Ces demi-finales de Ligue des champions en l’Olympique lyonnais et Arsenal sont l’occasion d’étranges retrouvailles. Joe Montemurro, arrivé à la tête des Fenottes l’été dernier, retrouve certes les Gunners, qu’il avait dirigé entre 2017 et 2021. Daniëlle Van de Donk, milieu de terrain lyonnaise, fera elle aussi son retour sur les terres londoniennes, après avoir passé six années du côté de l’Emirates entre 2015 et 2021, le temps de croiser son actuel coach. Mais ce choc entre deux prétendants au titre laisse entrevoir une autre coïncidence : Joe Montemurro a été le mentor de Renée Slegers, actuelle entraîneure d’Arsenal, durant sa formation de manager.
"Joe a été mon mentor lorsque j'ai participé à un programme de mentorat de l'UEFA, il y a cinq ou six ans, je crois. J'ai activement demandé à ce qu'il devienne mon mentor car j'avais entendu beaucoup de bien de son leadership, de sa philosophie du football et de sa personnalité", remet Slegers en conférence de presse. L’actuelle numéro 1 du banc londonien a d’abord été adjointe de Jonas Eidevall, entraîneur des Gunners entre 2021 et 2024, avant de prendre sa place en octobre, après son licenciement. D’abord conservée avec un statut d’intérimaire, elle finit par convaincre la direction d’Arsenal de l’engager comme entraîneur principal mi-janvier, après avoir qualifié l’équipe en quarts de finale de la Ligue des champions et enchaîné onze matchs sans défaite.
"Elle fait probablement tout l’inverse de ce que je lui ai dit, rigole Joe Montemurro quand Flashscore l’interroge au sujet de sa protégée. Et c’est sûrement pour ça qu’elle réussit !" Une façon de dire aussi que la jeune coach de 36 ans a retenu les conseils de celui qui vient de fêter ses 55 ans et avait accepté de la prendre sous son aile pour lui transmettre "ce qui n’est pas écrit dans les livres ou sur Internet". "Nous avions beaucoup parlé de l'élaboration de modèles de jeu, de philosophies, de sa façon de coacher, retrace-t-il. Je n'arrêtais pas de lui dire qu'il ne fallait pas copier quelqu'un d'autre, qu'il fallait avoir ses convictions en matière de football, de jeu, et qu'il fallait trouver un moyen de les transmettre à son équipe."
Un mentor fière de son élève
Voit-il des points communs entre son Olympique lyonnais et le Arsenal de Renée Slegers, qui a grandi comme coach sous ses ordres ? "Elle est d'origine néerlandaise, donc elle a la même mentalité que moi, celle d’un joueur de ballon, nous répond-il. J'aime avoir le ballon. C'était donc probablement les points communs. Nous avions une mentalité basée sur la possession du ballon et nous travaillions davantage avec le ballon. Et cela se voit dans son football. Son équipe est très, très bonne dans la possession du ballon."
Joe Montemurro n’a d’ailleurs que des compliments à faire à son élève au sujet des performances de son équipe: "Elle a vraiment ramené l’équipe à un certain niveau de croyance dans ce qu’elles font. C'est probablement un reflet d’elle. Elle est très confiante dans ce qu'elle fait. Elle est très stratégique dans sa façon de faire les choses. Et je suis très heureux pour elle. Je suis si heureux pour elle qu'on lui ait donné l'opportunité et qu'elle l'ait saisie, parce que c'est un très gros poste, mais elle a l'air de bien s'en sortir, donc je dois lui avoir appris de bonnes choses !" De là à ce que l’élève ne dépasse le maître ?
En tout cas l’entraîneur de l’OL a hâte de retrouver son ancienne équipe et Renée Slegers donc, samedi : "Cette équipe d’Arsenal est différente, c'est un Arsenal plus substantiel. Ils ont une équipe incroyable et même un staff incroyable. Ils ont vraiment investi dans le programme et dans le football féminin en général. Donc logiquement, Arsenal a grandi. C'est définitivement l’un des clubs les plus puissants d’Europe. J’ai vraiment hâte d’être à samedi, avec les fans au stade, ça sera un match fantastique."
Montemurro, un coach humain qui propage sa bonne parole
Renée Slegers elle aussi partage cette hâte de retrouvailles, même si elle admet ne pas avoir discuté avec son ex-mentor "depuis deux ou trois mois". Mais elle renvoie l’ascenseur au niveau des compliments : "C'était génial de travailler avec lui. J’ai appris beaucoup de choses." Parmi lesquelles le management "très humain" de Montemurro : "Il a eu une grande influence dans mon leadership et dans l'importance de construire une relation avec les joueuses, pour pouvoir les coacher ensuite. Il faut comprendre les joueuses, leurs personnalités, pour qu'elles se sentent suffisamment en confiance pour demander de l'aide mais aussi être dirigées."
Lindsey Heaps aussi est fan de ce management, qui avait valu à Montemurro d’être très apprécié par son groupe lors de son passage à Arsenal et de voir sa direction faire pression sur lui pour qu’il prolonge : "Ce qu’a changé l’arrivée de Montemurro ? L’ambiance, la ‘vibe’. La liberté de jouer. Je pense qu'il faut toujours mettre au point de petits éléments de structure, sur la façon d’être positionnés, de remplir les rôles, mais avec la liberté de faire ressortir vos qualités et vos points forts. Je pense que lorsqu'on a ce sentiment de liberté, on a beaucoup de confiance et c'est ce que j'ai vu au cours de l'année avec beaucoup de joueuses."
Montemurro lui répond en disant qu’il ne fait que mettre en confiance des top joueuses, qui atteignent un niveau si élevé qu’elles ne peuvent progresser qu’en se remettant elles-mêmes en question : "Nous avons pu faire ressortir le meilleur de beaucoup de joueuses parce qu'on leur a donné un peu plus de liberté et de fluidité." Le tout mélangé à la "culture de la gagne" dont il sent le club, allant de l’employé à la plus grande star, imprégné : "Vous êtes dans un environnement où tout est fait pour gagner au plus haut niveau et être le meilleur chaque jour. Et j'adore ça !"
Alors évidemment pour lui, face à son ancienne élève samedi, l’objectif sera de gagner, pour se faciliter la tâche avant un match retour prévu dimanche au Groupama Stadium. "Il faut que l'équipe soit altruiste, avec un peu d'humilité et de sourire, qu'elle veuille le ballon et qu’elle sache le garder", prévient celui qui n’a jamais remporté la Ligue des champions. Une mentalité positive que relaie aussi Renée Slegers, qui n’a rien perdu des diktats de son mentor : "Même s'il y a beaucoup de choses à faire demain et que la tâche doit être exécutée à un haut niveau, nous devons aussi prendre plaisir à ce que nous faisons." Rendez-vous à 13h30 pour le match des retrouvailles, avec le sourire.