Commençons par le positif : les joueurs français ne sont pas tombés dans ce piège béant. Anthony Jelonch a notamment déclaré que "l'arbitre a pris une décision, il faut la respecter". Quant à Fabien Galthié, il a voulu la jouer fair-play.
"Que dire... il faut être fair-play. Sur le moment, on voit qu'il a le pied... mais le juge de touche est à trois mètres et est là pour le voir. Il y a les images, mais il manque le bon plan (il rit). Mais il sort une fois que l'essai est accordé ! Il faut être fair-play même si c'est vrai qu'à ce moment-là, ce sont cinq points en moins".
Car c'est de là que vient la polémique. L'essai de James Lowe en première mi-temps. Servi en bout de ligne, l'ailier irlandais va aplatir, mais le retour de Damian Penaud jette un trouble sur sa validité. À vitesse réelle, bien entendu, impossible de savoir. Après tout, c'est pour ça qu'on a intégré l'arbitrage vidéo ! Mais en regardant les images, on n'est pas vraiment avancés.
Oui, "il semblerait que" le bout du chausson de l'ailier frôle la pelouse. Mais sur le plan, le poteau de coin obstrue ce moment. A priori, il n'y a pas essai. Chauvinisme ou objectivité, peu importe. Car c'est le haut niveau, il n'y a pas d'a priori, que les faits.
Et c'est là qu'on rappelle la règle : quand l'arbitre fait appel à la vidéo, il doit d'abord donner la fameuse "décision terrain". Ici, en l'occurrence, c'était "essai". Et pour infirmer la décision, il faut une image indiscutable. Ce qui n'a pas été le cas sur les plans proposés à l'arbitre alors qu'il tentait de se décider. Essai accordé, c'est la règle.
Et "comme par magie", au retour des vestiaires, les commentateurs avaient retrouvé LE PLAN qui invalidait l'essai. Effectivement, vu de derrière, l'essai n'est pas valable. Mais c'était plus de 20 minutes après la décision. Cependant, ce plan judicieusement ressorti avait bien entendu pour but d'alimenter la polémique.
La vidéo n'est pas la réponse à tout
Wayne Barnes est Anglais. Donc, il est anti-français dans la tête de la majorité des fans et suiveurs. Mais Barnes n'est pas analyste vidéo. On lui montre des images, il prend sa décision en fonction. Il ne va pas interrompre le match pour aller chercher lui-même le plan, qui l'intéresse. Il en va de même pour l'arbitre vidéo, qui analyse avec son comparse les images, mais ne les filme pas : il n'est pas réalisateur.
Un réalisateur probablement irlandais, puisque le match est en Irlande. Alors quoi ? World Rugby va-t-il devoir embaucher des réalisateurs indépendants et pas de la même nationalité que les deux équipes sur le pré ? Une fois encore, la vidéo dans le sport montre ses limites, pas pour les mêmes raisons que d'habitude toutefois.
Mais en France, cela renvoie à Craig Joubert en finale de la Coupe du monde 2011. À Jaco Peyper qui posait avec des supporters gallois en 2019. Où à n'importe quel arbitre qui aurait lésé les Bleus. Jamais au grand jamais, on ne considère en France que le sacro-saint "arbitrage à la maison" ait pu nous apporter un bénéfice une fois dans l'histoire. Ce qui est bien entendu complètement faux.
La vérité, c'est qu'on n'avait plus connu la défaite depuis juillet 2021, soit 14 matches. Et fatalement, observateurs, public, fans, tout le monde oublie cette sensation et croit que ça n'arrivera plus. Et quand ça finit par arriver, il faut un coupable. Qui est 95 % du temps l'arbitre. Alors que le XV de France a juste perdu chez les n°1 mondiaux, qui étaient les plus forts, rien d'infamant. Espérons qu'ils gagneront la Coupe du monde à l'automne, sinon, on n'aura pas fini d'en entendre parler. Pas de jugement de morale ici, juste une opinion.
