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Tony Parker annonce sa volonté de devenir coach, avec la NBA en ligne de mire

Tony Parker une ambition réaliste ?
Tony Parker une ambition réaliste ?Matthieu Mirville Matthieu Mirville DPPI via AFP
Dans un entretien à L'Équipe, Tony Parker annonce sa volonté de lancer une carrière d'entraîneur, et si possible en NBA. Une volonté réaliste ? Ou un énième effet de manche ?

Forcément, quand on a été coaché par l'un des plus grands entraîneurs de l'histoire, en la personne de Gregg Popovich, cela peut vous rejaillir dessus. C'est visiblement ce qui est arrivé à l'un de ses plus illustres disciples, Tony Parker

Le meilleur basketteur français de l'histoire a livré, dans un entretien au journal L'Équipe, sa volonté de devenir entraîneur, et ce dès que possible. On comprend parfaitement la volonté de se rapprocher du terrain, ce qui n'est pas réellement possible en tant que président de l'ASVEL, son rôle actuel. 

Dès la semaine prochaine, il entrera en formation pour tenter d'acquérir le Diplôme d'État Supérieur de l'Éducation Populaire et du Sport. Un diplôme qui, comme il l'indique lui-même, n'est pas nécessaire pour coacher en NBA, ce qu'il décrit comme son but ultime. Une ambition démesurée, à son image. Mais réaliste ? 

Un nom ne suffit pas

Être coach en NBA, cela ne s'improvise pas. Pour reprendre l'exemple de Gregg Popovich, ce dernier, pendant 20 ans, a été entraîneur en université puis adjoint en NBA, avant de s'installer comme entraîneur des San Antonio Spurs, un poste qu'il a occupé pendant 29 ans. Comment ? Il avait été nommé general manager, a renvoyé le coach en place et a pris sa place, tout simplement. Une autre époque. 

Aujourd'hui, le choix d'un coach en NBA est une tout autre histoire. Il s'agit d'un processus long et fastidieux, qui implique une vision à long terme, la faculté de développer des jeunes joueurs issus de la draft, la capacité de construire un effectif complémentaire, en plus de posséder un playbook épais pour parer à toute éventualité sur le terrain. Le tout avec la pression inhérente au fait d'avoir le poste le plus exposé dans le plus grand championnat de basket au monde.

Bien évidemment, à l'instant T, Tony Parker ne possède pas ces pré-requis. Pourtant, il a coaché les U15 de sa fameuse "Tony Parker Académie", et pour lui, c'est une évidence. "Ça confirme ce que je ressens depuis l'année dernière : le terrain m'a manqué. L'adrénaline, le quotidien, tout cela m'a manqué". Comment néanmoins s'imaginer déjà head coach NBA ? "J'ai toujours rêvé en grand" est la seule réponse. 

Il faudra bien ça. Car quand on regarde le profil des coachs référence en NBA... Le profil classique, c'est entraîneur ou adjoint en université, puis assistant pendant plusieurs années en NBA. Les joueurs NBA ont envahi la ligue et la dominent. Mais les entraîneurs ? On repense à David Blatt, champion d'Europe sur le banc de l'Espagne, vainqueur de l'Euroleague, qui a débarqué aux Cavaliers pour se voir mis dehors après 18 mois et une finale NBA. 

Un rêve, pas de réalisme

Mais ce n'est pas grave pour TP, puisqu'il a des mentors. Vincent Collet d'abord, le sélectionneur de l'équipe de France pendant 15 ans, sous lequel son meneur a ramené le titre européen, mais qui, au final, compte plus de déceptions que de satisfactions sur son parcours en sélection. Un avis discutable, on en convient, mais conforté par la finale olympique atteinte l'été dernier après que les joueurs aient pris le pouvoir durant une compétition qui commençait à partir de travers.

Ensuite ? "J'ai discuté longuement avec Zizou (Zinédine Zidane) et Titi (Thierry Henry), qui m'ont convaincu de faire le DES". Sont-ce là les meilleurs mentors ? Le premier a commencé sa carrière de coach professionnel au sein d'une équipe de cadors, porté par un des meilleurs joueurs de l'histoire, et n'a eu qu'à cueillir les fruits du travail de ses prédécesseurs. Depuis ? Plus rien. Le deuxième a entamé sa carrière à Monaco, et au bout de trois mois, son club a préféré le renvoyer et rappeler celui qu'il avait remplacé ! Alors oui, il y a une médaille olympique qui sauve le bilan, mais tout de même...

Bien sûr, on grossit un peu le trait, mais tous les bons joueurs ne font pas de bons entraîneurs. D'ailleurs, en NBA actuellement, on ne compte que très peu de joueurs qui ont performé à un haut niveau. Doc Rivers, J.J Redick, Chauncey Billups, Jason Kidd et bien évidemment Steve Kerr. Seuls le premier et le dernier ont un réel palmarès. Un "nom", ça ne suffit plus de nos jours. Mais avant de penser NBA, une question reste brûlante : pourquoi maintenant ?

Et l'ASVEL dans tout ça ?

Président de l'ASVEL (et de la section féminine), Tony Parker a longtemps bénéficié d'une certaine aura au vu de sa carrière. Mais voilà, au même titre que tous les grands joueurs ne font pas de grands entraîneurs, tous les grands joueurs ne font pas de grands dirigeants. Il est empêtré dans les problèmes financiers. Selon la Cour des Comptes, le modèle économique de l'ASVEL, "structurellement déficitaire", "apparaît dès lors non viable dans la durée". Et ces problèmes financiers, il les a temporairement résolus. Comment ? "C’est moi qui ai remis au pot" confiait-il au Progrès

Et l'ASVEL féminin ? Rétrogradé en division inférieure en juin, le club a dû renoncer à son engagement en Eurocup pour la saison afin d'assurer son futur en première division française. Bref, les deux clubs dont il est président sont dans un état fragile, mais comme il le dit : "C'est possible que ce soit ma dernière année en tant que président de l'ASVEL et de l'ASVEL Féminin. C'est une grosse décision. C'est un vrai choix de vie. Ça fait un an que je réfléchis et je suis sûr de vouloir faire ça. Je suis excité."

Tony Parker risque donc de quitter ses fonctions de président en laissant le club dans un plus mauvais état que quand il l'a repris. Tout ça pour peut-être, un jour, coacher en NBA. Le tout avec le concours de la Fédération, bien évidemment, qui ne laisserait jamais passer une occasion de se mettre en avant, au lieu de s'occuper de la faillite des équipes de jeunes qui sont passées à côté de leur été, des difficultés financières des championnats nationaux, et va investir sur un millionnaire de l'argent qui aurait toute sa place n'importe ou ailleurs.

"J'ai toujours rêvé en grand" revient en boucle, mais pour la réalité, on repassera. Il y a les histoires qu'on raconte et il y a les faits : Tony Parker était un très grand joueur et est un piètre dirigeant. Quelle version en tant qu'entraîneur ? Il y a de quoi être pessimiste... En attendant, on y verra un effet de manche pour détourner l'attention sur sa "performance" en tant que président. Mais après tout, s'il lâche la direction pour quelqu'un de plus compétent, il pourrait au moins y avoir un gagnant dans l'histoire.