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Exclu' Flashscore - Esteban Dorr : "Montpellier et les frères Lebrun, c'est comme une famille"

Esteban Dorr en double mixte avec Audrey Zarif à la Coupe du monde.
Esteban Dorr en double mixte avec Audrey Zarif à la Coupe du monde.ČTK/IMAGO

Membre de l'équipe de France de tennis de table, Esteban Dorr fait partie de ces pongistes qui ont beaucoup progressé ces dernières années et qui vivent pleinement l'explosion du "ping" dans l'hexagone. Pour Flashscore France, il a accepté de revenir sur son parcours, sa saison avec Montpellier et la suite de sa carrière, liée de près ou de loin aux frères Lebrun.

À 24 ans, il vient de disputer la Coupe du monde par équipes mixtes avec les Bleus, Esteban Dorr est un visage bien connu désormais des fans de tennis de table. C'est l'occasion d'évoquer la carrière d'un joueur qui mérite également de prendre la lumière, lui qui est dans le sillage des frères Lebrun à Montpellier

Sur le circuit international (WTT), il s'est distingué par ses accomplissements en double avec son coéquipier et ami Florian Bourrassaud – les deux pointent à la 10ᵉ place mondiale. Le mois dernier, ils ont d'ailleurs participé aux Finals de Fukuoka au Japon et on atteint les demi-finales. 

Question : À quel âge avez-vous commencé le tennis de table ?

Réponse : J'ai commencé le ping à 7 ans sur un cycle tennis de table, à l'école primaire et tout. Et j'aimais bien. J'étais un petit peu dans le flou sportivement. C'est-à-dire que j'avais essayé le tennis, mais j'étais bon qu'à ramasser les balles (rires). Le foot, j'ai essayé, j'étais gardien de but, mais ça n'allait pas. Après, j'aimais bien la gym. Je voulais essayer d'avoir une deuxième activité. Et le ping, franchement, ça m'avait fait grave kiffer. Et à la fin du cycle, c'est mon futur coach, qui s'occupait du cycle, qui nous a tous offert des séances d'essais. Dans le club, c'était le mercredi. Et t'avais le droit à 10 séances d'essais. Je me suis dit, pourquoi pas. Mes parents étaient chauds. Je me suis dit, vas-y, on va essayer. Et j'ai fait une séance, deux séances. Dès que la séance était finie, je me disais, c'est quand la prochaine ? Au bout d'un moment, je me suis dit, pourquoi pas continuer. Donc j'ai continué le ping, j'ai pris ma licence. Tout se passait super bien. Au bout d'un moment, je progressais bien en gym et progressais bien aussi au ping. Et d'un côté comme de l'autre, ils m'ont dit, si tu veux progresser en gym, il faut que tu fasses moins de ping. Si tu veux progresser en ping, il faut que tu fasses moins de gym. Et j'avais plus de potes au ping. Et j'ai dit, vas-y, je veux faire du ping. Donc j'étais au ping à Spicheren en club. Je m'y suis entraîné jusqu'à mes 11 ans. Après la 6ᵉ, je suis parti au pôle espoir à Metz. Mais j'étais licencié pour le club jusqu'à mes 15 ans. Et je suis resté au pôle jusqu'à mes 21 ans à Metz. 

Q : Ça ne doit pas être facile de partir aussi tôt en pôle…

R : Ce n'était pas facile au début. Personnellement, mes parents venaient de divorcer aussi. Mais comme j'étais à l'internat et à Metz, j'étais un peu loin de tout ça. J'étais à chaque fois content de revoir soit mon père, soit ma mère. Des fois, j'arrivais à voir les deux. En plus de ça, j'avais mes journées de championnat qui étaient rythmées le week-end. Donc je n'ai pas trop mal vécu le divorce et l'adaptation à l'internat.

Q : Et en club, en parallèle, vous êtes montés jusqu'à quelle division ? 

R : En club, par équipe, j'ai un parcours super atypique. C'est-à-dire qu'à 15 ans, je jouais en Elite Régionale alors que tous mes potes jouaient soit en Pro B, soit en N1, soit en N2. Je parlais avec eux et je me disais "Ouais, tu as joué quoi ce week-end ?" Je dis "J'ai joué 18, 19, 20. Et toi ?". Le fait d'avoir signé à Metz à mes 15 ans, ça m'a propulsé. J'ai fait ma première phase en N2. Je suis passé de 700 à 300 Français en l'espace de 4 mois. Durant cette saison-là, j'ai remplacé une fois en N1, j'ai fait trois victoires et après, j'ai fini la phase en N1. Ça s'est bien passé et j'ai directement explosé grâce au fait d'avoir affronté des joueurs plus forts et qui s'entraînaient moins, qui avaient moins de volume d'entraînement que moi. L'arrivée de Nat' (Nathanaël Molin, ndlr) à Metz a un peu accéléré le processus, dans le sens où on a beaucoup discuté et on a trouvé un sens à mon jeu. Avant, j'étais un joueur un peu plus freestyle. C'est-à-dire que j'adorais jouer. J'adore le ping. Je jouais et je faisais des enchaînements de coups. Je n'avais pas trop de tactique. J'étais là, je lançais la balle, je servais. Après, je voyais ce que ça faisait. Il y avait des moments où je jouais en défense. Après, j'arrivais, je rejouais en attaque, en contre.

Q : À Metz, l'adaptation a dû être plus simple que prévu ?

R : Oui, ça suivait un peu le processus. Je n'ai jamais ressenti le besoin jusqu'à mes 15 ans de partir de mon club. Mon club faisait tout pour que je reste. Je me sentais vraiment super bien. Ça avait du lien dans le sens où je pouvais rentrer à la maison, voir mes parents, jouer le match. Je rentrais directement chez moi après le match. C'était vraiment cool. C'est à mes 15 ans où je ne me sentais plus à ma place. Le club s'en est bien rendu compte. Ils ne voulaient pas me garder. Ils ont dit "On sent que là, tu as besoin de quelque chose d'autre pour exploser". Ils étaient contents, malgré la larme à l'œil. Ils étaient contents que je parte pour de nouvelles aventures. À Metz, ça suivait son cours. J'étais à l'internat encore. Je rentrais en seconde. J'étais à Metz. J'étais avec tous mes potes. Ça s'est fait naturellement. C'était vraiment cool. L'ambiance au club était vraiment sympa.

Q : Vous pensiez aller jusqu'en équipe de France à ce moment-là ?

R : En fait, je n'ai pas énormément connu le circuit international chez les jeunes. Je n'ai fait que quelques apparitions à l'Open de France, l'Open de Belgique. Je suis quasiment toujours reparti avec au moins une médaille, que ce soit en double ou en par équipe. Juste en simple, c'était un peu dur, car je jouais quasiment que des Asiatiques. C'était un peu plus dur. Ils avaient déjà un peu plus de bouteille. Mine de rien, j'avais un peu la pression. Je me situais avec les autres gars de ma génération. Jules (Rolland), Irvine (Bertrand), Léo (De Nodrest), Bastien (Rembert). J'étais à la même hauteur qu'eux, sauf qu'ils étaient en Pôle France, à l'INSEP. Chaque joueur a sa progression. Si ce n'est pas en junior, ce sera en senior. Avec Nat', l'objectif, c'était de devenir un bon joueur senior. Nous, on avait une optique un peu plus ouverte, un peu plus grande. C'est ce qu'Adrien Mattenet m'avait dit en 2017 : "Surtout, joue ton jeu. Fais ce que tu as envie. N'essaie pas d'être dicté par quelqu'un. Pense plus large, pense plus loin. Pense à ta carrière". Ce sont des mots qui ont résonné en moi. Jusqu'à maintenant, j'ai une vision un peu plus large et j'ai été bien entouré pour m'aider.

Q : À l'image d'un Simon Gauzy, vous êtes un joueur créatif, capable de faire des choses que d'autres ne savent pas forcément faire. En êtes-vous fier ?

R : En termes de créativité, je mettrais Simon encore un peu plus loin devant moi. J'ai quand même un jeu qui est différent. Simon a un jeu créatif où il va pouvoir jouer avec de la puissance. Je vais avoir un jeu beaucoup plus agressif. En plus de ma créativité, je vais devoir prendre un peu plus de risques. Je suis super content d'avoir pu créer mon propre moule. Tandis qu'il y a d'autres joueurs qui sont rentrés dans un moule sans forcément être à l'aise là-dessus. Comme j'ai dit, c'est aussi grâce aux personnes avec qui j'ai créé un cercle. Il y a toujours de la place pour de l'évolution. Peut-être que dans 3 ans, je vais jouer tout en coup droit, en porte-plume (rires).

Q : On parle souvent de Nathanaël Molin quand on évoque Félix et Alexis Lebrun, mais il a fait progresser d'autres joueurs. Vous l'avez connu à Metz et au fil des années, vous avez tissé une belle relation. Fait-il partie des entraîneurs qui vous ont fait le plus progressé ?

R : Oui, complètement. Il y a David Bello qui était mon premier entraîneur à Spicheren, qui lui m'a fait découvrir l'amour du ping et qui s'est vraiment investi à fond avec moi. On était partis plusieurs fois en stages nationaux à Lyon. On était partis dans des compétitions un peu partout en France. Il faisait ça sur son temps libre. Il n'était pas du tout payé pour ça. Je le remercie encore aujourd'hui. C'était vraiment top. Nat' est arrivé au bon moment à Metz aussi, car quand on a 14-15 ans, on commence à découvrir d'autres choses. C'est la fin du collège et le début du lycée et on a davantage de liberté. Je faisais du ping, mais je n'avais pas trop d'identité. Je ne savais pas trop comment jouer. Il y a une anecdote qui me fera toujours rire. On est à un entraînement et je joue, je fais mon exo'. Nat vient me voir à la table et me dit "Esté, j'ai une question". Il me dit "C'est quoi ton point fort selon toi ?" Je le regarde et je dis "Mon démarrage coup droit, franchement, il n'est pas mal". Il me regarde, il rigole et il fait "Non, non, tu te trompes là, chef. Ça va être ta contre-initiative revers. C'est ton côté revers. Tu es très fort en revers". Je dis "Mais Nat, je suis nul en revers. Je ne mets pas une balle en revers". Il me dit "Si, si. T'inquiète pas. On va regarder des vidéos. On va sculpter un truc autour de ça". Et trois mois après, je suis là à servir long, mettre que des claquettes en revers et c'est ce qui m'a fait progresser. C'est l'identité de jeu maintenant que j'ai. Tout le monde sait maintenant que j'ai un jeu très agressif et ils ont un peu peur de moi. Les adversaires savent que je peux mettre une grosse pression d'entrée, que je ne les lâcherai pas.

Q : Après Metz, vous partez découvrir la Pro A...

R : J'étais à Metz jusqu'à mes 21 ans au club et au centre d'entraînement. Puis j'ai signé à Cergy-Pontoise en Pro A, mais je venais de déménager à Montpellier. J'étais à Montpellier pour m'entraîner et de mes 22 à 23 ans, j'ai joué pour Pontoise. C'était une expérience de fou. C'était ma première année en Pro A. J'ai joué avec Emmanuel Lebesson, Marcos Freitas. C'était un truc de fou. Je les remercie encore énormément. Au couple Adam qui m'a laissé ma chance et aussi au coach Benjamin Brochard et Lucian Fillimon qui m'ont donné ma chance, qui m'ont fait jouer. Parce qu'à la base, je devais être numéro 4... et avec Marcos, on est deux des joueurs qui ont le plus joué sur cette saison donc c'était vraiment super cool. Le fait de jouer avec un mec comme Marcos Freitas c'est d'être au quotidien avec lui. Parce qu'il était étranger, on était tout le temps à l'hôtel, on allait manger ensemble. J'ai pu apprendre énormément de choses. Je suis allé en stage au Portugal. C'est lui qui m'a accompagné là-dedans. C'est un top joueur et humainement, c'est un super mec.

Q : Comment avez-vous vécu alors le moment difficile au WTT de Montpellier face à Alexis ?

R : Ce n'était pas dingue dingue pour lui. Ce n'était pas facile. Je n'ai pas abordé le sujet avec lui, mais avant la compétition, il était super content de jouer en France. Il a remarqué l'ambiance exceptionnelle, que c'était fou. Il adore la France. Ça fait 10 ans presque qu'il joue à Pontoise. Il parle un peu français, il comprend bien le français. Il est vraiment top. Non bien sûr, il y a des querelles en match comme ça, mais ça ne changera pas l'humain. On sait qu'Alexis joue très vite, on sait que Marcos aime prendre son temps. Si on veut respecter le jeu, Marcos était un peu en tort, mais Alexis a aussi joué de sa vitesse pour faire craquer Marcos. Pour moi, c'est juste une petite querelle de match, mais comme on en parlait encore hier, Alexis m'a dit qu'on n'avait pas de soucis entre Marcos et moi. On va se dire bonjour. On peut même s'entraîner ensemble.

Q : Ovtcharov est également un peu particulier…

R : On sait que c'est un ouf derrière la table, mais humainement, c'est un bon gars. Il est super sympa et tout. Mais par contre, c'est un détraqué niveau ping, je n'ai jamais vu un mec pareil. Dans une salle d'échauffement, il prend de la place. Aux Championnats d'Europe. On s'échauffait avec Alexis et Félix et là, il arrive, il sort cinq raquettes. Il prend la balle et il tape dans le filet. Ça fait un bruit énorme. Du coup, tout le monde le regarde. Il regarde tout le monde et il est content, et il continue (rires). Il sait qu'il prend de la place. C'est un peu son "mental game". C'est un peu à l'instar de Kobe Bryant en NBA. Tu savais que le mec, il n'allait pas te lâcher. Il en faut des mecs comme ça.

Q : Dans votre registre, avec Florian Bourrassaud, c'était réfléchi de "faire le show" ?

R : Non, de base, on est comme ça. On aime bien la NBA. Lui, il est fan de Lebron James, moi, je suis fan de Stephen Curry (rires). Et ça a commencé à Varazdin (en Croatie), quand on gagne notre demi. En fait, on avait entendu que dans les règles, lorsque tu es en finale d'un (WTT) Feeder, et comme il y avait deux Feeders qui se chevauchaient, on était automatiquement dans le tableau principal du Feeder d'après. Donc, on a cette célébration en mode saute-mouton, en mode, on saute les qualifs. Donc à la fin du match, les arbitres sont morts de rire, les joueurs aussi, le peu de public qu'il y avait en Feeder, également. Le juge-arbitre nous dit finalement que ça ne vaut pas pour les doubles. On se dit qu'on va devoir faire forfait pour pouvoir jouer la compétition suivante dès le lendemain. Mais il fallait payer l'amende. C'était 500 ou 750 € je crois. Et, déjà qu'on gagne même pas ça en "prize money", comment tu veux que nous, on paye ça ? Finalement, on a réussi à trouver un avion le lundi matin à 6h du mat' pour arriver à Düsseldorf. Donc, on est resté, on a pris le trophée, on n'a pas payé l'amende, on a pris les points. Et c'était marrant parce qu'on a fait une vidéo avec Flo' qui faisait des pas chassés dans les couloirs de l'avion en mode match à midi, arrivé à 8h à Düsseldorf, on est prêt, quoi. Ça a commencé là, les célébrations, on a fait une célébration au Pérou, qui était sympa, celle du Turc, là, en mode pistolet. Ça avait beaucoup fait parler, j'ai eu plein de messages. Je pense aussi que c'est super important, en fait, d'avoir cette casquette-là parce que la monotonie asiatique, et je ne dis pas ça péjorativement, eux, ils sont très carrés, il ne faut pas trop déborder. Nous, on est européens, on a aussi une influence américaine là-dessus, on aime bien le show. Par exemple, Alexis et Félix, en plus des résultats, c'est aussi leur célébration qui fait parler. Quand tu vois le soir de la finale des Championnats de France, et que je vois sur Twitter, "wouah, manque de respect, le frère qui vient qui fait un calma, qui monte sur la table et l'autre qui pleure". Moi, ça me fait kiffer, ça veut dire qu'il y a des gens qui regardent à fond le ping. Et donc, c'est ce qu'on a essayé de faire au Pérou, après à Almaty, quand on gagne, il y a des mecs dans le public qui nous disent, ouais, il est où le pistolet, il est où le pistolet, tu vois, c'est kiffant. Et après, pour les Finals (à Fukuoka, au Japon), on était dans la salle d'échauffement, et on se dit, on fait quoi comme célébration. Le week-end juste avant, tu as John Jones qui avait combattu, qui avait fait la célébration de Trump et je dis "viens, on fait la célébration de John Jones et tout, elle est stylée !" Et je dis, non, mais on est au Japon, on ne peut pas faire ça. Et je dis, "bah fusion, fusion (rires)". Du coup, on a répété un petit peu le truc, et quand on a gagné, ça s'est fait, c'était top.

Q : La complicité que vous avez est génial, ça fait de nombreuses années que vous vous connaissez ?

R : Oui. En fait, on se connaît depuis qu'on a 10 ans, grâce aux compétitions individuelles. Après, lui est parti à Nantes, moi, j'étais à Metz, on se voyait sur les tours d'indivs, sur les stages, sur les regroupements, et voilà, on a eu une super complicité pendant presque trois années à Metz où on était en coloc ensemble. Et après, quand Metz a arrêté la Pro B, je lui ai dit "ne t'inquiète pas, pour ce qui est de l'entraînement, tu peux venir à Montpellier, viens essayer, pas besoin de prendre un hôtel et tout ça, tu viens chez moi, y'a pas de soucis". Pendant deux semaines, il était chez moi, il a bien aimé, et voilà, il est resté à Montpellier, maintenant, il est à Montpellier. Il s'y plaît beaucoup.

Q : C'est difficile de s'entraîner loin de l'équipe pour laquelle on joue ?

R : C'est assez naturel, mais c'est quand même difficile quand tu es dans un processus de progression. Ce n'est pas facile, parce que tu perds énormément de temps. Je me souviens de l'année à Pontoise, en fait, tu perds énormément de temps, parce qu'il te faut un jour, à peu près, pour voyager, tu vas t'entraîner un petit peu le soir, tu fais ton match, et le lendemain, tu re-voyages, mais en fait, le jour d'avant et le jour d'après, tu ne peux pas trop les mettre à profit pour progresser, ça va être plus de l'entretien qu'autre chose. Donc pour un jour de match, tu perds trois jours d'entraînement en vrai, parce que le jour de match, tu ne vas pas t'entraîner.

Q : C'est pour ça aussi que c'était naturel pour vous de jouer pour Montpellier ?

R : Oui, même si j'avais d'autres propositions. Pontoise aussi était super ravi de ma saison, j'étais super content de Pontoise et malheureusement, c'était le seul bémol, c'était que ça soit très loin de là où je m'entraîne. Montpellier a porté son intérêt sur moi et je me suis dit que sportivement et aussi d'un point de vue individuel, c'était super intéressant parce que je perdais pas de temps. 

Q : Cela signifie que l'on pourrait voir Florian jouer un jour pour Montpellier (rires) ?

R : Ouais, après, ce n'est pas moi qui m'occupe du recrutement à Montpellier, mais si "Montpel" a besoin d'un joueur du profil de Flo, oui, je pense. Après là, on a une équipe qui est quand même assez établie, avec un gros effectif et tout le monde remplit super bien sa tâche, donc il faut voir où est-ce qu'ils peuvent caler Florian.

Q : Et cette saison, à Montpellier, ça se passe bien, êtes-vous satisfait ?

R : Oui, on a encaissé qu'une seule défaite jusqu'à maintenant. C'est déjà énorme. On gagne sur La Romagne, sans Alexis et Félix, avec un climat assez tendu, parce qu'il y a eu quelques mésententes avec le club, quelques articles avant le match qui ont été tournés de la mauvaise des manières. Après, je pense qu'on a répondu à la table et je suis super content de l'équipe pour ça. On gagne sur Rouen aussi, on fait une super prestation tous ensemble. C'était vraiment cool. Après notre semaine marathon, on est partis en Pologne jouer la Ligue des champions. Alexis, Féfé et moi, on est partis au Japon et il ne restait plus que Manav (Thakkar), Tonio (Antoine Hachard) et Greg (Grégoire Jean). Ils sont allés gagner à Thorigne contre toute attente. C'est déjà super cool. Après, il y a eu la petite sortie de route face à Angers, mais j'ai envie de dire que c'est bien parce que ça nous a remis un petit peu dans le droit chemin. On en a rigolé. Au moins, chacun a mal joué, mais au même moment. Tu ne peux pas pleurer, tu ne peux pas dire que tu as eu des opportunités. Ce n'est pas comme si tu prenais 3-0, que tu perdais trois fois 12-10 à la belle avec la blinde d'opportunité. Là, tu t'es fait défoncer. Voilà, super, bravo, merci, au revoir, vous avez été meilleurs. Tu ne peux rien dire. De mon côté, mon corps m'a donné de mauvaises informations parce que le matin, à l'entraînement, je jouais vraiment super bien. alors que je ne devais pas être aligné sur la feuille de match. Avec le coach, on s'est dit : "je me sens super bien, je vais vite, tout va bien". Sauf qu'à 19h, j'ai eu un gros coup de barre, mais la compo' était déjà faite. J'ai essayé de résister au mieux. Après, Bastien (Rembert) a fait un super match. Il a été plus réaliste dans les moments importants. Malheureusement, je n'ai pas pu trouver la lucidité tactique et technique dans les moments clés. C'est comme ça.

Q : Vous pensez au titre ou prenez les choses match par match ?

R : Non, on n'y pense pas. Ce qu'on veut, c'est kiffer chaque moment ensemble. Ce sont des moments super précieux. On est sur une super belle lancée. On va avoir une semaine avec Alexis et Félix qui rajoutent une dynamique (avant Noël, ndlr). Tu as un peu les endorphines qui prennent le dessus. Tu ressens moins la fatigue. Tu es dans l'euphorie. Ça va être quelque chose de super cool. En plus, on finit en apothéose sur le match retour de Ligue des champions (remporté 3-0 finalement, ndlr). Ça va être super cool. L'objectif, dans un premier temps, ça va être de se qualifier pour la phase finale en Pro A. Et en Ligue des champions, on espère jouer le quart de finale face à Dusseldorf. Après, pourquoi rêver mieux ? Mais bon, ça, c'est l'année prochaine, donc on verra.

Q : C'est le moment pour évoquer les frères Lebrun, quel est votre relation avec eux ?

R : Ils rajoutent une super dynamique dans le groupe à Montpellier. On ne les a pas tout le temps parce qu'il y a leur calendrier international. En fait, tu es sur une vague avec eux, donc tu te laisses emporter. Mais ce n'est pas juste en faisant ça. Il faut que tu sois à chaque séance à 100 % pour que ça soit du win-win. Que, eux, soient aussi un peu mis à mal et que toi, tu sois dans le dur à la fin de la séance parce que tu t'es donné. Ils ont toujours de l'énergie. Mais ça n'empêche pas qu'on a du temps libre. On fait des activités extra ping. C'est vraiment super cool. 

Q : Vous formez une famille désormais ?

R : C'est avec ces gars-là, avec cette équipe, qu'on passe le plus de temps. Plus de temps qu'avec nos familles. Ce sont nos amis, c'est notre famille. Notre famille étendue. C'est vraiment super cool. 

Q : Ça doit être super de pouvoir les côtoyer en équipe de France… Vous avez également été très présents lors du WTT de Montpellier…

R : Lors des Championnats d'Europe, je suis resté jusqu'au bout. On a perdu le vendredi, il me semble, avec Flo'. Et j'ai dit, les gars, je reste jusqu'au bout. Si vous avez besoin de moi, vous pouvez me presser comme un citron. Donc, j'ai fait une journée le samedi à tous les échauffer. J'ai fait un 8h45 - 20h15 dans la salle d'échauffement. Et c'était vraiment cool. J'ai pu voir la montée en puissance d'Alexis. J'ai pu voir aussi Fef' qui avait à cœur de se racheter pour le double. Et dimanche matin, je les sentais encore plus excités que la veille. Et après, sur le WTT Champions, à Montpellier, j'ai vécu deux semaines quasiment qu'avec eux. Donc, c'était vraiment un truc de fou. Là, c'était la première fois qu'on faisait une compétition aussi importante comme les Finals à Fukuoka. Et c'est un truc de fou aussi l'impact qu'ils ont. Le nombre de fans qu'ils ont, qui sont venus pour les voir, pour des photos, pour des autographes. C'est un truc vraiment assez impressionnant.

Q : Concernant le WTT de Montpellier, racontez-nous votre expérience…

R : C'est un super souvenir. J'ai envie d'être joueur et pas que "sparring". Ça donne super envie. Quand tu joues devant le public français face à des étrangers, je n'ai pas peur de le dire, mais on est le meilleur public au monde tous sports confondus. C'est un truc de fou. Les Asiatiques, ils n'en pouvaient plus. Tu regardais la tête de Lin Shidong, il était désemparé. De plus, Fef' était trop fort. À chaque point, tu avais comme une bombe qui explosait dans la salle. J'ai un pote à moi, notre coiffeur à l'équipe, je lui avais filé des places. Il m'a dit que j'avais l'impression d'être dans une arène de MMA. C'était un truc de fou. L'ambiance qu'il y avait, j'avais la chair de poule à tous les points. C'était un truc de fou. Je n'imagine pas, quand tu es au milieu à la table, ce que ça doit être... Surtout, le speaker et le DJ, ils ont mis une ambiance folle. Tout le monde répondait, c'était magnifique. Je voyais tous les médias qui relayaient ça, même MMA Arena. C'est exceptionnel, l'envergure que ça prend. De plus en plus de personnes qui ne connaissent pas le ping viennent voir du ping et kiffent ça.

Q : Fukuoka, c'était un autre type d'expérience, mais ça devait être dingue également...

R : Oui, c'était dingue. Moi, j'étais un peu encore fatigué. J'étais en Pologne, j'avais joué la Ligue des champions. J'avais fait trois matchs en trois jours. Je suis parti directement de Pologne. Le dimanche soir, je suis arrivé le mardi matin à Fukuoka avec la possibilité de jouer le mercredi. Je me suis dit, ça va être dur. Mais finalement, ça va, on a joué le jeudi. Première fois au Japon, c'est un rêve. Tu te dis que tu vas en Asie pour faire une compétition. Là, tu vas dans un des pays du ping. C'est vraiment un truc de fou, malgré l'ambiance un peu plus feutrée. En plus, le fait qu'on ait joué contre Hong Kong, tu as le public qui est contre toi. Ensuite, je suis resté au Japon, je suis allé m'entraîner à Tokyo. C'était fou, car il y a tout qui est mis en place pour que les mecs performent. Il y a plusieurs étages avec une grande salle de repos ainsi qu'une laverie. Au cinquième, tu as la salle de ping. Au sixième, tu as la salle de musculation. Et à 20-30 mètres, tu as le restaurant où tu peux manger. Il y a tout qui est mis en place pour le ping. Tout est optimisé pour performer…

Q : Et quel était l'objectif alors sur cette Coupe du monde mixte par équipes à Chengdu (en Chine) ?

R : L'objectif, c'était de passer cette première poule, malgré le groupe pas facile. Hong Kong était au complet. La Suède était au complet au niveau féminin. Première compétition pour toute l'équipe de France. Plus de 8 000 personnes dans la salle, qui sont contre toi. Tu as des étoiles dans les yeux. Tu perds sur le fil 8-7. Tu te dis, ça ne passe à rien. Thibaut a des occasions, on a des occasions en double. L'ambiance, j'en parlerai dans un livre, mais c'est un truc de malade. Un truc de fou, c'est comme dans les vidéos. Dès que tu pars un peu en balle haute, loin de la table, tout le public s'exclame. Ensuite, j'ai pris la parole le soir pour remotiver tout le monde pour jouer la Suède. Avec Camille (Lutz), on a sorti une petite masterclass à mettre 3-0 sur une paire qui est dans le top 10 mondial. Derrière, Zaza (Audrey Zarif) a eu des opportunités, mais ils arrivent à revenir à 3-3. Thibaut (Poret) derrière fait un match de patron, il gagne 3-0. Grâce à la cohésion, grâce à l'envie qu'on avait de gagner, Camille et Audrey ont également répondu au rendez-vous. Ensuite, on gagne contre le Canada, ce qui nous permet de passer le tour préliminaire. Derrière, on joue la Corée du Sud, la Chine, c'était fou. On a joué la paire Wang Chuqin-Sun Yingsha, c'était énorme. Tu joues les champions olympiques en titre. À côté, j'ai fait un peu le buzz parce que j'ai les mêmes chaussures que Sun Yingsha, les Chinois m'ont bien aimé (rires).

Q : L'objectif, c'est rester en équipe de France pour 2025 ?

R : Complètement. Je m'entraîne pour ça. Je m'entraîne pour ce genre d'expérience, ce genre d'événements. J'ai envie de tout donner pour défendre les couleurs de la France au plus haut niveau. L'objectif, c'est de se donner rendez-vous l'année prochaine à Chengdu. Après, on sait qu'il y a d'autres compétitions l'année prochaine par équipe. Il y a d'autres compétitions en simple. Il y a les championnats du monde. 2025 et 2026, ça va être des années très chargées. Il faut continuer à performer et à montrer qu'on est là. 

Q : C'est ce qu'on vous souhaite également en Ligue des champions avec Montpellier…

Le Final Four, c'est à Sarrebruck, c'est chez moi. D'avoir cette opportunité, c'est génial. Devant la famille, devant le club de Spicheren. Ça fait vraiment plaisir. C'est difficile pour eux de me voir jouer, hormis à la télé. Ils étaient venus sur mon dernier match à Metz. C'était aussi un moment rempli d'émotions parce que c'était le jour de l'anniversaire de mon père. Ça serait vraiment un petit accomplissement quand même de pouvoir jouer devant eux pour la Ligue des champions…