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Tony Yoka, un combat à quitte ou double

Tony Yoka
Tony YokaFRANCK FIFE / AFP

Après une série de trois défaites consécutives, Tony Yoka s'est refait une santé et a signé deux KO à Londres en 2024 pour retrouver le goût de la victoire. Ce samedi soir, "L'Artiste" joue peut-être sa dernière carte contre le Russe Arslan Yallyev dans un combat qui s'annonce déterminant dans la carrière des deux boxeurs.

On avait laissé Tony Yoka au beau milieu de Roland-Garros, hagard après sa défaite par décision partagée contre Ryad Mehry, monté chez les lourds pour l'occasion. Contre le Belge, L'Artiste n'avait pas assez donné, n'en avait pas assez fait, au point que, même à domicile, il n'avait pu emporter les faveurs de deux juges sur trois. Ce revers, le troisième consécutive après avoir été battu par Martin Bakolé et Carlos Takam, était celui de trop pour le champion olympique de Rio. 

La grandiloquence de la campagne médiatique de Canal+, cette fameuse "Conquête", avait fini de plomber la carrière de l'aîné de la fratrie Yoka. Désormais, le grand public qui s'était pris de passion et d'affection pour la "Team Solide" voulait le voir perdre. Certes, il avait commis des erreurs, dans le ring, notamment ses trois no-show qui lui ont coûté un an de carrière, comme en dehors.

À y regarder de plus près, les choix d'adversaires ont été bons, du moins jusqu'en 2022. Si le choc contre Johann Duhaupas s'est disputé dans des conditions personnelles très difficiles pour le "Reptile", les combats contre Christian HammerJoel Tambwe Djeko pour la ceinture Union Européenne et Petar Milas, invaincu en 15 sorties, suivaient une certaine linéarité. 

"Le grand public n'est pas vraiment éduqué aux rouages, on ne peut pas lui en vouloir, plaidait son frère Axel dans les colonnes de Flashscore la semaine dernière. Mais quand on regarde ce qu'a fait David Allen après avoir affronté Tony... maintenant, il boxe à Riyad (défaite par décision partagée en décembre dernier, sur la carte d'Usyk-Fury 2, ndlr). C'était un bon morceau et Tony était critiqué. C'est un peu incompréhensible mais que peut-on y faire ?". 

Retrouver le fil avec une victoire marquante

C'est la suite qui a tout fait dérailler. C'est bien connu : personne ne veut affronter Bakolé mais Yoka l'a pris dès son 12e combat professionnel. Une prise de risque énorme, probablement pour faire taire ceux qui affirmaient qu'il n'affrontait que des videurs de boîte de nuit. Le Congolais l'a surclassé et avoir obtenu une carte de 94-94 pour aboutir à une défaite par décision majoritaire relevait de l'incongruité, même si plus d'un boxeur avec le nez en miettes n'aurait pas tenu jusqu'au bout des 10 reprises. Le choix de Takam pour se relancer n'avait guère plus de sens, lui qui a affronté tout ce qui se fait de meilleur aux cours des 15 dernières années. Ces deux défaites ont atteint Yoka, qui a payé la note une nouvelle fois contre Mehry. 

Quasiment deux ans ont passé. L'Artiste a tourné à Las Vegas et à Londres, notamment accompagné de ses frères Victor et Axel. En juillet puis en septembre, il a boxé deux fois dans d'obscurs gymnases cockney et regagné par KO. Certes, il s'agissait d'adversaires bien loin de son niveau mais il y avait aussi une vertu thérapeutique dans ces 6 rounds. 

Car ce samedi, Yoka disputera son dernier combat avec Canal+. Et pour refermer ce chapitre, il met sa carrière en jeu. Arslan Yallyev n'est pas un quidam. Champion de Russie des lourds en 2023, il est invaincu en 16 combats (16-0-0) et a infligé 10 KO. Si c'est la première fois qu'il boxera à l'étranger, il est classé 38e mondial par Boxrec, 17 rangs de mieux que le Français. À 28 ans, il a l'occasion de progresser dans les classements, sachant que la catégorie des lourds est particulièrement relevée. 

Les vidéos aperçues sur les réseaux sociaux témoignent du sérieux de la préparation d'Yoka qui n'a plus d'autres choix que de s'imposer, si possible avec la manière, pour retrouver de la visibilité et de la crédibilité : "il a pris une bonne année pour se remettre dedans, pour faire abstraction de tout ce qui avait pu se passer, des critiques, a souligné Axel. Je le sens vraiment bien mentalement et physiquement. Il a cette envie de travailler, de gagner, celle qui pousse un boxeur". 

Ce samedi soir à l'Adidas Arena, cette volonté devra être perceptible car sinon, la carrière de L'Artiste pourrait se conjuguer au passé, alors qu'il avait tout pour faire partie des meilleurs poids lourds de sa génération. Il est l'heure pour lui de marquer les esprits et de montrer l'étendue de son talent.