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Surexposer F.Letexier pour siffler la finale de la C1, le mauvais calcul de la Direction de l'Arbitrage

François Letexier
François Letexier Mourad_ALLILI / PsnewZ / Profimedia
Quelques jours après avoir arbitré Real Madrid - Arsenal avec tout ce que cela peut impliquer comme influx nerveux, François Letexier a été remis sur le grill lors d'un derby entre Saint-Étienne et Lyon mouvementé, marqué par un carton rouge évident donné puis annulé et l'arrêt de la rencontre pendant 45 minutes après qu'un assistant a reçu une pièce sur le crâne. Etait-ce si nécessaire de le solliciter pour ce choc sous très haute tension ?

On imagine facilement le calcul : après avoir sifflé le 1/4 retour de la Ligue des Champions, il n'y avait plus guère de possibilités pour "exposer" François Letexier avant la finale le 1er juin prochain. Le mot a un double sens et l'arbitre n'est pas tombé du bon côté de la pièce.

Avec la présence du PSG dans le dernier carré, sa participation à ce stade de la compétition est évidemment impossible. Alors, les occasions de le mettre en avant deviennent rares. Sacré meilleur arbitre du monde en 2024 (une première depuis le doublé de Michel Vautrot en 1988 et 1989), désigné pour la finale du dernier Euro, Letexier s'est imposé comme la référence française à l'international. Un statut qui fait grincer des dents en France car ses prestations sont du genre clivantes, à l'image de Clément Turpin par le passé.  

Ainsi, plutôt que le mettre au repos ou de le cantonner à la VAR, il a enchaîné avec Saint-Étienne-OL dimanche soir. Une décision erronnée de la Direction de l'Arbitrage, spécialisée dans l'inspection des travaux finis mais beaucoup moins efficiente pour agir avec discernement.

Real Madrid-Arsenal, avec tout ce que ce match pouvait englober comme stress et de tension, était déjà un défi de fildefériste. Par deux fois, il a été déjugé par la VAR qui l'a en plus laissé au milieu du gué au moment de sanctionner Antonio Rüdiger qui avait littéralement marché sur Myles Lewis-Skelly.

Son bilan mitigé a-t-il poussé la DA à le remettre immédiatement sur le grill ? Déjà, sa saison n'a pas été très cohérente. Lors du Classique, il a administré un carton rouge à Amine Harit pour un pied haut sur Marquinhos dans le feu de l'action justifié par Letexier en personne auprès du diffuseur au motif que le Marseillais avait mis en péril l'intégrité physique du Parisien. Or lors de Monaco-PSG, il a pardonné à Wilfried Singo le fait d'avoir lacéré le visage de Gigio Donnarumma. La cicatrice est d'ailleurs toujours bien visible.

Et ce dimanche, il s'est déjugé alors qu'il avait pris la bonne décision en direct. Impossible de ne pas voir une corrélation entre les deux interventions de la VAR mercredi et celle prise dimanche soir. L'appel des arbitres vidéo a démontré deux choses : l'intervention à mauvais escient de la cabine qui frise le piège et le manque de confiance de Letexier alors même qu'il avait pris la bonne décision.

À Geoffroy-Guichard, il n'a pas utilisé sa notoriété pour mettre un terme définitif à la rencontre après l'avoir arrêtée et provoquer une jurisprudence qui est finalement particulièrement négative pour sa profession : quand un arbitre est touché dans son intégrité, le match peut reprendre. Catastrophique, surtout à une période où les agressions dans le football amateur connaissent une recrudessence très inquiétante. C'est évidemment plus simple à écrire qu'à faire mais il en avait pourtant le pouvoir... à moins qu'il n'y ait eu des pressions, extérieures ou personnelles. La fameuse finale de la Ligue des Champions a-t-elle eu une incidence ? Pure spéculation mais, consciemment ou insconsciemment, cela a pu jouer. 

En somme, y avait-il un besoin impérieux de mettre Letexier dans la nasse plutôt que de le laisser au repos ? Le doute est permis. L'effet est désastreux. Plutôt que de le protéger, la DA a peut-être définitivement enterré les chances de voir Letexier au sifflet de la finale de la Ligue des Champions, déjà conditionnées par l'élimination du PSG en demi-finale. Il ne reste plus beaucoup d'opportunités pour convaincre l'UEFA : Lille-OM et une potentielle finale de Coupe de France, même s'il est loin d'être acquis qu'il puisse être au sifflet pour la troisième fois en 5 saisons.

Au centre d'une crise institutionnelle qui dure des années, l'arbitrage français ne sort pas grandi, une nouvelle fois. Malgré tout, il continue d'être visible sur la scène continentale. C'est soit un exploit, soit un reflet actuel cuisant de l'état de la profession en Europe.