Il y a des moments où il vaut mieux être performant dans son travail. C'est notamment le cas quand le patron change. Avant le Grand Prix de Catalogne, Hervé Poncharal a passé la main à Günther Steiner, qui s'est offert Tech3 après s'être fait connaître sur les sports mécaniques à quatre roues (NASCAR puis Formule 1). Heureux hasard (absolument pas), Liberty Media, propriétaire de la Formule 1, a acquis le MotoGP récemment, donc le milliardaire allemand n'arrive pas en territoire inconnu. Clairement, c'est une page qui se tourne pour l'écurie varoise, parti du bas pour s'imposer au niveau mondial.
Et comme on ne sait jamais de quoi l'avenir sera fait, Enea Bastianini a eu l'occasion d'impressionner son nouveau boss, sur la piste si piégeuse de Montmeló. Neuvième de la Q2 puis 5e de la sprint dans la roue de Pedro Acosta, ex rookie Tech3 monté chez KTM, "La Bestia" a signé un beau podium dimanche, derrière les frères Álex et Marc Márquez. Et vu la physionomie de la course, l'ancien pilote Ducati a peut-être été trop prudent pour dépasser le Tiburón de Mazarrón, laissant la fratrie s'échapper alors qu'il paraissait en mesure de contester leur suprématie dans la deuxième moitié de course. "Pedro fait de super freinages, c'est très dur de freiner encore plus fort que lui, mais j'ai essayé de faire de mon mieux, a-t-il expliqué après la course. À un moment donné, j'ai perdu le contact avec l'arrière, ensuite j'ai glissé, mais avec cette moto, j'arrive à beaucoup jouer dans les freinages et j'aime ça !".
Une Tech3 KTM enfin à sa mesure ?
Absent en Allemagne au début de l'été en raison d'une sévère intoxication alimentaire, Bastianini est revenu en République tchèque lesté de trois kilos, s'est qualifié en Q2 et a pris la 3e place de la sprint. Et s'il est tombé dans le 7e tour du Grand Prix, il n'a échappé à personne qu'il avait ajusté Francesco Bagnaia, Fabio Quartararo, Raúl Fernández et Jack Miller, excusez du peu.
Toujours aussi agressif et donc spectaculaire à voir pour les fans, "La Bestia" a poursuivi sa progression après une première moitié de saison délicate, doux euphémisme. Pas simple de passer d'une Ducati officielle à un team satellite KTM !
En Autriche, s'il a loupé la qualification directe en Q2 pour 21 petits millièmes, il a survolé la Q1 et s'est battu pour la pole avant de prendre la 5e place. Septième de la sprint puis 5e du GP : le natif de Rimini a confirmé son retour parmi les meilleurs. Néanmoins, il a vécu un weekend pourri en Hongrie alors qu'il a apprécié cette nouvelle piste, avec une chute provoquée par Quartararo en sprint, une erreur qui a entraîné Johann Zarco avec lui le dimanche et, surtout, une sacrée frayeur alors que le peloton était compact au moment où il a traversé la piste.
En Catalogne, il a démontré que ce regain de forme estival n'était pas fugace et que les évolutions sur l'aérodynamisme étaient validées. Au point qu'il a envisagé un succès dimanche. "La victoire, j'y ai un peu pensé, a-t-il souri. Mais en étant réaliste, j'avais trop attaqué à ce moment-là (pour dépasser Acosta, ndlr). Mon pneu ne pouvait probablement pas en faire plus à la fin et l'écart s'est creusé. Je peux quand même être satisfait de ce résultat, c'est mon premier podium avec Tech3 et avec KTM, c'est bien".
Évidemment, la présence de Steiner ne lui a pas échappé et l'a même transcendé : "c'était super d'avoir le nouveau patron. On a l'ancien boss et le nouveau boss ensemble sur la même course. Le nouveau PDG de KTM était à Brno et on avait fait le podium au sprint, aujourd'hui on avait le nouveau patron de Tech3 et on fait un autre podium. J'attends de savoir qui sera à Misano !".