Les Strade Bianche 2013, le jour où Moreno Moser s'est fait un prénom

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Les Strade Bianche 2013, le jour où Moreno Moser s'est fait un prénom

Moreno Moser le 2 mars 2013.
Moreno Moser le 2 mars 2013.Profimedia
Neveu de l'illustre Francesco, Moreno Moser n'a pas eu la carrière de son oncle mais il a tout de même accroché quelques victoires et accessits. Il y a 10 ans, alors qu'il portait le maillot de la Liquigas, il s'adjugeait, à 22 ans, les Strade Bianche. Une victoire qui en appelait d'autres mais qui lui a aussi mis une immense pression sur les épaules dont il ne s'est jamais départie.

Quand on s'appelle Moser et qu'on veut faire carrière dans le cyclisme, il faut être équipé d'un sacré courage. À l'image d'un Axel Merckx roulant sur les traces d'Eddy, Moreno n'a pas choisi la facilité en prolongeant la dynastie initié par son père, Diego et ses oncles Aldo et Francesco, mythe sulfureux et occasionnellement aidé par l'hélico de la RAI pour le faire triompher de Laurent Fignon sur le Giro, mais figure tutélaire du cyclisme italien. 

Moser, bon sang ne saurait mentir

Autre chance ou fardeau, c'est selon, Moreno Moser a débarqué dans le professionnalisme avec le paletot de la Liquigas-Cannondale qui a vu éclore un certain Vincenzo Nibali, le dernier campionissimo transalpin. En 2012, dans les colonnes du site velo101, il faisait référence à un coureur également né en 1990 : "en France, il y a un coureur qui a le même âge que moi, Thibaut Pinot. C’est quelqu’un que j’ai aussi en point de référence"

Il était donc couru d'avance que Moreno Moser s'illustrerait sur les chemins toscans, là où tant d'apprentis cyclistes s'installent pour apprendre leur métier. Tout cela fleure bon la vieille époque, celle où les Italiens s'alignaient sur les Grands Tours pour gagner et où il y avait encore des équipes de 1re division mondiale au sein du peloton. À 22 ans, il a tout du nouveau jeune premier, lui qui a remporté en février 2012 le Troffeo Laugueglia, le GP de Francfort en mai, le Tour de Pologne en juillet, sans oublier sa médaille de bronze sur le championnat national fin juin. Un quart de siècle après Francesco, Moreno fait briller son patronyme à mesure que les attentes croissent. 

En 2013, les Strade Bianche n'ont pas encore acquis l'importance d'aujourd'hui. Originellement, en 1997, c'est une course amateur appelée "L'Eroica" qui rend hommages aux routes d'un autre temps au milieu des vignes toscanes où on presse le chianti. Devenue professionnelle en 2007, elle prend le nom de Monte Paschi Eroica du nom de la banque qui sponsorise l'événement. Deux ans plus tard, elle devient la Montepaschi Strade Bianche et trouve son appellation emblématique définitive en 2012. À son entrée dans le 7e et avant-dernier secteur en gravier, un groupe de tête composé de Giairo Ermeti, Michael Schär, Aleksejs Saramotis et Maxim Belkov compte 2 minutes d'avance sur Juan Antonio Flecha, en chasse-patate. Il reste 23 kilomètres à parcourir. Le peloton est emmené par Astana et la Liquigas-Cannondale. Cinq bornes plus loin, l'Espagnol au cœur de Flahute est sur le point d'être avalé quand Moreno Moser attaque et relance le coureur de la Vacansoleil, jamais le dernier pour une bonne partie de manivelle. Mais l'Italien met son compagnon au rupteur. 

Le 8e et dernier secteur gravillonné s'ouvre pour l'échappée : 1100 m à parcourir avant de basculer vers l'arrivée, à un peu plus de 12 kilomètres. La pente fait du dégât devant. En force et au train, Schär lâche ses compagnons. Belkov s'accroche, dodeline et saute. Moins de 30 secondes derrière, Flecha a mis la flèche quand Moser a appuyé sur les pédales. En spécialiste du contre-la-montre, un héritage familial, il met du rythme et réduit l'écart. Schär sort en tête et n'a plus que la Piazza del Campo de Sienne dans la tête. Lui non plus n'est pas un quidam sur l'exercice chronométré. Et ses aptitudes ne seront pas de trop s'il veut résister à la nouvelle pépite transalpine qui n'a plus que 15 secondes à combler au sortir de cet ultime secteur. Derrière, Peter Sagan, le leader de la Liquigas surveille les arrières de son coéquipier. Sur ses terres, Rinaldo Nocentini tente un baroud d'honneur. Alejandro Valverde met quelques secondes à réagir mais embarque sur son porte-bagage le Slovaque, Greg van Avermaet et Fabian Cancellara, tenant du titre et déjà vainqueur en 2008. De quoi en refroidir plus d'un.

Pendant ce temps-là, Belkov a lissé son effort et est rentré sur Schär qui a peut-être présumé de ses forces. Le retour du Russe de la Katusha s'est converti en meilleur allié de Moser... et de Saramotis qui, avec son maillot de champion de Lettonie, s'est fait la peau pour rentrer sur l'Italien. Déjà vainqueur à deux reprises, Cancellara refuse de baisser pavillon. Il étire le mini-peloton mais Sagan ne le lâche pas d'une semelle. Mais qui veut collaborer avec Spartacus ? Évidemment, personne. Néanmoins, un groupe de 4 se forme : Tom-Jelte Slagter, Damiano Caruso, Andey Amador et Nocentini. 

À l'avant, il reste 7 km à parcourir et le duo Moser-Saramotis aperçoit Schär et Belkov. Il n'y a plus que 9 secondes à récupérer, la jonction est imminente et intervient une borne plus loin. Moser est l'homme fort du quatuor. Schär ne peut gagner au sprint, alors il attaque à 5 km de l'arrivée. L'Italien comble l'écart. La course bouge aussi derrière : le groupe Cancellara-Sagan est revenu sur le quatuor de poursuivants. À la flamme rouge, les fugueurs sont encore sous pression. Il reste une dernière côte à escalader pour faire la différence. Moser se met en danseuse, Schär renonce et décroche. Plus qu'une rampe, la plus pentue. Moser en colle une deuxième. Ciao tutti ! Dans les ruelles escarpées et tortueuses de Sienne, il garde une poignée de secondes sur la meute qui fondait sur lui. Sagan passe la ligne en 2e pour signer un doublé de la Liquigas-Cannondale. C'est la 1re et seule fois qu'un Italien remporte les Strade Bianche

Le sommet d'une (courte) carrière sous pression

Cette démonstration a confirmé les grands espoirs placés en Moreno Moser et sa 3e place à l'Alpe d'Huez sur le Tour derrière Christophe Riblon et Tejay van Garderen paraissait montrer qu'il était capable de jolis coups dans les épreuves de trois semaines. Mais cette année 2013 sera sans lendemain. Le natif de Trente ne connaîtra pas la carrière qu'on lui promettait. "Les attentes étaient élevées et il n'est pas toujours facile de confirmer ces attentes, affirmait-il à Cycling Weekly à l'orée de la saison suivante. Les gens pensent que chaque année, vous allez mieux, mais ce n'est pas facile. 2014 sera l'année de la confirmation."

Une étape sur le Tour d'Autriche en 2015, deux médailles de bronze au championnat d'Italie et aux Europe du contre-la-montre en 2016, un 2e Trofeo Laigueglia en 2018 et c'est tout. À seulement 28 ans, après un passage chez Astana (2017-2018) et quelques mois à Nippo-Vini Fantini (janvier à mai 2019), Moser arrête sa carrière. "Il y avait beaucoup d'attentes après mes débuts réussis, les gens disaient que j'étais plus fort que Sagan ou meilleur que mon oncle, se lamentait-il dans Tuttobici en novembre 2018 alors qu'il venait de signer à la Nippo-Vini Fantini. Mais le sport n'est pas mathématique. Il y a mille facteurs qui peuvent avoir un impact sur la performance humaine. Je travaille à comprendre là où je me trompe et pourquoi je n'arrête pas de me cogner la tête contre le mur. Les gens disent que c'est ma tête mais ce n'est pas si simple".

Les attentes dues à ses premiers résultats, à sa filiation, à sa rémunération ont fait de lui une cible des critiques, au point de craquer psychologiquement. "J'aime beaucoup m'entraîner et j'accepte les sacrifices que ce métier demande mais après tout le travail acharné, tu n'es pas au niveau que tu espérais, s'aligner sur des courses devient un cauchemar, poursuivait-il dans Tuttobici. Je travaille sur moi-même et j'essaie de bloquer toute influence extérieure. Le monde du cyclisme est limité à bien des égards. Si vous êtes talentueux et que vous ne réussissez pas, cela signifie automatiquement que vous ne vous entraînez pas assez dur ou que vous n'êtes pas assez discipliné. La vérité est que j'ai toujours été très professionnel mais la critique m'a presque convaincu que je faisais quelque chose de mal. Alors que j'étais dans le WorldTour avec un gros contrat, je ne pouvais pas ignorer les opinions des autres. Je veux essayer d'être heureux de ce que je fais, sans penser à autre chose". Depuis qu'il a mis le vélo au clou, Moreno Moser travaille notamment comme créateur de contenus dans la photo et la vidéo. À en croire ses posts sur Instagram, on dirait bien qu'il est heureux. 

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