Latéral droit de formation converti en ailier cette saison, Lilian Raolisoa est devenu un titulaire du SCO Angers. À 25 ans, il est le lien entre les cadres et les jeunes pousses du secteur offensif. Eligible avec Madagascar, il ne se voit pas disputer la Coupe du monde en cas de qualification préférant pour l'heure se concentrer sur le maintien et sa progression personnelle.
Flashscore : Vous êtes titulaire depuis le début de saison. Vivez-vous le meilleur moment de votre carrière ?
Lilian Raolisoa : ça fait un moment que je suis à Angers, je m'y sens bien. Il fallait que je m'affirme et surtout faire en sorte de pouvoir jouer. Je sais que je peux faire beaucoup plus mais j'assimile bien ce poste d'ailier.
Comment se passe la complémentarité avec Carlens Arcus qui évolue au poste de latéral droit ?
Très bien parce que je suis formé comme latéral droit, donc je comprends le poste sans avoir besoin de beaucoup communiquer avec Carlens, surtout quand il y a du bruit dans le stade. On arrive à se comprendre par le regard, on essaye d'avoir cette connexion. Ça prend de l'ampleur match après match et c'est une bonne chose d'avoir des joueurs quasiment similaire sur le couloir droit.
Alexandre Dujeux recherche-t-il ce double aspect avec vous deux, c'est-à-dire savoir défendre mais aussi être capable de dédoubler offensivement ?
Il ne nous l'a pas dit directement mais je pense que c'est ce qu'il veut. Au départ, je suis un latéral qui monte beaucoup, qui aime dribbler, percuter, mettre de la vitesse mais qui aime aussi défendre. Il a dû le voir comme un atout, et c'est assez solide jusqu'à présent. Carlens et moi en sommes très satisfaits, on discute beaucoup et on y prend beaucoup de plaisir.
À titre personnel, cela vous permet d'avoir de la continuité dans vos performances ?
Je me suis affirmé en deuxième partie de saison dernière, la première avait été plus compliquée. On apprend de tous ces matches et c'est grâce à ça que j'en suis là aujourd'hui. Je veux que ça continue.
Vous avez aussi une bonne qualité de centre et en jouant ailier ou piston vous pouvez l'utiliser davantage ?
J'essaie de le travailler très souvent à l'entraînement. J'aime jouer à gauche mais à droite, je peux vite éliminer et centrer. Je suis très content d'être polyvalent et utile pour le coach. Maintenant, je le vois comme une force.
Vous avez 25 ans, vous êtes quasiment un vétéran dans le secteur offensif !
En termes d'expérience, je suis un peu comme les jeunes parce que j'ai signé professionnel tard, à 22 ans. C'est ma troisième année et je suis encore chez les jeunes. Je suis entre les deux et j'aime bien cette position parce que j'apprends tous les jours et je peux aussi en apprendre aux plus jeunes. Je m'entends avec les jeunes et les cadres et j'aime être au milieu, c'est très agréable de savoir faire le tampon. Par exemple, des anciens peuvent appuyer plus sur certaines consignes avec des jeunes, je peux leur expliquer que c'est pour leur bien.
Vous êtes né à Angers mais vous avez été formé dans le Sud-Ouest, avec des passages à Toulouse, Blagnac et Muret.
Je suis parti d'Angers quand j'avais 2 ans, donc je ne connaissais rien de la ville. J'ai grandi à Toulouse, aux Izards. J'ai appris le foot, à Grisolles. J'y suis resté de 7 à 12 ans, on avait une génération avec beaucoup de qualité et on a pu affronter des équipes de jeunes de clubs pros, on a disputé le tournoi de Saumur. Je commençais à être courtisé et je suis allé à Toulouse en U13. J'étais très speed et je ne trouvais pas de plaisir car c'était déjà très encadré car on préparait l'entrée en centre de formation. Je ne suis pas resté longtemps. Ensuite, j'ai joué à Balma, à Blagnac. J'étais d'ailleurs venu à Angers en détection en 2016 en U16 mais je suis allé en Muret en U17 Nationaux. J'ai fait des tests à Nantes, à Angers, à Nice. J'avais le choix entre Nice et Angers. Je ne devais pas signer au SCO mais le club avait proposé plus de choses pour moi, avec deux contrats. C'était le destin de revenir. Ça a pris du temps mais ça a abouti (sourire)
Vous démontrez qu'on peut évoluer en Ligue 1 en passant par des chemins hors des centres de formation.
J'ai eu la chance de savoir comment ça se passait en centre de formation. Ça m'a forgé parce qu'il y a eu des moments très difficiles, avec des moments où je n'étais plus désiré dans ma catégorie. J'ai réussi à chaque fois à mettre la chance de mon côté mais ça a été compliqué. Il y a aussi eu le COVID mais le bon côté, c'est qu'il n'y a pas eu de championnat et les clubs ne pouvaient pas se séparer des joueurs. Tout a recommencé de zéro et c'est là que j'ai pu me montrer à nouveau. C'est allé assez vite ensuite et je suis très content d'avoir signé dans mon club formateur.
Angers est très réputé pour la formation et l'équipe première peut en témoigner cette saison. Le SCO a participé à la Youth League en 2021-2022.
Recruter coûte de l'argent donc là, les jeunes peuvent se montrer. Nous avons un entraîneur qui est très ouvert vis-à-vis du centre alors que par le passé, le club misait surtout sur l'expérience pour se maintenir. Stéphane Moulin regardait quand même les jeunes, comme Rayan Aït-Nouri, Zinedine Ould Khaled, moi ou d'autres. Avec le COVID, Angers n'a pas eu trop le choix et a promu des jeunes. On a aussi su montrer qu'on était là, en faisant des matches très cohérents en championnat. Aujourd'hui, nous avons beaucoup de jeunes et on voit que ça marche.
Il y a aussi des cadres comme Himad Abdelli ou Jordan Lefort mais aussi de bonnes recrues comme Hervé Koffi et Louis Mouton. Alexandre Dujeux parvient toujours à mobiliser l'ensemble de ses forces, même pour se sortir d'une mauvaise série.
On pense d'abord au collectif. On sait que c'est une chance d'être en Ligue 1, de jouer pour le SCO. Quand on voit des joueurs qui partent dans des clubs très connus, on se dit "pourquoi pas nous ?". Que tu sois à Angers ou ailleurs, tu peux te montrer. On n'est pas un club avec des individualités incroyables mais notre ADN c'est le collectif qui fait ressortir les individualités. Si Estéban Lepaul, Rayan Aït-Nouri ou Mohamed-Ali Cho sont partis dans de grands clubs, pourquoi pas nous ? Quand on voit les cadres être à fond, ça nous tire et on se donne tous à fond. On sait qu'on n'est ni le Barça ni le PSG ni même Nice. On sait qu'on n'aura pas tout le temps la balle mais on arrive à trouver du plaisir tous ensemble en sachant que la difficulté nous aidera à rendre les choses plus faciles ensuite. On a les pieds sur terre, on ne se prend pas pour d'autres. On n'est pas fous, on prend match après match, on travaille, on se donne les moyens. Certains pensaient qu'on ne se maintiendrait pas la saison dernière mais tous les joueurs de l'effectif ont participé aux matches. Tout le monde a été concerné et des joueurs comme Marius Courcoul ou Ousmane Camara se sont faits une place cette saison. Comme quoi, pas besoin de faire trop de bruit... On gagne très bien nos vies mais on ne le montre pas. Personne ne peut dire qu'on a pris la grosse tête. On est là pour jouer.
Après le départ d'Estéban Lepaul, on a découvert Prosper Peter, à peine 18 ans et buteur contre Rennes. Comment voyez-vous son évolution ?
Pour moi, ça aurait été difficile de passer après Estéban Lepaul si tu avais eu plusieurs années en pro. Pour Prosper, ce n'est pas dur. On est tous allé le voir, on lui a dit qu'il n'avait pas à se mettre de pression. Il n'est pas Ibrahima Niane ou Bamba Dieng, il est Prosper Peter, c'est sa première saison pro, il a juste à prendre du plaisir. La pression est sur nous, les joueurs qui avons plusieurs années en pro et qui devons t'accompagner. C'est merveilleux ce qu'il vit, il est le seul 9 en plus. En plus, il travaille le petit ! Il faut le voir à l'entraînement, c'est un bosseur. Je sais qu'il va marquer et prendre du galon. Il est toujours au combat et il apporte, même quand il ne marque pas. Il mérite d'être là et il est sur la bonne voie. C'est un vrai attaquant qui a le sens du but. Estéban est monté crescendo aussi avant d'exploser à partir de janvier.
Vous êtes d'origine malgache mais vous ne jouez pas avec la sélection. Vous y pensez ?
Je suis éligible mais je me consacre d'abord à mon club. Madagascar fait un très bon parcours dans les qualifications pour le Mondial, je m'informe, je suis en contact avec le sélectionneur, j'ai une bonne relation mais c'est trop tôt. Même si le pays se qualifie pour la Coupe du monde, je ne pense pas venir parce que je ne veux pas profiter de la sueur des coéquipiers qui se sont battus pour cette qualification.
D'autres joueurs n'hésiteraient pas pourtant.
Je l'ai déjà dit au sélectionneur adjoint : si je viens, ce sera pour être à 100%. Là dans ma tête, c'est d'abord être performant avec Angers, avoir des stats. Je suis concentré là-dessus. Si Madagascar se qualifie, j'en serai très fier et je les supporterai devant ma télé. Il faut laisser la place à ceux qui le méritent, moi je me sens pas prêt.
Vous vous êtes fixé des objectifs chiffrés ?
Je ne vais pas les divulguer (rires). Mais oui, j'en ai et je sais de quoi je suis capable, même si c'est plus difficile dans une équipe qui défend beaucoup. C'est à moi de me transcender et ça va venir, je suis pas inquiet. J'aide l'équipe du mieux que je peux. Estéban est l'exemple à suivre : il n'était qu'à un but à la fin de la première partie de saison et puis il a gagné des minutes et explosé complètement.