Après la triste et dramatique fin de Roland Garros, deux options s'offraient à Jannik Sinner. L'une était de continuer à ruminer la défaite et le match pratiquement donné à son adversaire après les balles de match manquées, et donc d'avoir une sorte de complexe envers Carlos Alcaraz, qui en était à sa cinquième victoire consécutive dans les confrontations directes.
L'autre était de voir le verre à moitié plein, malgré tout, et de prendre ce qu'il y avait de bien dans ce match sur le sol français, à savoir que l'écart avec l'Espagnol sur terre battue avait été comblé, et ainsi lui donner la certitude qu'il pouvait le battre dans une finale de Grand Chelem (et triompher sur d'autres surfaces que le ciment).
Compte tenu de la force mentale de l'Italien, du fait qu'il est un "gagnant", je n'avais personnellement aucun doute sur le fait que son cerveau avait déjà emprunté la deuxième voie, métabolisant dans les jours qui ont suivi cette douloureuse défaite à Roland-Garros, et n'en retirant que le côté positif. L'entraîneur Darren Cahill, qui s'occupe plus du côté psychologique du champion que du côté plus technique confié à Simone Vagnozzi, et qui a formé sa mentalité en lui donnant une nouvelle dimension, une dimension "Djokovic", une dimension "numéro un", l'a peut-être aussi aidé en cela.
On peut donc dire que cette défaite à Paris a été salutaire pour donner à Sinner une vitesse supplémentaire et en même temps lui fournir la colère agonistique nécessaire à la "revanche" à Wimbledon. Et quelle revanche, sur le terrain le plus prestigieux du cirque, où aucun Italien n'avait jamais gagné. Une victoire qui l'a notamment fait devenir membre honoraire avec un pin's du All England Club, qui compte 500 à 600 membres en tout, un privilège qui durera toute une vie.
Numéro 1
Confirmant le caractère "sain" de cette défaite, le champion a déclaré après le match : "Il n'a pas été facile d'accepter ce match. J'essaie toujours d'être honnête avec moi-même et j'ai fini par me dire qu'il valait mieux perdre comme ça que de ne gagner que deux jeux. Surtout dans les grands tournois, il faut comprendre ce qui n'a pas fonctionné et travailler dessus : utiliser la défaite et continuer à travailler. Et c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis ici avec ce trophée".
C'est pourquoi cette victoire à Wimbledon contre Alcaraz, au-delà de son énorme prestige, a une valeur encore plus profonde : elle consolide sa notoriété et certifie encore plus le statut de numéro 1 de l'Italien. Non seulement au classement, mais aussi aux yeux du public, de ceux qui avaient encore des doutes après les cinq victoires consécutives de l'Espagnol depuis la demi-finale d'Indian Wells en 2024 et en vertu des victoires dans les face-à-face (8-5 maintenant), bien que Sinner l'ait déjà battu au quatrième tour à Wimbledon en 2022. Mais ce n'est pas la même époque.
Toujours considéré comme "plus doué techniquement", le joueur de tennis murcien est aujourd'hui à juste titre le numéro 2, même si la lutte entre ces deux champions continuera d'être une lutte d'amélioration continue de part et d'autre dans un défi qui a déjà marqué et marquera encore le tennis d'aujourd'hui et son histoire à l'avenir. Ce qui est certain, c'est que Sinner sait désormais qu'il peut le battre non seulement sur le ciment, son jardin, mais aussi sur d'autres surfaces. Il lui manque encore le sceau de la terre battue de Roland Garros, mais il en est proche.... Comme il le dit lui-même : "La rivalité avec Carlos ? C'est un stimulant supplémentaire, mais je ne pense pas que je sois encore à mon meilleur niveau : j'ai 23 ans, j'espère que je vais continuer à m'améliorer".
