Interview - Vincent Parisi : "Le sport, ce n'est pas de la compétition, c'est un jeu avant tout"

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Interview - Vincent Parisi : "Le sport, ce n'est pas de la compétition, c'est un jeu avant tout"

Vincent Parisi au salon du livre à Paris
Vincent Parisi au salon du livre à ParisHugo Sports
Champion du monde de ju-jitsu, coach sportif, chroniqueur chez BeIN Sports et commentateur de MMA, Vincent Parisi a publié le livre "30 minutes de sport par jour pour tous" pour proposer une approche dictatique de la pratique sportive. À J-100 des Jeux olympiques de Paris, le colosse s'est confié pour Flashscore avec son naturel et sa bonne humeur communicative.

Flashscore : Dans l'avant-propos de votre livre, vous évoquez la figure de votre père, Angelo Parisi, qui fut champion olympique et porte-drapeau. Vous êtes un fils des JO !

Vincent Parisi : ce que peu de monde sait, c'est que les Jeux olympiques ont vraiment acquis leurs lettres de noblesse  et une autre dimension à partir de Los Angeles en 1984. Mon père a participé en 1972 mais n'a pas pu en être en 1976 car il a changé de nationalité (né Italien, il est devenu Français, ndlr), il est revenu en 1980 et a été porte-drapeau à Los Angeles. Ces JO-là ont été les premiers ultra-médiatiques et tout est parti de là. S'il n'y avait pas eu Los Angeles, peut-être que les JO se seraient arrêtés car il n'y avait que les États-Unis qui pouvaient financer un tel événement et le CIO n'avait pas les moyens pour organiser. C'est depuis ce temps que la ville et le CIO sont associés. Je pense qu'en 2028, ça va être exceptionnel. 

"30 minutes de sport" est un livre destiné à la pratique sportive. Nous sommes nombreux à commencer puis à arrêter puis à recommencer et ainsi de suite. Quels conseils donnez-vous pour gagner en régularité ?

Il faut d'abord identifier la raison pour laquelle on ne parvient pas à continuer. Si vous avez réussi à reprendre, ça veut dire que ce n'est pas un problème de s'y remettre. Au contraire, c'est une force. En revanche, ce que vous n'avez pas réussi à faire, c'est trouver une discipline ou une pratique où vous vous amusez et où vous prenez du plaisir. En d'autres termes, vous avez la discipline pour vous dire que vous devez faire du sport pour votre bien-être mais vous avez aussi besoin de la passion. Je prends mon exemple : je viens des sports de combat mais le sport que je pratique le plus en ce moment, c'est le padel. C'est un sport qui me permet d'utiliser toutes les parties de mon corps en mouvement, à travailler la tactique, les réflexes, la concentration. Je m'amuse pendant 1h30 et je n'ai pas l'impression de faire du sport. Votre objectif, c'est de mettre une petite routine en place, trouver le créneau horaire qui permet de le faire tout le temps. Si on rate une séance à cause d'un imprévu, ce n'est pas grave dans le cadre d'une pratique régulière. Il faut 3 semaines, voire un mois, pour que le corps accroche, ressente les effets de l'effort et soit demandeur. 

Vincent Parisi a été champion du monde de ju-jitsu
Vincent Parisi a été champion du monde de ju-jitsuHugo Sports

Les emplois sont de plus en plus flexibles, avec des horaires décalés. Créer une routine est parfois délicat en fonction de l'emploi du temps. 

Je l'ai vécu aussi mais, si on réfléchit comme ça, on ne fait jamais rien. En réalité, si on se lève plus tôt, qu'on fait 30 minutes de sport, la journée sera dix fois meilleure. Sinon, on entre dans un cycle où on subit. Il faut avoir la volonté de casser ce rythme. C'est ce que j'explique dans le livre : il faut apporter une forme d'autonomie dans la pratique et  aussi prendre un coach, ne serait-ce que pour être accompagné au début, pour apprendre à s'échauffer, à s'entraîner, à construire la séance. Certaines personnes ont besoin qu'on prenne soin d'elles et elles vont toujours avoir besoin du coach. Or tout le monde ne peut pas se le permettre financièrement mais ça vaut le coup pour démarrer.

Quels sont les bénéfices d'une pratique sportive régulière ?

J'ai entraîné des gens qui ont fait fortune et je leur dis que, quand ils font du sport, c'est comme s'ils gagnaient 100 milliards. Ils ne veulent pas être en retard pour signer un tel contrat ! Ça semble triste dit comme ça mais, pour la santé, c'est un rendez-vous à ne pas manquer. Tant que tu n'as pas de pépin, ça va parce que tu as un capital santé génétique. Mais ce n'est pas toujours vrai car, avec tout ce qui nous entoure en termes de pollution atmosphérique et psychique, de mauvaise alimentation, d'infox et j'en passe, il faut savoir faire la part des choses, même si ça impacte toujours. Il faut établir que, trois fois dans la semaine, je fais ma séance. C'est aussi une question de valorisation : on est très fier de se tenir à un programme. Beaucoup de gens ont perdu l'habitude de prendre soin d'eux alors qu'ils prennent soin des autres. Quand on ne fait pas attention à soi, on perd de l'auto-estime. J'ai donc voulu apporter toute mon expérience dans ce livre, même si j'aurais pu en écrire le double et, finalement, Hugo Sports m'a accordé 160 pages au lieu des 120 de départ et c'est un gros effort de leur part. Je donne plein de conseils dans plusieurs domaines pour aider à faire ce qu'il faut, apporter des informations et la nouveauté pour intéresser. C'est un bon repère et je suis fier de ça. Je voulais que ce soit facile et compréhensible, avec des photos pour visualiser les exercices et les rendre accessibles sans infantiliser. Ce n'est pas un livre de remise en forme pour les nuls, c'est fait par un ancien sportif de haut niveau qui a un vécu d'éducateur et d'entraîneur. J'enseigne à tous les publics et tous les âges depuis 2002. C'est mon métier et donc j'anticipe aussi la maladresse, le mauvais geste pour aller à l'essentiel. 

Il y a aussi les à-côtés désagréables qu'on oublie !

Il faut toujours être dans le positif mais, on le sait tous, parfois c'est pénible (rires). Il faut laver tout de suite les affaires, les étendre, surtout ne pas laisser dans le sac, il faut manger, souffrir, avoir des courbatures. Les courbatures, c'est positif car ça veut dire que le corps a travaillé et a adhéré aux exercices. On apprend petit à petit à se connaître. Il faut que ça reste une sensation agréable. 

La préface est signée par l'humoriste Jérémy Ferrari qui a un parcours de vie tortueux et qui est parvenu à s'en sortir notamment par la pratique sportive. 

J'avais l'opportunité de demander une préface à beaucoup de monde mais j'ai choisi Jérémy car c'est devenu un ami proche et il respire ce que je voulais montrer dans le livre. Il a compris qu'il était très sain d'avoir une pratique sportive et puis il adore le ju-jitsu brésilien, ça nous rapproche. Le sport, c'est une thérapie pour tous. Je dis souvent que, dans le sport, on sait tout de suite sa valeur. Jérémy a besoin d'extérioriser, de travailler parce que ça lui fait du bien car il a besoin de canaliser son énergie et sa productivité car c'est un créatif et un inventif. Il a besoin de se libérer car il passe son temps à écrire. Jérémy est passé par des moments très difficiles, il buvait, il a failli faire une tentative de suicide et le sport a contribué à ce qu'il sorte de ça. 

Les 30 minutes de sport quotidiennes sont-elles en voie d'institutionnalisation à l'école, surtout que les cours d'EPS sont limités, avec des créneaux pas toujours adaptés pour les élèves ?

C'est officiel depuis la rentrée de septembre. J'ai même été informé en amont puisque Paris 2024 m'a contacté dans le cadre du livre alors que j'avais déjà commencé la rédaction. J'ai dit oui tout de suite car ça me parlait à la fois en tant que coach mais aussi par rapport à moi. Malheureusement, la France est un très vieux pays qui a très mal vieilli. La classe politique, depuis des dizaines d'années, n'a pas compris l'intérêt du sport. Je pense qu'il s'agit de personnes qui n'aimaient pas le sport dans leur jeunesse et qu'on a forcé. Or avec tous les champions qu'on a eu et dont certains sont devenus ministres, si aucune réforme n'a pu être menée, c'est bien qu'il y a eu un blocage. Le pire, c'est que c'est scientifique prouvé : l'activité physique régulière est bonne pour l'organisme.

Ça rappelle les propos récents de Florent Manaudou...

Nous ne sommes pas un pays de sport, nous n'avons pas cette culture. Des villes peuvent l'avoir mais le pays dans son entièreté ne l'a pas. Il y a des pays où la pratique est généralisée. Néanmoins, je crois qu'on tend vers ce modèle parce qu'il y a eu une prise de conscience, notamment dans l'installation d'infrastructues dans les parcs, sur les plages. Pour autant, on ne s'est pas rendu compte qu'à plusieurs niveaux, que ce soit dans le social, la santé, la culture, le sport rassemble. Quatre heures de cours de sport par semaine à l'école, c'est catastrophique. Mon père a grandi en Angleterre, il en faisait 15. Tu pouvais choisir aussi la musique ou le théâtre. Mais cela signifie qu'il faudrait totalement réformer l'éducation.

On a tout de même l'impression que la prise de conscience demeure chaotique.

Quand on aura compris que le sport, et je ne parle pas de pratique à haut niveau, a un impact positif sur la société : moins de dépression, moins de dépenses de la Sécurité sociale, moins de malades. Avec le sport, tu es toujours dans la volonté de progresser. Il ne faut pas persister à dire et à croire que seules les associations sont habilités à proposer du sport. Il y a 15 millions de runners en France et ils ne sont pas licenciés. La pandémie de COVID-19 a aussi accéléré la pratique sportive. Mais il faut aussi un accompagnement avec un coach parce que mal faire un exercice peut avoir de graves conséquences. En somme, il faudrait un aménagement du territoire pour avoir des infrastructures accessibles à tous, des formations de coach pour réactualiser les savoirs et repenser la pratique sportive. Cette année, il y a les Jeux olympiques mais si on avait pris conscience de ça plus tôt, toutes les villes et les villages auraient dû faire des actions hebdommadaires pour promouvoir le sport. 

L'institutionnalisation de la pratique sportive ne paraît pas coordonnée et encore moins acceptée.

Dès le CP, la pratique sportive doit être envisagée comme un cours de mathématiques ou de lecture. Il faut expliquer aux enfants que c'est bon et que ça s'ancre en eux. Mais comment demander ça à des professeurs qui sont déjà surchargés de travail et qui vont rogner 30 minutes au détriment d'autres matières ? C'est là où on n'est pas bon, parce que les méthodes ne sont pas adéquates. Les enfants trouvent des jeux pour avoir de l'activité physique mais plus ils grandissent, moins ils l'ont. Il ne faut pas laisser le choix mais on en sera remercié. 

Est-ce que la première chose à faire, c'est d'arrêter de noter le sport à l'école ?

Il faut arrêter de toujours vouloir faire de la compétition. Le sport, ce n'est pas de la compétition même si on l'a rendu comme ça. C'est un jeu avant tout. Il y a toujours quelqu'un de meilleur que toi mais en vrai, on s'en moque. L'essentiel, c'est de s'amuser, de passer un bon moment, pas de gagner. Je le constate souvent : on a détourné l'esprit du sport et on l'a rendu trop compétitif. C'est ça qui bloque les gens. Sur des sports comme le judo et le karaté, je privilégie le kata au combat parce que tous les enfants n'aiment pas se battre, ils peuvent se faire mal en tombant. Il faut une phase d'apprentissage pour donner de la confiance et c'est là où intervient la patte de l'enseignant ou de l'entraîneur. Il y a trop d'esprit compétitif et de pression du résultat. On te dit que si tu ne cours pas vite, si tu ne sautes pas loin, tu es nul. Mais ce n'est pas la réalité ! Tu as envie, tu viens, tu essaies et tu n'as pas besoin d'être un champion pour t'amuser. 

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