Flashscore : Jamais un boxeur ou une boxeuse français n'avait été intronisé au Hall of Fame de son vivant. Vous êtes donc la première à nous raconter l'événement de l'intérieur.
Anne-Sophie Mathis : Cela a duré 5 jours avec toujours un événement prévu. On nous a présenté à l'extérieur du musée de la boxe, on a raconté notre parcours. Une amie venue avec moi me traduisait, elle m'a aussi aidé pour l'écriture du discours. Les fans venaient nous écouter avant de nous faire signer des autographes. Je ne sais pas combien j'en ai fait, parce qu'à fois ça durait 2 ou 3 heures. C'est sympa mais ça peut devenir long (rires). On a aussi pris l'empreinte de notre poing dans une sorte de pâte mais je n'ai pas pu voir le résultat final, le temps que ça sèche, les cérémonies sont finies. En revanche, j'ai pu voir celle de Mike Tyson et la sienne fait quasiment le double de la mienne (rires). C'est vraiment impressionnant. On est aussi intervenu dans des écoles pour parler de nos parcours aux enfants de Canastota où il y a eu deux champions de monde, ce qui explique la présence du musée dans cette ville. On a aussi eu droit à une parade des champions juché dans des cabriolets décapotables. Il y avait énormément de monde, avec une présentation pour chacun d'entre nous.

Comment est-on désigné pour être intronisé ?
Ce sont des journalistes et des historiens de la boxe qui choisissent. D'ailleurs, même s'ils sont évidemment moins nombreux, il y a des commentateurs, des managers, des promoteurs. Ça remonte au XIXe siècle jusqu'à aujourd'hui et c'est vraiment impressionnant de se retrouver au milieu de tous ces très grands noms.
C'est une reconnaissance immense, le témoin de l'image que vous avez laissé chez les fans de boxe.
Sur le coup, je me suis demandée sur quoi ils se fondaient. Certes, j'ai gagné 23 combats avant la limite sur 27 pour 4 défaites. Il y en a d'autres qui ont réalisé de grandes choses aussi et qui n'y sont pas. Mais j'ai aussi gagné contre 3 Américaines comme Holly Holm qui a été intronisée en 2022, j'ai battu Myriam Lamare avant la limite. Quand je fais le détail de mes victoires, je m'en rends compte mais il a fallu que je réalise que j'étais intronisée au Hall of Fame.
Votre intronisation est inédite en France. Avez-vous été accompagnée par des media français ?
Non, personne n'est venu. Cela a été relayé par téléphone. En France, on a du mal à reconnaître les sportifs, mis à part au football, comme on a pu le voir avec le PSG. Or la boxe a tendance à s'effrondrer chez nous, ce n'est plus vraiment médiatisé et l'échelle s'est rapetissé.
Est-ce que le manque de médiatisation de votre intronisation s'explique parce que vous êtes une femme ?
Peut-être. Mais je suis même carrément sûre que si ça avait été un homme, cela aurait été beaucoup plus relayé. On a l'impression que, quand il s'agit d'une femme, on fait un petit truc pour faire mine de. En comparaison, la Mexicaine Kika Chávez a été intronisée avec moi, une télévision de son pays l'a suivie partout. Je crois que si on relaie dans les media, le public suivra. Regardez le football féminin : il est de plus en plus suivi parce que les chaînes en ont diffusé à heures de grande écoute. C'est beau à regarder et même si c'est différent, c'est sympa à suivre non ? De ce que j'ai pu en voir, dans le moindre bar, il y a plusieurs écrans de télévision, des bornes pour parier. On a l'impression que les Américains regardent du sport toute la journée.
Manny Pacquiao n'était pas le seul à faire partie de la promotion 2025 mais il est une superstar : cela aurait pu faciliter les choses de partager cet honneur avec lui ?
C'est très à l'américaine en plus. Il faut le vivre parce que c'est grandiose, à l'image de ce qu'on peut imaginer des États-Unis. Tout est fait en grand.

Vu les événements qui secouent le pays, notamment à Los Angeles, y a-t-il eu une sécurité renforcée autour de vous ?
Oui, d'autant plus qu'il y avait Pacquiao ! Il y avait l'armée, la police, le SWAT et une autre unité. Quand Manny est arrivé, le SWAT l'a accompagné et là, ça bougeait pas (rires). Exactement comme dans une série ou un film ! J'ai même pris des photos avec eux, pour le souvenir.
Et vous avez reçu l'objet le plus icônique du sport US : une bague personnalisée !
Elle est représentative de tout mon parcours, tout mon travail. Ça se passe le dernier jour, lors de l'intronisation officielle devant le public. On a chacun eu un long de discours d'une demi-heure voire une heure car certains avaient vraiment beaucoup de choses à dire (rires). Au moment de la remise, on prend une photo de groupe et on nous explique que c'est une photo de famille, un signe de reconnaissance, et qu'on est chaque année les bienvenus pour accueillir les nouveaux membres, avec évidemment une nouvelle expérience, plus en retrait.
Elle est très clinquante en tous cas !
Il y a un diamant au milieu entre deux gants de boxe placés l'un contre l'autre. Il y a écrit Intenational Boxing Hall of Fame d'un côté et mon nom de l'autre. Mathis, ce n'est pas long, je me demande d'ailleurs bien comment ils font avec les noms à rallonge (rires). Et puis il y a l'inscription International Hall of Fame.

Vous avez une plaque au musée également ?
Oui, comme Georges Carpentier et Marcel Cerdan qui l'ont eu avant moi. C'était très émouvant... C'est fou de se dire que c'est moi la suivante et que depuis Cerdan, il n'y avait eu personne. Vraiment, être intronisée au Hall of Fame, c'est incroyable quand on y pense.