Flashscore : La WBC a annoncé des négociations obligatoires avec Yamileth Mercado, le combat va se faire ?
Ségolène Lefebvre : La fédération a ordonné le combat et nous sommes en négociations actuellement. On va voir ce qu'elle me propose. On doit se mettre d'accord avant le 25 mars, sinon ce sera mis aux enchères.
Il y a peu de chances que cela se passe à Douai ?
Non, par rapport au coût de l'organisation et puis aussi en fonction de ce qu'elle demande comme bourse (aux alentours de 60.000 dollars, ndlr). Pour être honnête, ce sera compliqué de boxer en France. Mais s'il faut aller au Mexique, j'irai et puis on prendra un peu de soleil (rires).
Quand le combat pourrait avoir lieu ?
Normalement, il est prévu le 17 mai mais tout dépend encore ce qu'elle me propose. Si ce n'est pas idéal, si la bourse ne convient pas, j'y réfléchirais. Pour le moment, il n'y a pas de contrat signé.
Vous êtes déjà en période de préparation ?
Oui, depuis plusieurs semaines. J'ai repris l'entraînement en décembre et en janvier et maintenant, on met les bouchées doubles car je suis sûre de boxer. On recherche encore des sparrings, mon entraîneur s'occupe de ça, il y a plusieurs noms en tête. Mercado n'est pas la première venue, il faut bien choisir.
Vous croisez souvent les gants avec Delfine Persoon ?
Oui, parce que nous ne sommes distances que d'une heure en voiture. C'est donnant-donnant, on se rend service, une fois c'est moi qui vais en Belgique, une autre c'est elle qui vient.
En 2024, vous avez affronté Ellie Scotney à Manchester pour unifier les titres WBO et IBF des super-coqs. Avez-vous analysé cette première défaite ?
Je n'ai pas revu le combat en intégralité, simplement des extraits. On a fait un débrief quelques jours plus tard parce qu'il fallait s'en remettre. Pour ma part, elle gagne logiquement le combat, il n'y a pas eu de vol. Je trouve que j'ai fait un bon combat, mais elle a été meilleure surtout en deuxième partie. Elle a mérité sa victoire et je lui souhaite le meilleure pour la suite.
C'était la première fois que vous combattiez dans une telle salle. C'est une expérience qui vous servira contre Mercado ?
L'O2 Arena de Manchester, ce n'est pas une petite salle (20.000 places, ndlr) et les Anglais, au niveau de l'organisation, ça n'a rien à voir avec ce qu'on a en France. C'est tout en grand, avec les paillettes. Au Mexique, ce sera autre chose, ce n'est pas la même culture. Je ne sais pas dans quelle salle cela pourrait avoir lieu mais ce sera forcément différent.
La boxe mexicaine, ce n'est pas de la boxe à distance !
Avec Mercado, je sais que ça va avancer, qu'elle va vouloir mettre beaucoup de coups pour me tuer, si je peux m'exprimer ainsi. Les Mexicains, ce n'est pas de la demi-mesure, ils sont là pour taper !
C'est un nouveau style à appréhender ?
Non, j'ai déjà affronté beaucoup de boxeuses d'Amérique latine qui aiment avancer et frapper. Je suis habituée, ce n'est pas une boxe qui, dans l'absolu, va me pousser à m'adapter, même si chaque boxeuse est différente.
Comme l'Angleterre, le Mexique a un grand réservoir de boxeuses.
Ça n'a rien à voir avec la France. Par exemple, les Anglaises n'ont qu'un coup de fil à passer pour avoir trois ou quatre sparrings alors que nous, c'est beaucoup plus galère. Ce n'est pas le même monde, on n'a pas un tel vivier. Pour elles, c'est toujours plus facile de se préparer, je ne vous apprends rien.
Malgré tout, la France a beaucoup de boxeuses de haut niveau mais pas de business autour.
C'est exactement ça. Nous, on fait notre travail, on monte dans le ring, on boxe mais on ne peut pas tout faire non plus.
Vous avez effectué un combat de rentrée en octobre, remporté après un choc de tête au 5e round. Que s'est-il passé ?
Elle m'a mis un coup de tête involontaire. J'ai été coupée légèrement à l'arcade mais elle, c'était au niveau du front et du cuir chevelu. Après le combat, on m'a dit qu'on voyait l'os du crâne. Avec l'aval du médecin, l'arbitre a arrêté le combat au 5e. J'aurais préféré terminer pour gagner d'une manière plus normale.
Et faire plus de rounds ?
Ce n'est pas forcément par rapport au nombre de rounds disputés mais par rapport à la manière de gagner. Je ne pouvais pas le maîtriser. Après, j'ai 20 combats professionnels que j'ai quasiment tous finis à la décision. J'aurais voulu en faire plus, en montrer davantage.
Les joies d'affronter une gauchère !
Oui, surtout qu'elle se jetait, ce n'était pas trop propre et ça lui est déjà arrivé deux-trois fois dans sa carrière. Ce n'était même pas étonnant que ça se finisse comme ça. Elle voulait m'assomner (rires). C'était la tête la première et ça n'a finalement pas été en sa faveur.
Vous avez été championne du monde WBO mais est-ce que la ceinture WBC est plus prestigieuse ?
La WBC et la WBA sont les deux plus anciennes fédérations. Avoir la ceinture WBO et la conserver, c'était bien mais remporter la ceinture WBC ouvrirait d'autres perspectives. Pourquoi pas une revanche contre Scotney puisqu'elle veut réunir toutes les ceintures ?
Affronter une Mexicaine au Mexique, cela ferait écho avec la victoire de Bruno Surace contre Jaime Munguía à Tijuana. Il est passé directement d'inconnu à vedette : est-ce qu'il a insufflé quelque chose de nouveau en France ?
Sa victoire a redonné un souffle, mais est-ce qu'il va durer ? Je ne sais pas. Il ne faut pas s'emballer 15 jours-un mois et retomber dans ce qu'on connaît d'ordinaire. Ce qu'il a fait est magnifique et ça peut donner confiance à des boxeurs qui peuvent avoir peur d'aller à l'étranger. Nordine Oubaali y était parvenu d'ailleurs, notamment aux États-Unis et au Japon. Rien n'est impossible. Il faut prendre des risques quand ça en vaut la peine. On ne peut pas toujours boxer en France tout le temps, même si tout le monde n'a pas l'opportunité de boxer à l'étranger.
Vous avez été au coeur d'un documentaire consacré à votre club de Douai et qui a eu un beau succès d'estime.
Il a été diffusé sur France 3 et il est passé au cinéma de Douai ainsi que dans plusieurs festivals dédiés aux documentaires de sport. C'est une belle reconnaissance pour le club, pour moi mais surtout pour les bénévoles qui aident au quotidien. Ils le méritent car ils sont dans l'anonymat. Sans bénévoles, c'est très compliqué, encore plus en boxe. Il faut les remercier.
C'est stressant d'avoir une caméra braquée sur soi ?
Au début, c'est un peu bizarre quand on te met les micros mais ça s'oublie pendant l'entraînement parce qu'on est absorbé par le travail. C'est plus en face caméra car c'est un exercice un peu spécial mais c'est un exercice qui ne me stresse pas et qui ne m'empêche pas de dormir.
Les boxeurs sont habitués aux caméras, quitte à faire un peu de trash talk à l'occasion !
Je ne suis pas trop dans le trash talk, je ne suis pas du genre à insulter l'adversaire ou à le provoquer. C'est le ring qui parle. Parler avant ne sert à rien. Mais c'est vrai qu'en Angleterre ou aux États-Unis, ils aiment ça et les fans en redemandent. En France, tu ne peux pas le faire, c'est mal vu et tu passes tout de suite pour un crâneur. Ça crée un personnage, comme Derek Chisora qui est très populaire parce que les gens veulent savoir quelle dinguerie il va faire ou comme Chris Eubank Jr qui a écrasé un oeuf sur le visage de Conor Benn (rires). C'était pas bien de faire ça mais ça fait monter la sauce, c'est tout un art !