L'éternité, c'est long, surtout vers la fin. 909 jours après le déménagement à Montjuic, le Barça retrouvait "son" Camp Nou, même si les travaux ne sont pas achevés et qu'il faudra attendre encore de longs mois pour que le stade atteigne sa capacité maximale de 105.000 places. Pour Joan Laporta, c'est aussi un soulagement car le plus grand stade d'Europe fait partie de son héritage.
Il a beau être le président du FC Barcelone, il reste un socio comme les autres. Le coup d'envoi est dans 2h30 mais il est déjà là, smartphone greffé à la main. Il enchaîne les vidéos des gradins et les selfies, une activité qu'il pratiquera assidûment à mesure que les invités en loge s'installeront. Il n'est pas le seul à vouloir sacraliser le moment. Supporters comme journalistes prennent la pose, à faire passer la Fashion Week pour un kermesse de fin d'année. Les angles de vue manquent d'originalité mais une photo reste plus marquante que les autres dans sa composition : trois générations apparaissent dans le cadre, du grand-père à... un bébé d'à peine quelques semaines, capable de dormir à poings fermés alors que la sono vrombissait.
Les deux premiers arceaux sont ouverts aux trois-quarts et tous les sièges sont pris d'assaut. Contrairement à la tradition locale, tout le monde est venu en avance. Hors de question de ne pas profiter de retour ! Les premiers applaudissements se font entendre quand les gardiens blaugranas entrent pour l'échauffement. Privilège du poste, ils seront les premiers à recevoir l'ovation, quelques minutes avant que les autres joueurs ne fassent leur apparition.
C'est la première, alors il y a un peu de retard dans le planning. L'hymne du club est entonné par un choeur accompagné de feux d'artifices. Une minute de silence pour la journée de lutte contre la violence de genre est respectée, ce qui ne manque pas d'ironie la semaine où le club a accueilli Jerome Boateng pour assister à quelques entraînements. Le coup d'envoi fictif est ensuite donné par deux socios présents... lors de l'inauguration du Camp Nou en 1957.
Visuellement, l'enceinte remodelée est moins évasée que la précédente et le public pourrait presque toucher les joueurs. Illusion d'optique amplifiée par des mois à Montjuic avec la piste olympique qui éloignait les supporters de l'action ? En tous cas, l'acoustique est très bonne, cela ne fait aucun doute lorsque les chants sont repris. Cela s'est notamment entendu quand une large partie du stade a réclamé une grada animació, fermée pour le moment (elle sera là où étaient installées les bâches bleu et grenat).
L'importance du moment n'a pas rattrapé le Barça. Robert Lewandowski n'a mis que 5 minutes pour écrire la première ligne de cette nouvelle histoire. Timoré, l'Athletic n'a existé qu'une dizaine de minutes, après la demi-heure de jeu. Avant la pause, Lamine Yamal a régalé Ferran Torres. Le duo fonctionnera à nouveau en toute fin de match. Entre les deux buts du Tiburón, Fermín López est devenu le premier Masian à marquer dans le nouveau stade. Il reste encore une case à cocher pour le premier Catalan... Peut-être la semaine prochaine pour la venue d'Alavés.
4-0 : la fête est complète. Au coup de sifflet final, l'hymne du Barça a jailli des baffles, accompagné d'un jeu de lumière et d'un nouveau feu d'artifices. En sortant du stade, des supporters scandent l'un des chants les plus connus du club et ce sont deux gamins qui répondent. La différence de tessiture rend la scène amusante... jusqu'à ce qu'un drapeau des Boixos Nois ne soit déployé, ce qui a au moins eu le mérite de faire comprendre leurs slogans anti-Laporta, un désamour qui dure depuis plus de 20 ans.
Le froid mordant (la température a chuté d'une bonne dizaine de degrés au milieu de la semaine) n'a pas eu de prise sur l'enthousiasme contagieux de ce retour à la maison. L'Athletic en a été pour ses frais. "Pour tout le monde, joueurs, staff, supporters, c'était formidable de revenir ici. En plus, on prend 3 points, on gagne 4-0. Tout est allé dans notre sens, a résumé Hansi Flick. Pour tout le monde, c'est incroyable de pouvoir être dans ce stade".
Revenir au Camp Nou est une première étape et après avoir apprivoisé les lieux, le Barça compte sur cet effet de nouveauté pour partir à la conquête de nouveaux titres. L'objectif est très ambitieux mais il sera toujours plus simple à atteindre dans son antre que sur la colline de Montjuic qui appartient désormais au passé.