Il fallait tout de même oser. Tout double vainqueur de la Grande Boucle qu'il est, mettre un râteau à son équipe UAE et renoncer à disputer le Tour des Émirats Arabes Unis (20 au 26 février) pour débuter sa saison une semaine plus tôt, constituait un risque pour Tadej Pogacar, ralenti quelques jours en janvier par une gastro-entérite.
Alors que son escorte rapprochée s'est renforcée cet hiver pour qu'il soit épaulé en nombre sur les pentes du Tour de France, le Slovène n'a pas voulu faire dans le sentimentalisme. Il a donc renoncé au soleil du golfe pour le soleil andalou afin d'effectuer sa rentrée. Après deux jours de course, le bilan est déjà évocateur avec deux victoires.
Lundi, sur la Clásica Jaén Paraíso Interior, sorte de mini Strade Bianche avec 55 bornes de terre au cœur des oliveraies accompagnées de 8 ascensions et un dénivelé de 2300 m, Pogacar a démontré à ceux qui doutaient qu'il arrivait affûté. À 42 km de la ligne, il a surgi du peloton pour rejoindre Sergio Samitier et le déposer pour s'envoler en solitaire avec 49 secondes d'avance sur le duo Ben Turner (INEOS Grenadiers) et Tim Wellens, son nouveau coéquipier.
Arrivé à l'intersaison en provenance de la Lotto-Soudal (devenue Lotto-Dstny après la descente en Pro Tour), Wellens a accompagné son nouveau leader lors de la 1re étape du Tour d'Andalousie, mercredi. Avec trois ascensions et 4000 m de dénivelé, Pogacar a attaqué tôt, à 12 km de l'arrivée pour aplatir la concurrence. Seul Santiago Buitrago (Bahrain Victorious) a tenu, quelques instants, avant de céder. Avec 38 secondes d'avance sur Mikel Landa (Bahrain Victorious) et Carlos Rodríguez (INEOS Grenadiers) et 1'38 sur Tao Geoghegan Hart, le Français Pavel Sivakov (INEOS Grenadiers) et Enric Mas (Movistar), le coureur de 24 ans n'a laissé que des miettes.
"Aujourd’hui, une fois de plus, le travail d’équipe a été super, nous avons fait du bon travail et mes coéquipiers m’ont conduit à la dernière montée à un rythme très très élevé, ce que j’ai vraiment aimé, s'est-il exclamé après la course. La montée était raide, j’ai vu le moment idéal pour attaquer et j'ai filé jusqu'à la victoire. Je suis un peu surpris par ma forme, je savais que j’étais en bonne condition, mais je ne pouvais pas m’attendre à avoir déjà gagné deux courses."
Course au soleil et classiques au programme
"Pogi" veut regagner le Tour après avoir laissé sa couronne à Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma). Outre les renforts dont il avait besoin (outre Welles, Adam Yates est arrivé), le Slovène a voulu entrer immédiatement dans le vif du sujet, avec de la difficulté et de la concurrence.
Tenant du titre sur les Strade Bianche, il sera le grandissime favori de l'épreuve. Le lendemain, il devrait être au départ de Paris-Nice (du 5 au 12 février), une grande première pour lui. Il pourra s'étrenner en 2023 sur le contre-la-montre autour de Dampierre-en-Burly (32,2 km), deux arrivées au sommet d'un 1re catégorie aux caractéristiques différentes (La Loge des Gardes : 6,7 km à 7,1 % de moyenne ; le Col de la Couillole : 15,7 % à 7,1% de moyenne) et l'enchaînement Côte de Peille (6,6 km à 6,8 % de moyenne) - Col d'Èze (6 km à 7,6 %) avant de basculer sur la promenade des Anglais lors de la dernière étape.
Ensuite, il se mesurera au gratin des classiques, d'abord sur Milan-San Remo où il tentera de succéder à son compatriote Matej Mohoric (18 mars), ensuite sur les routes belges. À ce titre, il sera présent sur deux Flandriennes (À Travers La Flandre puis le Ronde) avant de revenir sur un terrain qu'il connaît mieux sur les Ardennaises (Flèche wallonne et Liège-Bastogne-Liège). Son duel sur la Doyenne avec Remco Evenepoel pourrait être un grand moment de la saison entre les deux derniers vainqueurs de l'épreuve.
Ambitieux à chaque épreuve qu'il aborde, Pogacar a conscience que le niveau est formidablement élevé et que cet état d'esprit conquérant est le seul moyen d'exister, même si cette stratégie est forcément coûteuse en énergie. Après le festival de Mathieu van der Poel et Wout van Aert lors de la saison de cyclo-cross, 2023 commence sur les chapeaux de roue pour les grands du peloton. La suite promet énormément.