plus d'expérience mais surtout beaucoup plus de certitudes sur ses capacités. À l'image de Stan Wawrinka en 2015, le Norvégien peut renverser Djokovic.
Néanmoins, cela sera-t-il suffisant face à un joueur qui a rendez-vous avec l'Histoire ? L'actuel numéro 3 mondial avait flanché contre Daniil Medvedev lors de l'US Open 2021 au moment d'accrocher un 22e Grand Chelem. Les portes de l'Olympe sont toujours plus lourdes au moment de les enfoncer et même le plus solide des joueurs peut être paralysé par l'instant, surtout si c'est dans le royaume de Nadal.
