La planète tennis est friande d'images improbables, et Loïs Boisson en a offert une contre son gré. Lors de son premier tour au WTA 250 de Rouen ce mardi, elle a vu son adversaire Harriet Dart demander à l'arbitre si la Française "pouvait mettre du déodorant". Une scène qui a très vite fait le tour du monde, même si la Britannique s'est excusée rapidement. La Tricolore, elle, a choisi l'humour en sollicitant un partenariat avec une fameuse marque de produits d'hygiène.
Tout cela fait malheureusement passer sous silence le plus important : Lois Boisson, en survolant le match 6-0, 6-3, a remporté en cette occasion son tout premier succès sur le circuit WTA. Une issue heureuse, mais qui était sans doute supposée arriver plus tôt. Car un an en arrière, le nom de la Française était sur toutes les lèvres des aficionados du tennis.
Habituée du circuit ITF, elle avait lancé une homérique série de victoires. 18 au total, ce qui lui a rapporté trois titres, deux W35 et un W75. Mais après la fin de cette série, elle s'est attaqué à de plus grands objectifs : des tournois WTA 125, équivalent des Challengers chez les hommes.
Un coup d'essai qui s'est transformé en coup de maître : à Saint-Malo, elle s'en est allée chercher le titre, après une magnifique semaine, qui l'avait vu vaincre des joueuses confirmées, comme Varvara Gracheva, Alizé Cornet puis Chloé Paquet en finale. Début mai 2024, elle était aux portes du Top 150, en pole position pour recevoir une wildcard pour intégrer le tableau principal à Roland-Garros.
Mais elle a fait le match de trop, au WTA 125 de Paris, endroit idéal pour se préparer. Un premier tour contre Fiona Ferro qui allait prendre une tournure dramatique : blessure, abandon, et la sanction tombait peu après : rupture du ligament croisé antérieur du genou. Saison terminée, illusions envolées. Après avoir remporté 23 matchs sur 24, difficile, même à 21 ans, de se projeter sur la suite.
Et il faut dire qu'on l'avait presque oubliée quand elle a refait surface en février dernier. Mais si les résultats n'ont pas tout de suite été au rendez-vous, l'attitude laissait percevoir une possible renaissance. Une finale en W35, et donc cette invitation décrochée pour Rouen, l'occasion de franchir une étape importante dans la carrière d'une joueuse : une première victoire sur le circuit principal.
Et maintenant ? Un 8ème de finale l'attend contre Moyuke Uchijima, 60ème mondiale. Une joueuse brillante comme elle sur les circuits inférieurs, puisqu'à la même époque que la Française, elle a également sorti une série homérique avec trois titres en W100 et un en W75 ! Mais depuis son arrivée à plein temps sur le circuit, c'est bien plus compliqué, et c'est donc une porte ouverte pour Lois Boisson.

Mais le meilleur pourrait être à venir. L'an dernier, elle était en position idéale pour aller chercher une wildcard pour Roland-Garros, donc, et ainsi faire ses débuts en tableau principal de Grand Chelem. 12 mois plus tard, et avec ce qu'elle a montré, on voit mal comment la Fédération pourrait lui refuser ce privilège. Mais sait-on jamais, puisqu'elle n'est pas un pur produit de la FFT, on se rappelle quelques précédents.
Néanmoins, elle doit de toute façon améliorer son classement, et pourrait donc retourner jouer... les WTA 125 de Saint-Malo puis de Paris. Une façon d'exorciser ses vieux démons ? Son retour dans le Top 300 ne sera qu'une formalité, mais bien évidemment, elle vise plus haut sachant ce qu'elle a montré l'an dernier. Et la terre battue étant sa meilleure surface, Roland-Garros apparait comme une évidence pour la révéler au grand public.
Mais en attendant, sur un tournoi comme Rouen, où le tableau n'est pas des plus impressionnants, la possibilité de la voir exploser est bien réelle. Lois Boisson a un bon service, un grand coup droit, une bonne tenue à l'échange, elle n'a pas peur de jouer en avançant, même sur terre battue, surtout sur terre battue. Un jeu puissant et intéressant dans l'optique d'une progression. Ce match contre la Japonaise est donc sans doute un véritable test pour savoir si les merveilles vues en 2024 peuvent lui ouvrir la porte d'une véritable carrière professionnelle, dans tous les sens du terme. Et le tennis féminin français en a bien besoin...