L'Arabie saoudite, le futur royaume du football ?

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L'Arabie saoudite, le futur royaume du football ?
Le sourire carnassier de Cristiano Ronaldo va-t-il rester la saison prochaine en Saudi Pro League ?
Le sourire carnassier de Cristiano Ronaldo va-t-il rester la saison prochaine en Saudi Pro League ?Profimedia
C'est le nouvel eldorado du football mondial, le football saoudien semble attirer de plus en plus de stars ces dernières semaines. Mais pourquoi et comment est-ce possible ? Éléments de réponse avec Jean-Baptiste Guégan, géopoliticien du sport.

Cristiano Ronaldo cet hiver, Karim Benzema, N'Golo Kanté, Ruben Neves cet été, puis possiblement Hakim Ziyech et Edouard Mendy, notamment, dans les prochaines heures, la Saudi Pro League attire actuellement plusieurs très grands joueurs, chose que la Chinese Super League n'était pas parvenu à faire aussi bien, il y a quelques années.

De plus, il y a d'autres joueurs étrangers que l'on connaît bien en Europe qui y sont déjà : Felipe Caïcedo, Ryad Boudebouz, Cristian Tello, Moussa Marega, Luiz Gustavo, Talisca, David Ospina, Éver Banega ou encore Naldo. Du beau monde qui risque d'être rejoint par de plus grands noms encore dans les mois et années à venir.

Jean-Baptiste Guégan, auteur et spécialiste en géopolitique du sport – dont son prochain livre "Qatar, dominer par le sport", aux éditions Bréal by Studyrama, sortira le 27 juin prochain -, a pris le temps de répondre aux questions de Flashscore France

Une dynamique viable

Depuis plusieurs semaines, c'est un véritable raz de marée médiatico-sportif, l'Arabie saoudite est au cœur de ce mercato estival 2023. Mais, pourquoi d'un coup aussi brutal ? L'idée est de prendre une place très importante dans le football mondial – avec comme objectif principal l'organisation de la Coupe du monde 2030 –, et pour cela, il faut attirer les meilleurs joueurs possibles.

"Elle est simple, car elle réside dans leur capacité de financement, dans le cadre de leur projet "Saudi Vision 2030", un projet d'aménagement et de modernisation du pays. C'est d'abord lié à leur ambition dans le sport, avec le golf, le tennis et le football. L'ambition est d'être un acteur majeur du sport mondial, dans la lignée de ce qu'ont fait le Qatar ou les Emirats arabes unis. Et, ce timing correspond à l'arrivée de Mohamed ben Salmane au pouvoir en 2017 (...), dans le but de changer le visage de l'Arabie saoudite et les perceptions que nous avons d'elle. Il y a une volonté de maîtriser le storytelling, avec des objectifs de national branding, et donc politiques", affirme Jean-Baptiste Guégan.

Et, malheureusement pour les plus traditionnelles fans de football, habitués à voir le Vieux Continent dominer financièrement sur la planète du ballon rond, les investissements saoudiens vont durer et s'étaler sur de nombreuses années. Ce à quoi nous assistons actuellement ne constitue pas un épiphénomène. Il y a des grandes chances que nous voyons la Saudi Pro League attirer de nombreux joueurs à chaque mercato. 

"Elle est vouée à durer jusqu'en 2030, c'est certain. Le plan de développement est étalé sur quasiment une décennie. Les montants, qui sont annoncés, les mouvements que l'on peut observer et les réactions que cela suppose, amènent à penser, au regard de leur capacité financière, ils n'auront aucun intérêt à s'arrêter. D'autant que cela marche. Néanmoins, ils ont des échéances à moyen terme :  la construction d'une candidature viable pour la Coupe du monde 2030, une autre pour des Jeux olympiques d'été, un Championnat du monde des clubs en 2023 et puis des performances accrues de la sélection saoudienne", ajoute Guégan.

D'ailleurs, l'Arabie saoudite fera mieux que la Chine il y a quelques années. La Chinese Super League a perdu de sa superbe, avec une dynamique économique freinée par le gouvernement, notamment lié à des problèmes structurels. Cela ne risque pas d'arriver à la SPL, malgré un risque d'effondrement qui existe toujours : "Oui, c'est une possibilité, ou du moins limiter les investissements, à l'image de ce qu'a fait le gouvernement chinois en Chinese Super League. Pour le moment, c'est impressionnant, comme l'a fait la Chine, mais c'est un peu plus rationnel et la visée est un peu plus claire."

Si l'Arabie saoudite, d'un point de vue culturel notamment, est en plein boom, notre expert indique que cela devrait durer : "Ils ont une capacité de levée de fonds sans commune mesure et leur capacité de financement y est directement liée. En termes de modèle économique, le football saoudien pourrait s'avérer non-rentable, mais il faut raisonner globalement et leur objectif ne cantonne pas qu'au ballon rond, donc tous les investissements qui seront consentis, si on les additionne, vont permettre d'obtenir des résultats que l'on n'aurait pas ailleurs. Donc est-ce viable économiquement ? À court-terme : non, à moyen-terme : peut-être, à long-terme : ça va dépendre des résultats obtenus.»

Des ambitions démesurées, sans compter Newcastle

"(L'ambition), c'est d'être le premier championnat du Golfe, le premier d'Asie et d'être performant au point de porter la SPL au 10e rang mondial (27e actuellement, ndlr). 1 milliard d'euros pour 20 stars, 20 milliards d'euros concernant la politique sportive, des chiffres démesurés et l'ambition est colossale. C'est aussi de pousser les clubs historiques, ceux qui ont été rachetés par le Public Investment Fund et par Aramco, pour en faire des clubs globaux, afin de briller à l'échelle internationale, mais aussi nationale. Quant aux joueurs, les interrogations demeurent : on a vu les états d'âme de Cristiano Ronaldo, certains refusent de venir en Arabie saoudite, comme Messi. On verra bien ceux qui iront, s'ils y restent, ce qu'ils demandent, s'ils se comportent comme Lavezzi en Chine, ou au contraire si au bout de six mois, la vie ne leur convient pas", assure Jean-Baptiste Guégan.

Nous assistons peut-être, donc, à un changement de paradigme dans le football mondial. Là où il existe un monopole actuel, aussi bien sportif, médiatique, qu'économique, c'est-à-dire l'Europe, les moyens financiers saoudiens sont tellement importants qu'il constituera, à terme, un second pôle international. Accomplissement nécessairement extraordinaire lorsqu'on sait que le Vieux Continent domine depuis 1955 et la création de la C1, puis encore davantage depuis le tournant de l'arrêt Bosman en 1995 et le XXIe siècle où tout a changé.

Tout récemment, la rumeur envoyant Cristiano Ronaldo à Newcastle est apparue dans la presse et sur les réseaux sociaux. Forcément, l'idée selon laquelle le club anglais deviendrait une passerelle pour l'Arabie saoudite apparaît évidente aux yeux de certains. Pourtant, Jean-Baptiste Guégan la réfute pour des raisons juridiques. En effet, les Magpies doivent prouver qu'ils sont indépendants aussi bien économiquement que politiquement.

Ainsi, l'Arabie saoudite se construit footballistiquement différemment que ses voisins géographiques comme le Qatar et les Emirats arabes unis. Et, il est important de le souligner.

"CR7 à Newcastle semble difficile, car théoriquement le club anglais doit être indépendant de l'État saoudien. Donc, pour des raisons statutaires, parce que ce sont les règles qui ont été imposées lors du rachat de Newcastle, ça paraît compliqué. Néanmoins, au regard des états d'âme du joueur, l'Arabie saoudite pourrait trouver un point de chute et Newcastle pourrait en être un. Après, sportivement, il n'est plus aussi performant et ce serait compliqué (de le voir s'intégrer) dans une équipe qui tourne bien, et cela ne serait pas un très bon signe pour Newcastle, au regard de la capacité qu'ils ont eue à se montrer rationnel en termes de transferts. Pour le moment, il n'y a pas de volonté de faire de Newcastle un club passerelle et encore moins un club qui ferait partie d'une holding, on est sur quelque chose d'assez différent de ce que l'on peut voir avec le City Football Group ou même avec le Qatar s'il y a rachat de Manchester United", conclut Guégan.

France gouvernement

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