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L'Argentine est un pays qui a produit de grands champions de tennis, des vainqueurs de Grand Chelem, des légendes, aucun doute. Mais à Wimbledon, c'est une autre histoire : dans l'Ère Open, on ne dénombre que deux finales : Gabriela Sabatini en 1991 (battue 8-6 au troisième par Steffi Graf) et David Nalbandian en 2002 (dominé par Lleyton Hewitt).
En effet, sans surprise, c'est théoriquement sur terre battue que les Argentins s'épanouissent. Logique, avec notamment un tournoi ATP au programme à Buenos Aires, et le souvenir de la victoire de Gastón Gaudio à Roland-Garros en 2004. Néanmoins, chez les femmes, depuis la retraite de Sabatini, c'est plus compliqué en simple, même si Paola Suárez est une multiple lauréate de Grand Chelem en double.
Pour preuve : avant de débuter Wimbledon, il n'y avait aucune Argentine dans le Top 100. C'est là que va intervenir Solana Sierra. Et ce alors que personne ne s'y attendait. Car non seulement elle est jeune (21 ans), mais en plus, son principal fait d'armes avant ce tournoi était d'avoir atteint... la finale de Roland-Garros juniors !

Pendant que sa tombeuse en finale, Lucie Havlíčková, n'a pour l'instant pas réussi à lancer sa carrière, Solana Sierra, elle, est rapidement devenue une terreur sur le circuit ITF. À ce jour, les chiffres sont éloquents : 18 finales, 14 victoires, dont les dix dernières en date ! Un ratio incroyable, et une construction de carrière impeccable : elle est passée par tous les stades de tournois graduellement (de W15 à W75), pour monter lentement au classement.
Elle a tout de même placé un sacré coup d'accélérateur en début de saison, en gagnant ses deux premiers titres en W75 en janvier, puis en avril. 150 points dans la musette qui l'ont propulsé aux portes du Top 100, mais l'ont surtout incité à tenter sa chance sur le circuit WTA. Cela n'a été qu'un succès, alors qu'elle a démarré sur la terre battue.
Car bien évidemment, Sierra est une joueuse de terre. Outre cette finale parisienne, elle y a raflé 16 de ses 18 titres sur le circuit ITF. Mais si elle est sortie aisément des qualifications de Roland-Garros, c'était pour mieux se prendre les pieds dans le tapis au premier tour, face à Yulia Putintseva. Une défaite honorable, certes, mais surtout, un aperçu du chemin qu'il restait à parcourir.

Néanmoins, cette première entrée en tableau principal de Grand Chelem était un bon signe. On s'attendait à la voir performer sur terre, voire sur dur (demi-finaliste de l'US Open juniors), mais absolument pas sur gazon. En effet, elle n'avait disputé que deux matchs sur la surface : le premier tour de Wimbledon juniors 2021, et le premier tour de qualifications de Wimbledon 2024. Perdu, bien évidemment, dans les deux cas.
Mais elle s'est quand même inscrite sur les qualifications cette année, a décroché ses deux premiers succès sur la surface donc, avant de craquer au bout d'un match rocambolesque contre Talia Gibson, dans lequel elle aura servi pour une place dans le tableau principal, obtenu une balle de match, avant de rendre les armes 7-5 au troisième. Un signe que le gazon n'était pas pour elle ?
Non, le vrai signe, c'est cette entrée de lucky loser, et l'Argentine pourra remercier Greet Minnen. La Belge, blessée au dos, a renoncé et c'est Sierra qui a été repêchée. De quoi obtenir un joli chèque pour sa participation au tableau principal, certes, mais on ne s'attendait pas à la suite.
Car elle n'a pas battu n'importe qui. Elle a commencé en deux sets par Olivia Gadecki, ancienne finaliste en WTA 500, contre qui elle a sauvé huit (!) balles de troisième manche. Puis surtout, elle a terrassé l'idole locale, Katie Boulter, lauréate de deux tournois WTA sur gazon en carrière, et classée dans le Top 50. Forcément, après une telle victoire, Cristina Bucșa ne paraissait pas effrayante, même si elle a encore lâché un set.
C'est bien évidemment son 2e tour contre la Britannique qui a retenu l'attention. Une magnifique partition alors qu'après avoir perdu 9-7 le tiebreak de la première manche, et avec le public contre elle, on aurait pu croire qu'elle allait s'affaisser. Ce fut tout le contraire, puisqu'elle ne lâchera que trois jeux en deux manches, ne commettant quasiment plus de fautes, faisant pleuvoir les retours gagnants avec un aplomb sidérant.
Résultat ? Un morceau d'histoire : elle est devenue la première lucky loser de l'histoire à atteindre les 8èmes de finale à Wimbledon. Tous Grands Chelems confondus, hommes et femmes mélangés, ce n'est que la 14e occurrence dans l'Ère Open. Elle peut donc écrire l'histoire ce dimanche, car les 13 précédents n'ont jamais franchi ce stade.
De plus, son 8ème de finale est largement abordable. Certes, Laura Siegemund vient de réussir un exploit en sortant Madison Keys, et avec la manière. Mais l'Allemande de 37 ans a franchi le stade du troisième tour pour la deuxième fois de sa carrière seulement, et après son incroyable parcours, nul doute que l'Argentine ne se laissera pas impressionner.
D'autant qu'elle a disputé son troisième tour avec une blessure loufoque sur un doigt qui s'est pris dans un cordage. Pas de quoi cependant l'inquiéter, ni cette blessure, ni la suite, comme elle l'a déclaré à ESPN. "Je pense que mon jeu est très bien adapté au gazon. J'ai toujours été agressive, mais je sers aussi très bien. C'est très important sur gazon. Je me sens donc bien." Un discours incroyable de la part d'une joueuse qui n'avait donc remporté aucun match sur gazon avant les qualifications de la semaine dernière.
Quant à sa prochaine adversaire - contre qui elle n'a évidemment jamais joué, elle lui laisse le bénéfice de la pression. "C'est une joueuse très expérimentée dans ce genre de tournoi. Je ne sais pas combien de Wimbledon elle a disputé. Elle est favorite. Je vais essayer de faire de mon mieux, comme je l'ai fait ces derniers matchs, et d'avoir confiance en moi." Après tout, son tournoi est déjà largement réussi, et dans dix jours, elle sera à minima dans le Top 70. Mais à 21 ans, ce n'est sans doute que le début, et quoi qu'il arrive maintenant, on assiste sans doute à l'éclosion d'une nouvelle star...