Aujourd'hui, il joue pour Hajduk Split dans le championnat croate, mettant un terme à une carrière remarquable et époustouflante. Dans cet entretien exclusif, le milieu de terrain a abordé son expérience avec des entraîneurs légendaires, la nouvelle ère du FC Barcelone et de ses favoris pour le Ballon d'Or 2025.
Flashscore : Commençons par une question un peu difficile. Vous avez joué dans les équipes de jeunes de la Suisse avant de rejoindre la Croatie. Cette décision a-t-elle été difficile à prendre ?
Ivan Rakitic : Je ne souhaite cette décision à aucun jeune joueur. Pour moi, ce n'est pas une décision facile. La décision n'a pas été prise contre la Suisse ou la Croatie. C'est très difficile de prendre une telle décision quand on a 17 ou 18 ans. J'aimerais que l'UEFA et la FIFA rendent les choses plus faciles pour ces joueurs, car ces décisions, lorsqu'elles sont prises, s'accompagnent d'une grande pression, et ce n'est pas facile. Je ne souhaite cela à personne. En fin de compte, pour moi, la décision a été prise en fonction de ce que mon cœur me dictait. Et mon cœur m'a dit que je voulais jouer pour la Croatie, et c'est pourquoi j'ai fait ce changement à la fin. Mais c'était une période très compliquée. J'espère qu'aucun jeune joueur n'aura à vivre cela, car ce n'est pas facile.
Luis Enrique a mené le PSG en finale de la Ligue des champions cette année, transformant une équipe autrefois pleine d'égoïsmes en une équipe cohérente et performante. Vous avez travaillé avec lui à Barcelone pendant une autre période de turbulences. Quel est son secret ?
C'est lié à ce que vous avez dit dans votre introduction, à savoir à quel point Luis Enrique est fort. Pour moi, ce n'est pas une surprise de voir le PSG atteindre la finale. Leur meilleur joueur partait, mais qu'ils allaient devenir une meilleure équipe. Même si Mbappé est parti, il avait un plan très clair au départ. Quand j'ai reçu son premier appel, avant de signer à Barcelone, j'ai demandé à pouvoir lui parler et il m'a tout expliqué très clairement dès le premier appel. C'est un entraîneur qui, avant de faire le premier pas, a déjà préparé le second. Pour lui, il est évident qu'il n'y a pas de hasard. Ce n'est pas souvent que l'on voit un entraîneur qui travaille aussi dur et qui a des idées aussi claires. Je dois donc féliciter le PSG d'avoir atteint la finale de la Ligue des champions. Ils ont eu des difficultés au début, mais ils ont grandi dans la compétition et ils méritent d'être en finale.
Comment voyez-vous la finale de la Ligue des champions entre le PSG et l'Inter?
Je pense que Luis Enrique et le PSG ont énormément progressé. Avec les matches qu'ils ont joués récemment, ils sont clairement favoris pour remporter le titre. Mais dans une finale, il est très difficile de parler de favori, car l'Inter a fait du très bon travail pour être là aussi.
Le PSG semble peut-être un peu plus fort maintenant, mais l'Inter a montré ce dont elle était capable contre Barcelone. Je suis sûr qu'ils chercheront à se venger de la finale qu'ils ont perdue il y a quelques années contre Manchester City. Ce sera donc probablement un match très difficile. Ils vont se livrer une lutte acharnée. Ils vont vivre un grand match et que la meilleure équipe gagne.
Lamine Yamal est déjà comparé à Messi et Neymar à seulement 17 ans. Que pensez-vous de son ascension et de ses chances de remporter le Ballon d'Or ?
Je suis très heureux que l'on parle d'un jeune de 17 ans. Cela nous montre que ce n'est pas une question d'âge. On y est ou on n'y est pas. S'il avait atteint la finale de la Ligue des champions, je pense que nous n'aurions aucun doute sur le fait qu'il remporterait le Ballon d'Or cette année. Même s'il s'agit d'une récompense individuelle, les titres comptent aussi. Ensuite, il y a Ousmane Dembélé avec la finale de la Ligue des champions, surtout avec la façon dont il joue dans le dernier mois, je pense qu'il est aussi un possible vainqueur. Je pense que c'est une question de deux ou trois, peut-être sept, huit ou dix candidats.
Alors, que ce soit Dembélé ou peut-être même Pedri, quel que soit le vainqueur, ce sera une bonne décision. Pour moi, il est le favori. Je pense qu'il est plus facile de le dire de l'extérieur maintenant".
Que pensez-vous de sa comparaison avec Messi ?
Je pense que tout le mérite revient à Lamine Yamal pour ce qu'il fait. Nous sommes tous d'accord pour dire que c'est inhabituel pour un jeune de 17 ans. Tout d'abord, il n'y a pas lieu de le comparer à qui que ce soit, surtout parce qu'il n'y a pas de comparaison possible avec Messi. Nous savons tous que 99 % d'entre nous sont d'accord pour dire que Messi a été le meilleur joueur de tous les temps et pour nous tous. Je peux dire que je suis plus que fier d'avoir partagé tant d'années avec lui. Messi fait partie de l'histoire de chacun d'entre nous et nous devons être reconnaissants de pouvoir profiter de lui. J'espère qu'il jouera encore quelques années. J'espère qu'il continuera à jouer pour l'équipe nationale afin que nous puissions l'apprécier. Lamine Yamal doit construire son propre chemin et sa propre histoire, et il le fera. Laissons-le s'amuser et danser sur le terrain comme il le fait. Nous devons aussi l'apprécier. Il laissera l'héritage qu'il voudra bien laisser. Laissons-le continuer à danser et à porter deux, trois ou cinq paires de lunettes après avoir remporté le titre. C'est ce que nous attendons de lui, qu'il soit heureux et qu'il écrive sa propre histoire. Les jeunes n'ont pas besoin de pression, ils ont besoin de soutien.
Sous la houlette de Hansi Flick, le Barça a pratiqué un football magnifique cette saison. Qu'est-ce qui a changé et quel joueur s'est le plus distingué ?
L'évolution de Flick a clairement commencé avec Xavi. Xavi a amené tous ces jeunes joueurs qui font progresser Barcelone. Je pense que ces jeunes joueurs ont été très importants. Xavi a été un entraîneur qui leur a donné l'opportunité et leur a appris ce que cela signifie vraiment d'être un joueur de haut niveau de Barcelone ou quelles sont les exigences. En fin de compte, je dois féliciter le président du Barça, Joan Laporta, parce que c'était à 100 % la bonne décision d'engager Hansi Flick, même si j'aurais aimé que Xavi continue un peu plus longtemps. Cette saison, les jeunes joueurs ont progressé semaine après semaine. Tout le monde est heureux de voir qu'il y a une évolution très claire.
Pedri a été jusqu'à présent un très bon joueur, et c'est ce qui fait la différence. Quand on regarde les statistiques, Pedri apparaît partout. Physiquement, il a été au top niveau toute la saison. Cela est dû au nouvel entraîneur et au personnel qui ont géré tous les détails pour que Pedri soit en mesure de réaliser des performances incroyables en septembre, en décembre, en mars et maintenant en mai. Flick et son staff ont fait un très bon travail pour tirer le meilleur de chaque joueur.
Quelle est la clé des progrès de Barcelone cette saison, et de quoi ont-ils besoin pour l'année prochaine ?
Je pense que ce qui est fascinant, c'est la cohésion de l'équipe. Je pense qu'il y a environ 16 joueurs qui jouent au plus haut niveau. C'est bien de voir qu'il n'y a pas de problème d'égo. Cette force d'unité est très importante dans les grandes équipes. Je pense qu'il est important d'avoir une équipe saine qui s'entraide, et c'est ce que Barcelone a fait, en plus d'avoir des qualités individuelles incroyables. C'est un mélange de joueurs très expérimentés comme Inigo Martinez, Lewandowski, Raphinha, Ter Stegen et Szczesny. Ils ont réussi à amener ces jeunes joueurs à un niveau incroyable. Flick a fait un excellent travail en les amenant à être aussi forts qu'ils l'ont été, en particulier au cours des derniers mois. Ce sera la clé pour la saison prochaine, car lorsque vous gagnez, lorsque vous êtes en haut de l'affiche, il est beaucoup plus difficile de rester en haut de l'affiche. Je pense que ce sera la clé de la saison prochaine. Ils doivent continuer à être ensemble et ajuster quelques détails, comme ce qui se passe contre l'Inter, par exemple. On ne peut pas marquer sept buts contre soi en demi-finale, ce sont des détails mineurs qui doivent être corrigés. Mais c'est une équipe jeune qui va continuer à grandir. Et si elle parvient à rester soudée, je pense qu'elle aura une grande équipe pendant de nombreuses années.
Qu'est-ce qui rend les jeunes joueurs de Barcelone si spéciaux et quelle est l'importance de la Masia ?
Cela a probablement beaucoup à voir avec cela. Ce n'est pas une coïncidence. Après la grande génération de Xavi, Andrés Iniesta et Messi, il y a une autre génération comme celle-ci et cela a probablement beaucoup à voir avec ce qu'on leur enseigne quand ils sont très jeunes. Il ne s'agit pas seulement de trouver la qualité et le talent. Il ne s'agit pas seulement de trouver de la qualité et du talent, mais aussi de ce que vous leur donnez en termes de développement. Combien de fois avons-nous vu des joueurs au talent incroyable qui n'ont pas réussi à s'imposer ? Pour un joueur comme Lamine Yamal, avoir 100 matches officiels à 17 ans et être champion d'Europe avec l'Espagne, c'est incroyable. Nous devons donc féliciter La Masia pour son travail, et je suis très heureux que vous ayez posé la question, car il est facile d'aller sur le marché, de signer un joueur et de dépenser beaucoup d'argent. Mais les jeunes de l'académie ont cette relation entre eux parce qu'ils se connaissent depuis de nombreuses années.
Vous avez fait partie de la génération dorée du FC Barcelone. Y a-t-il des joueurs d'aujourd'hui qui pourraient faire partie de cette équipe ?
Probablement beaucoup. Il est vrai que nous avions un groupe incroyable, surtout les premières années. Les années 2014-2016 ont été parmi nos meilleures années et le fait est qu'il est très difficile d'intégrer quelqu'un dans cette équipe. Cependant, les bons joueurs sont toujours les bienvenus et ils peuvent nous aider. On m'a demandé s'il y avait de la place pour Lamine Yamal. Si vous êtes en concurrence avec Messi, il n'y a de place pour personne. Mais nous aurions trouvé un moyen d'intégrer Lamine Yamal, Pedri ou, en ce moment, Íñigo Martínez, tous ces joueurs. Ce sont tous des joueurs incroyables. Je pense qu'il est important de ne pas faire trop de comparaisons, aussi. Je veux que ce Barcelone écrive sa propre histoire. J'espère qu'il gagnera plus de titres que nous, pour le bonheur de tous les supporters. C'est ce que nous voulons tous. Bien que nous ayons vécu des moments incroyables, je suis très fier d'en avoir fait partie. Mais cela n'a pas été facile.
Xabi Alonso est sur le point de prendre les rênes du Real Madrid après son succès à Leverkusen. Comment pensez-vous qu'il s'en sortira en Espagne ?
"Je pense que ce sera intéressant à voir. Nous sommes tous d'accord pour dire que nous nous attendons à un Madrid très différent avec Xabi Alonso, notamment en raison de sa façon de comprendre le football. Je pense qu'il sera un entraîneur très différent de Carlos Ancelotti. Ce n'est ni mieux ni pire, c'est juste différent. Mais vous avez vu comment Leverkusen a joué, ou l'évolution qui a eu lieu dans l'équipe au cours des deux dernières années à Leverkusen. Il est également évident que c'est différent d'entraîner le Real Madrid. Il le sait mieux que quiconque et nous verrons comment il peut apporter sa vision du football à Madrid.
Je pense que le Real Madrid va faire un grand bond en avant l'année prochaine parce que je pense qu'Alonso est déjà l'un des meilleurs entraîneurs du monde, non seulement en raison de sa façon de comprendre le jeu, mais aussi de la façon dont il gère un groupe. J'ai entendu beaucoup de choses en Allemagne, des choses fantastiques à son sujet, et cela peut faire la différence. Nous verrons également dans quelle mesure ils le laisseront travailler à Madrid. J'espère qu'il aura autant de liberté qu'à Leverkusen. En fin de compte, ce sera bon pour le monde du football, même s'il est dans l'autre équipe. Mais je lui souhaite vraiment bonne chance.
