Le weekend de Neymar a failli être parfait, mais il n'a pas aimé la fin du film du dimanche soir. Vendredi après-midi, il a reçu d'excellentes nouvelles en provenance du tribunal de Barcelone où se tenait la fin du procès qui oppose la société DIS à une multitude de personnes impliquées dans le transfert du Brésilien de Santos au Barça en 2013. Ce n'est pas la première fois que ce transfert provoque un procès. En 2014, Sandro Rosell avait dû démissioner de son poste de président du club blaugana car le montant réel, estimé à 107M€ bonus compris par la justice espagnole, avait sous-évalué à 51,7M€, Le Barça s'en était sorti en versant 5M€ au fisc catalan.
Ladite société, détentrice de 40% des droits du Ney à cette époque-là, considérait que les négociations ayant abouti à l'arrivée du joueur chez les Culés constituaient un cas de corruption entre particuliers. Traduction : DIS estime avoir été lésé malgré un retour sur investissement estimé à 500% par la défense, et réclamait un compensation sonnante et trébuchante, en plus d'une peine de prison de 7 ans pour Neymar. Encore fallait-il prouver ces allégations. DIS n'y est pas parvenu.
En effet, le ministère public a annoncé renoncer à toute poursuite à l'encontre des Neymar père et fils, quelques jours après en avoir fait de même avec la mère. Venu dans la cité comtale à l'ouverture du procès dès le lendemain de la victoire contre l'OM (1-0), Neymar avait comparu à la barre pendant quelques minutes pour répéter qu'au moment de son départ du Peixe, il signait les papiers et contrats que son père lui demandait de signer, sans chercher plus avant la teneur exacte de leurs contenus. Rien de nouveau sous le soleil et suffisant pour l'exonérer.
La preuve par Troyes
Le samedi après-midi, malgré la belle résistance de Troyes au Parc des Princes, le PSG l'a emporté (4-3) avec une passe décisive magnifique pour Carlos Soler et un but chirurgical du Brésilien. De quoi embellir encore davantage un début de saison idyllique avec 10 buts et 8 passes décisives en Ligue 1. Irrésistible comme il ne l'a plus été depuis fort longtemps, complémentaire d'un Leo Messi retrouvé et d'un Kylian Mbappé au diapason, Neymar est en mission pour arriver dans les meilleures conditions au Mondial et faire remporter à la Canarinha sa 6e Coupe du monde, 20 ans après la dernière.
A 30 ans, le Brésilien tient une forme physique éblouissante et, peut-être pour la première fois au PSG, voire au Barça, il est capable d'attaquer et de défendre tout à la fois. Une influence collective et un volume de jeu quasi-inédits pour lui qui ressemble à une prise de conscience.
Bolsonaro, une passe trop appuyée ?
Mais il n'y aura pas eu de triplé. Dimanche soir, le numéro 10 parisien n'a pas suffi pour faire gagner le 22 brésilien. Avec un écart de 2 millions de voix, Lula da Silva est redevenu le président du pays. Pas de deuxième mandat pour Jair Bolsonaro, le grand favori de Neymar qui avait pleinement apporté son soutien au candidat sortant toujours aussi controversé. "Ce qui m'a motivé à exprimer mon opinion, ce sont les valeurs que le Président incarne. Ce sont les mêmes que les miennes, celles de ma famille, avait-il expliqué. Il défend le peuple, les enfants, la famille. C'est important de se positionner. J'appelle d'ailleurs ceux qui hésitent à le faire. C'est un droit, c'est important d'exprimer ses valeurs. Moi, je suis fier de faire ça". Pas un hasard si Bolsanaro a instrumentalisé le maillot de Seleçao comme symbole nationaliste pendant la campagne. En revanche, cela n'aurait pas beaucoup plu à une grande partie du vestiaire de la Seleçao qui avait décidé qu'aucun joueur susceptible d'aller à la Coupe du Monde ne devait prendre position pendant la campagne.
Néanmoins, cette allégeance à l'égard du président était-elle trop voyante pour être totalement véridique ? En 2015, il a été accusé d'évasion fiscale par le fisc brésilien pour une somme de 35 M€, ramenée à 1,5 M€. Le père du joueur avait obtenu un entretien en avril 2019 avec Bolsonaro et Paulo Guedes, le ministre de l'économie. Accord à l'amiable à la baisse contre soutien appuyé : voici le pacte qui aurait pu être négocié pour faire baisser drastiquement la note. Par ailleurs, Bolsonaro avait apporté son soutien à Neymar en 2019 lorsque celui-ci avait été accusé de viol.
Lula n'avait pas hésité à répliquer et à donner son avis, avec une allusion au procès qui se tenait à Barcelone dans le même temps. Pour lui, le joueur du PSG a forcé le trait pour une raison pécuniaire : "Neymar a le droit de choisir qui il veut comme président. Je pense qu'il a peur que, si je remporte l'élection, je saurai que Bolsonaro lui a pardonné sa dette d'impôt sur le revenu. Je pense que c'est pour cela qu'il a peur de moi. Il est évident que Bolsonaro a passé un accord avec le père de Neymar. Maintenant, il a des problèmes fiscaux en Espagne. C'est un problème qui relève de l'agence de recouvrement des impôts, pas de moi".
Profil bas
Le premier mot de Neymar après la défaite de Bolsonaro au 2e tour de l'élection présidentielle a été pour le tribunal de Barcelone. Convoqué par visio-conférence lors du dernier jour du procès intenté par DIS, Neymar est passé en coup de vent. Comme son père quelques instants auparavant, il a répondu "non" à la question de savoir s'il voulait ajouter des détails à la plaidoieries des avocats. Premier épilogue d'un procès où il ne risque plus rien du tout, à l'instar de l'essentiel des accusés, hormis peut-être Sandro Rosell, ex-président du Barça déjà passé par la case prison pour un cas de blanchiment d'argent dont il a été ensuite été absous après deux ans en préventive.
Suspendu contre la Juventus, "Ney" devrait faire son retour avec le PSG au Moustoir contre Lorient dimanche (13h). Pour l'heure, il ne s'est toujours pas exprimé sur la défaite de son favori. Cependant, sa prise de position a entaché sa cote de sympathie dans son pays, alors qu'il avait annoncé vouloir dédier son premier but au Mondial à Bolsonaro. Personnage clivant aux 180 millions de followers sur les réseaux sociaux, Neymar a pris le risque de s'afficher avec un homme populiste tout sauf consensuel. La seule manière pour lui de redorer son blason et de guider la Canarinha vers le titre mondial. Peut-être sa dernière chance de côtoyer Pelé, Garrincha, Ronaldo et Ronaldinho, mythes auriverdes qui ont tous accédé au panthéon du football.