Avant l'affiche de la Première Ligue entre l'OL Lyonnes et le Paris Saint-Germain ce samedi à 21h, Paul-Hervé Douillard, directeur de la Ligue féminine de football professionnel, a fait le point avec Flashscore sur les différents sujets concernant le championnat féminin, qui entre dans sa deuxième saison en tant que championnat professionnel.
On est à quelques heures de l'affiche du championnat entre l'OL Lyonnes et le Paris Saint-Germain. Qu'est-ce que ça représente pour vous ?
Pour nous, c’est d’abord un choc sportif du championnat avec deux équipes qui sont qualifiées pour la Ligue des Champions et donc avec des effectifs conséquents. On espère aussi que ce sera une bonne fête à destination du public, dans un grand stade avec des animations avant le match, pour vraiment montrer que l'Arkema Première Ligue c'est un spectacle à destination des familles. Et donc pour nous c'est un produit d'appel qui est important.
Au niveau sportif, c’est un match qui perd un peu son côté choc, puisque les résultats sportifs dernièrement sont largement à la faveur de Lyon et que l’effectif du PSG s’est amoindri, il y a moins de stars ou d’internationales françaises… C'est embêtant qu'un club comme le PSG perde un peu ce côté grand rival de l’OL ?
Personnellement je pense que le PSG est dans une logique de projet à court et long terme. Si vous regardez leurs derniers recrutements, ce sont quand même des joueuses de haut niveau. Il y a une championne du monde, une vice-championne olympique, la meilleure joueuse de la CAN. J’ai le sentiment que PSG essaie aussi d'allier des joueuses internationales et des joueuses émergentes de leur centre de formation, afin d'être efficaces dans ce domaine également. Mais attendons de voir avant de juger le PSG. Je pense que dans les mois à venir, vous verrez qu'ils sont toujours aussi ambitieux.
L'OL Lyonnes a beaucoup misé sur ces matchs à domicile au Groupama Stadium, a mis pas mal de moyens aussi cette année sur la communication… Vous, du point de vue de la Ligue, comment vous percevez cette émancipation de l'OL masculin, mais de l'autre côté, le renforcement de l'identité de l'OL Lyonnes ?
À notre niveau, on pense que c'est une bonne chose, parce que c'est un club qui multiplie son engagement pour promouvoir le football féminin et le développer. C’est également un club qui met des moyens dans des domaines plus larges que le sportif. On a besoin désormais de réaliser une meilleure promotion du championnat, de proposer une meilleure "fan expérience" afin de conquérir un nouveau public. Vous avez par ailleurs constaté qu’il n’y pas uniquement l’OLL dans cette démarche, puisque l'Olympique de Marseille aussi est en train de s'engager dans cette voie-là. Et je pense que c'est important parce que ça permet vraiment de clarifier le produit, d'amener de la fraîcheur et des nouveautés dans le championnat.
À notre niveau, nous allons également investir plus fortement sur nos réseaux sociaux, sur les contenus gratuits à destination du grand public, pour vraiment améliorer la notoriété de notre produit. On est dans la même logique que l’OL Lyonnes.
Et donc, cette volonté globale de la Ligue, pour l’instant reste plus à l'échelle de la Ligue, et les clubs font plus ou moins ce qu'ils peuvent ?
Je pense qu'il y a beaucoup de clubs engagés dans ce dispositif de promotion et de valorisation du produit. Vous avez constaté cette année qu'il y a de plus en plus de clubs qui "événementialisent" des matchs dans des grands stades… On évoque ici, OL Lyonnes-PSG, mais nous avons démarré la saison avec OL Lyonnes-Olympique de Marseille et RC Lens/PSG, il y aura ensuite FC Nantes-Paris FC à la Beaujoire, Saint-Etienne-OM à Geoffroy Guichard… On voit qu'on arrive à diversifier les affiches, les événements et donc globalement les clubs continuent à investir dans le fait de promouvoir le championnat.
Et vous leur donnez des clés dans ce cas-là aux clubs, quand ils organisent des grands événements comme ça ?
Le premier pilier, c'était la construction du calendrier. On a demandé à tous les clubs les matchs qu'ils voulaient "événementialiser" afin de pouvoir les organiser dans les grands stades. On a aussi essayé de jouer sur les trêves internationales masculines, ce qu'on avait fait sur la première journée avec deux affiches, afin de mettre les clubs dans les meilleures dispositions.
Le deuxième aspect qu'on essaie de mettre en place et qu'on va renforcer cette année, c'est la création une émulation entre les clubs en partageant des bonnes pratiques, en permettant aussi de se comparer les uns aux autres avec des analyses chiffrées. Le troisième aspect, c'est l'animation des tribunes avec le label "Fan Experience" notamment. On va aussi travailler dans les semaines à venir sur des kits d’animation ou autres dans les tribunes à destination des supporters. Et puis le quatrième aspect, c'est qu'on essaie d'amplifier la création de ces événements avec notre agence de communication qui nous accompagne au niveau de la presse nationale.
Vous parlez du label Fan Experience qui avait été mis en place. Quels autres labels ont été mis en place pour inciter les clubs à faire plus ?
On a créé quatre labels, qui sont la marche au-dessus de la licence club. La licence club correspond aux minimums attendus dans la division, qui permet de générer des subventions de la fédération pour les clubs. Ces labels sont des « améliorants » dans quatre domaines stratégiques : la politique sportive comprenant la structuration des staffs, la politique de formation, le nombre de joueuses internationales de l'effectif, le nombre de joueuses internationales jeunes qui émergent de la formation et enfin la qualité des infrastructures mises à disposition des joueuses.
On travaille également sur la fan expérience, qui concerne les affluences moyennes à l'année, mais également l’animation des tribunes, les informations à destination des supporters, “l’évenementialisation” des rencontres, avant, pendant et après les matchs.
Le 3eme domaine est le label promotion et marketing : comment on génère des revenus sur les aspects commerciaux, c'est-à-dire les partenariats, comment on travaille sur les réseaux sociaux, comment on travaille à destination des médias.
Enfin le dernier label correspond à l’engagement sur le territoire : comment le club s'engage sur les questions sociétales et comment il s'engage aussi à développer la pratique féminine en mettant en place des actions à destination des clubs amateurs, des écoles et des associations.
Pour les quatre labels, on a des objectifs de moyens, c'est-à-dire comment on est « staffé », est-ce qu'on a des personnes qui travaillent là-dessus spécifiquement, est-ce que c'est de la mutualisation… Mais également, des critères d’efficacité : combien de personnes viennent au match, combien de publications sont réalisés les réseaux sociaux, combien de joueuses ont été formées pour le niveau international…
Et tous ces labels donnent le droit à un chèque ?
Oui, il y a 800 000 euros destinés à la valorisation de ces labels sur les deux divisions.
Si on prend par exemple le cas de la Women's Super League, en Angleterre, tous les thèmes soulevés par ces labels sont eux obligatoires.
Oui, on suit ce qui se passe dans les différentes ligues. La Women's Super League a cinq ans d'existence de plus que nous. Donc, c'est vrai qu'ils sont en avance de phase dans ce domaine. De notre côté, nous sommes dans une logique coercitive avec la licence club et incitative avec les labels pour permettre à chaque club de se structurer. À terme, certains critères des labels passeront dans la licence club.
Est-ce que cette année vous avez la sensation que vraiment tous les clubs du championnat jouent le jeu de prendre en compte leurs équipes féminines ?
Je pense que le paysage a bien changé en trois ans. Déjà si on compare la composition du championnat sur les 3 dernières saisons, il y a beaucoup de changements. Les clubs accédants depuis deux ans sont des clubs qui investissent dans le développement, que ça soit Nantes, Strasbourg, Lens et l'OM. Cela a permis d'accélérer le développement du championnat. Après j'ai tendance à penser qu’il y a toujours une réalité sportive et que les clubs qui n'investissent pas, ou pas assez, ne sont plus dans le championnat et ont tendance à descendre de division.
Donc il y a un mouvement qui est en cours, et il y a des clubs qui vont apparaître, d'autres qui vont malheureusement descendre, mais ça correspond aussi à des niveaux d'investissement ou à des niveaux de professionnalisation. C'est dans cet objectif que nous avions réformé la Seconde Ligue il y a trois ans maintenant avec le passage en poule unique, en souhaitant que les clubs accédants soient des clubs structurés, et qu'ils amènent une plus-value au championnat quand ils arrivent en Arkema Premiere Ligue. Je pense que c'est ce qui est en train de se passer.
On a un niveau qui se resserre cette saison encore en Première Ligue, avec des clubs comme Saint-Etienne qui ont augmenté leurs budgets alors qu’ils jouent le maintien. C'est une belle réussite de la Première Ligue…
Je pense que c'est très lié à ce qu'on vient d’évoquer, avec l’arrivée de nouveaux des clubs dans la Première Division. Et c'est vrai que malgré tout ce qu'on entend, les budgets des clubs évoluent à la hausse, les salaires des joueuses également, même si c'est encore sans doute insuffisant.
Il y a effectivement de plus en plus de clubs qui s'investissent fortement avec des ambitions à moyen terme. Saint-Etienne par exemple est un club qui, à moyen terme suite à l'arrivée de Tanenbaum au club, veut être européen. Marseille, qui vient de monter, a aussi pour objectif d’être européen dans les deux ou trois ans.
Donc on constate que ce sont des clubs qui arrivent avec des vrais projets à long terme. Et pour nous, c’est satisfaisant parce que le projet, il faut le développer de façon globale : il y a l'équipe première, mais il y a aussi ce qu'on met autour de l'équipe première, la qualité des infrastructures, de compétition, d’entraînement, les projets de formation… On a encore trois clubs qui vont déposer un dossier d'agrément pour les centres de formation. On sent que c'est un mouvement qui est en marche. Et j'ajoute qu'il y a aussi des projets très structurés en Seconde Ligue, et même bientôt en D3.
On en a parlé mais il y a aussi des projets intéressants chez les promus, avec l’OM qui veut être européen rapidement, Lens aussi et les Lensoises ont déjà joué un match à Bollaert…
L’OM s'est effectivement bien structuré, y compris dans le domaine administratif, pour favoriser le développement de la section féminine. Ils ont une grosse ambition sur l'identité visuelle. Ils ont fait tout de suite le choix de quitter le Campus pour aller jouer à Martigues. Ils sont sur une logique de formation des jeunes joueuses, ils ont fait venir Jérôme Dauba dans cet esprit-là… Ils ont une logique de développement à long terme qui est clairement une ambition européenne. Il y a la marque OM qui est aussi un élément important. Il y aura la réalité du terrain, mais on sent que c'est un club qui s'inscrit dans la durée. C’est la vision de Frank McCourt, portée par Pablo Longoria.
Lens, ils ont reçu le PSG dès la première journée, ça faisait partie des sujets dans la construction du calendrier, afin de mettre les joueuses dans de belles conditions. Ils travaillent actuellement à l’organisation de la Sainte Barbe avec Lens-ASSE à Bollaert. Ils ont aussi changé de stade de compétition, pour aller à Avion (Pas-de-Calais), qui est un stade avec une pelouse hybride de grande qualité. Ils peuvent recevoir près de 5 000 spectateurs. Les conditions d'entraînement des joueuses à la Gaillette sont de haut niveau. Ils souhaitent créer un bâtiment supplémentaire pour les féminines. Le recrutement de Laurie Dacquigny sur la formation s’inscrit dans la même dynamique, au même titre que la nomination d’Andreea Koenig comme présidente de la section féminine. Si on n’a que des promus comme ça, on est plutôt gagnant.
À l'inverse, il y a pas mal de joueuses qui sont parties cet été, et par exemple, si on prend le cas de Grace Geyoro, qui est une internationale française, elle a préféré quitter le PSG pour aller à London City Lionesses, un promu de la Women's Super League en Angleterre. Au niveau de l'image de la Première Ligue, ce n'est pas top.
On peut le voir comme ça car c’est une réalité, il y a une top joueuse du championnat qui est partie dans un championnat étranger. A contrario nous avons aussi des tops joueuses de championnats étrangers qui sont venues dans le nôtre, à l’OL Lyonnes ou au PSG notamment (Brand, Yohannes, Ajibade, Carmona…)
On a un football féminin qui se développe dans de plus en plus de pays, qui est donc en train de s'internationaliser. On commence également à avoir des transferts payants de plus en plus fréquemment. Et donc, c'est sûr que cela va accélérer le flux de joueuses entre les différents championnats C'est un mouvement qui ne va pas s’arrêter, dans les deux sens d'ailleurs. Mais je pense que c'est lié aussi au développement global du foot féminin.
Oui, mais ça reste un promu de la Women's Super League qui, lui, a les moyens de prendre les meilleures joueuses du championnat de France.
Oui, mais ce n'est pas n'importe quel promu (le club de London City Lionesses appartient à Michele Kang, présidente et propriétaire de l’OL Lyonnes, ndlr). Et après, ça peut être aussi des choix de joueuses, de découvrir un nouveau championnat. Je pense que ça fait partie aussi maintenant de leur métier. C'est donc à nous de mettre en place des dispositifs pour les garder, mais également pour faire venir des stars internationales dans notre championnat. Enfin, il nous faut favoriser l’émergence des nouvelles joueuses françaises pour pouvoir avoir des nouvelles stars dans le championnat. En ce sens, on voit de très jeunes qui sont responsabilisées, y compris dans les 3 clubs européens. Ce seront peut-être sans doute les stars du championnat de demain.
Le dispositif "Joueuses Formées Localement" qui a été mis en place cette saison et va monter en puissance dans les quatre années à venir. Il va contraindre les effectifs des clubs à avoir un certain nombre de joueuses formées au club et un certain nombre de joueuses formées en France, qu’il faudra conserver dans les effectifs. Donc ça aussi, normalement, ça devrait permettre de pouvoir faire émerger des nouvelles joueuses et de mettre les moyens sur des joueuses françaises pour les garder dans le championnat.
Parmi les grosses questions soulevées avant le début de cette deuxième saison de la professionnalisation du championnat, il y avait celle de la convention collective, qui n’avait déjà pas été signée lors de la première année. Ça reste un gros point noir…
C'est un vrai sujet pour la LFFP, mais c’est la responsabilité des partenaires sociaux. Une convention collective doit être signée entre syndicats des joueuses et syndicats des clubs. A notre niveau, on s'investit aussi dans les échanges, très régulièrement, pour essayer de trouver des accords, des compromis, pour qu'on signe une convention collective dès que possible.
Mais les discussions concernant une convention collective prennent nécessairement du temps, on a pu le constater avec la convention collective du basket féminin issue de plus de 5 ans de négociations. Nous avons une ambition de la signer vite, mais personnellement, je ne peux pas prendre d’engagement, ni pour le syndicat des clubs, ni pour le syndicat des joueuses. Tout ce que je peux dire, c'est que les discussions avancent et les échanges continuent entre les acteurs. On souhaite qu'il y en ait une qui soit signée le plus rapidement possible car c’est un vrai marqueur de développement.
Est-ce que vous avez pu craindre à un moment donné qu'il y ait une grève des joueuses, comme ce fût le cas dans d'autres pays, au niveau de cette question de la convention collective ?
On a des échanges très réguliers et sains avec l'UNFP donc on est conscient des problématiques et des enjeux. Mais chacun est dans un esprit constructif. J’espère qu'il y a des solutions qui vont être trouvées sous peu. Je sais que Vincent Ponsot qui vient d'être élu à Foot Unis Féminin est très investi sur la question. Il y a des réunions à venir avec l'UNFP. Donc je pense que tout le monde est dans une volonté de trouver une solution. Une convention collective ça peut comprendre 60 points, 70 points, il en reste quatre ou cinq à régler.
Sur cette deuxième saison professionnelle de l'Arkema Première Ligue, vous parliez des labels qui ont été mis en place. Est-ce qu'il y a des leçons que vous avez tirées de la première et des choses que vous avez changées sur cette deuxième saison ?
Beaucoup forcément, car nous avons de nombreux chantiers en cours. La première chose qu'on a essayé de changer, c'était la construction du calendrier. On avait aussi la problématique du nombre de matchs joués qui étaient très disparates dans le championnat entre les équipes européennes et non-européennes et qui, à notre sens, n'allaient pas dans le sens d'un équilibre compétitif renforcé.
Donc, on a essayé d’y répondre avec la création de la Coupe LFFP, qui concerne les clubs de non-européens mais qui protège aussi les clubs européens puisque c'est une compétition qui est placée souvent entre deux semaines de Champions League. Et ça a été le cas d'ailleurs pour le Paris FC entre ces deux matchs de qualification en Ligue des champions. L’indice UEFA de la France est un élément important, donc il faut le protéger au mieux.
Prioritairement, je pense qu'on a un gros axe de progression concernant la promotion de la compétition. On doit travailler à augmenter la notoriété en touchant un nouveau public, mais également accroître l’expérience consommateurs en optimisant le produit, notamment le contenu gratuit via les réseaux sociaux et Youtube. On a donc des moyens à la hausse cette saison pour optimiser ces dispositifs. On est en train de terminer une consultation pour les sociétés qui vont nous accompagner dans ce domaine.
Sur la Coupe LFFP, il y a un intérêt pour les clubs, aussi bien sportif que financier, mais est-ce que vous considérez aussi du coup les intérêts des supporters, par exemple, ou même de la discipline ? Parce que finalement, c'est une compétition qui n'est pas diffusée et globalement, il y a très peu de communication autour de l'événement.
C'est vrai que le premier intérêt, c'est un intérêt sportif, de calendriers et d’émergence de nouvelles joueuses. Le deuxième sujet, c'est qu'on a souhaité que, pour différents sujets, que ce soit les clubs d'Arkema Première Ligue qui se déplacent dans les clubs de Seconde Ligue, donc ce ne sont pas des stades qui permettent toujours une diffusion. Sauf pour les clubs qui ont profité de ces matchs-là pour "événementialiser". Par exemple, pour la prochaine journée de la Coupe LFFP, il y a Le Mans qui va recevoir Lens, et qui va jouer en ouverture des 40 ans, avant le match des légendes du soir, au stade Marie Marvingt. Donc ce match-là, on pourra le diffuser.
Nous avions souhaité créer cette compétition pour que ça permette au club de Seconde Ligue de créer des événements autour de leurs matchs. Lille est aussi dans la même logique, puisqu’il jouera le derby contre Lens au Stadium en J3. Et il sera diffusé. Mais il faut qu’on soit très humble et donc c’est possible qu’on fasse autrement la saison prochaine pour répondre à ces difficultés de promotion.
L'intérêt de cette Coupe LFFP, elle n'est donc que pour les clubs et c'est plutôt assumé de la part de la Ligue ?
Pas que pour les clubs. Puisqu'à partir des quarts de finale, c'est une compétition qui sera diffusée, on est en discussion avec les diffuseurs. Les clubs peuvent effectivement créer de la promotion autour de ces matchs-là pour faire venir des supporters. Là où ce sera possible, on va réaliser des captations, de la production. Et peut-être qu'il faudra qu'on modifie un peu notre schéma dans les années à venir pour pouvoir augmenter la diffusion des matchs dès le premier tour. Donc ça demandera peut-être d'autres réflexions, soit sur les stades demandés pour la Seconde Ligue, soit pour la construction du calendrier et peut-être des alternances plus récurrentes entre la Seconde Ligue et la Première Ligue.
Et c'est un aspect aussi financier parce qu’en soi, le championnat aurait pu passer à 14 clubs mais il y a eu une préférence pour cette coupe-là.
Le non-passage à 14 clubs n’est pas réalisé sur un aspect financier. La Coupe a été créée dans un groupe de travail qui était constitué de la Ligue, il y avait le sélectionneur, le DTN des représentants de Seconde Ligue et Première Ligue et les syndicats. Après, maintenant, on essaie de mieux promouvoir la compétition, d'avoir un diffuseur, peut-être un "naming", mais ça n'a pas été fait dans un souci financier. La problématique était vraiment le calendrier des joueuses, la protection des clubs européens et l’équilibre compétitif de l’Arkema Première Ligue.
Si on regarde par exemple en Angleterre, à l'inverse, ils se posent la question de supprimer l'équivalent de coupe de la Ligue anglaise chez les filles. En France finalement on va contre ça…
Oui, la Ligue Anglaise a été professionnalisée 4-5 ans avant nous, donc ils sont maintenant dans une autre réflexion. Nous, c'est possible que dans 3-4 ans, ou 2-3 ans, on passe à 14 et qu'on se repose la question à ce moment-là. Pour l'instant, on avait deux enjeux.
Le premier enjeu, c'était l'équilibre compétitif de l'Arkema Première Ligue et le deuxième enjeu, c'était le calendrier des équipes. Donc, on a souhaité y répondre par une coupe dans la même logique que la Ligue anglaise, nous avons d’ailleurs échangé avec des françaises évoluant en Angleterre. Peut-être qu'effectivement, dans 3 ans, on aura 14 équipes qui seront très structurées. On pourrait alors réaliser un passage en 14 et moduler la coupe autrement. Il faudra toutefois prendre en compte les complexités du calendriers internationales, avec les fenêtres des sélections nationales, la nouvelle formule de la Ligue des champions et la Coupe du monde des clubs…
Quand le championnat professionnel a été lancé en France l'année dernière, il y avait l'objectif affiché de rattraper la Women's Super League. Aujourd'hui, vous jugez comment cet objectif et vous jugez comment le championnat de France se comparait à la Women's Super League ?
On constate qu'ils ont des audiences, des affluences qui ont augmenté très vite, notamment après le titre des Anglaises à l’Euro 2022. Bien sûr, ils ont un certain nombre d'équipes compétitives, notamment qualifiées en Ligue des champions, comme nous. Donc c'est un championnat qui est très fort en Europe.
Si je regarde notre développement à nous, on a augmenté les audiences, les affluences de plus de 140% en trois ans. On espère encore faire plus de 50% cette année pour arriver au niveau du championnat allemand. On a de plus en plus d'équipes qui arrivent avec des budgets en hausse dans le championnat et qui ont une ambition européenne à moyen terme.
On avait un gros sujet sur la qualité des pelouses, la qualité des stades qui avance positivement aussi notamment parce que les clubs jouent de plus en plus souvent des rencontres dans les grands stades. On a donc sur ces aspects-là un championnat qui continue à se développer. Ce sont des marqueurs qui sont importants et qui permettent aussi d'être attractifs au niveau de la qualité de l'infrastructure. Fleury, Strasbourg, Saint-Etienne et Nantes ont réalisé des travaux sur leurs sites d'entraînement pour améliorer les conditions. On sait qu'on a trois centres de formation qui vont s'ouvrir l'année prochaine. Donc on voit que les projets globaux avancent aussi.
Mais si on prend l'aspect financier, en France, les droits TV du championnat, c'est 1,5 million d’euros. C'est 65 millions de livres sterling en Women's Super League.
Oui, bien sûr. C'est vrai que c'est un sujet que je ne nie pas. Mais je pense que c'est un sujet qui ne concerne pas uniquement l’Arkema Première Ligue en France. Donc, on a aussi un sujet d'offres médias.
Mais on peut avoir d'autres atouts. Moi, je crois beaucoup à la qualité de la formation française et à l'émergence des nouvelles joueuses via les centres de formation. On a la chance d'avoir Michele Kang à l’OL qui est dans un club multititré au niveau européen. On a le PSG qui est sans doute une des plus grandes marques mondiales. On a la famille Arnault qui vient d'arriver au Paris FC avec des ambitions pour son équipe féminine. Il y a également Frank McCourt qui a des ambitions pour l’OM ou l’ASSE dont nous avons parlé. Donc on voit qu'on a un paysage qui change. Il faudra voir comment on retombe sur le côté session et vente des équipes féminines à des sociétés sportives féminines. Je pense que ça va amener un certain nombre d'investissements, mais aussi de savoir-faire parce que ça correspond à des investisseurs qui ont déjà développé des franchises féminines dans d'autres pays.
Vous parlez des clubs qui jouent le jeu et qui mettent plutôt un bon budget sur les féminines. A l'inverse, cet été, on a quand même aussi pas mal entendu parler des clubs qui ont voulu vendre, qui ont vendu leurs sections féminines : Le Havre, Montpellier, Dijon... Est-ce que vous pouvez nous faire le point un peu sur ces clubs-là ?
Il y a des ventes qui vont être opérées là, d’ici fin novembre. Mais sous différents schémas. C'est-à-dire qu'il y a parfois l'arrivée d'investisseurs qui permettent à un club de continuer à se développer, notamment pour des clubs qui ne sont pas en Ligue 1 et donc qui n'ont pas des revenus financiers qui permettent d'être performants des deux côtés, dans un championnat qui demande de plus en plus de budget chez les féminines.
C'est vraiment une volonté de permettre à la section féminine de poursuivre son développement sans que les difficultés masculines soient un frein. Il y a d'autres cas, avec l'arrivée d'un nouvel actionnaire, mais où l'équipe masculine garde des parts dans la société. Ce qu’on peut constater, c'est qu'on a été approché pendant l'été par une dizaine d'investisseurs. Ce qui prouve que notre championnat est attractif .
Je pense que c'est au bénéfice du développement du football féminin. Ce sont des investissements qui sont prévus sur 3-4 ans, avec vraiment l'envie d'investir pour avoir une logique de rentabilité dans un second temps. Cela aura nécessairement des effets positifs dans la structuration des clubs, le salaire des joueuses, la qualité des infrastructures, parce que ce sont des actionnaires qui viennent dans une logique de développement.
Vous parlez des clubs comme Montpellier, Le Havre… ?
Ou d'autres, l’avenir le dira. Mais il y a trois équipes qui sont en session, qui vont être vendues. Par ailleurs, il y a également des clubs qui ont refusé de vendre, Certains ont reçu des offres et ont refusé parce qu'ils sont dans une logique de mixité dans la même société. De notre côté, nous pensons qu'il n'y a pas un dispositif plus souhaitable qu’un autre. Les deux peuvent être complémentaires, justement, pour arriver à court terme à 12 équipes très compétitives, puis 14 voir 16, en Arkema Première Ligue.
On a parlé de la médiatisation du championnat. Vous dites que vous, du côté de la Ligue, vous allez faire de votre mieux pour proposer des formats gratuits…
Oui avec des formats courts parce que c'est désormais une façon de consommer, faire plus de reportages dans les clubs, être plus présent sur nos différents réseaux sociaux… Il y a également la qualité de nos diffusions YouTube qu'on essaie de continuer à améliorer. La qualité des stades le permet, on a mis en place un dispositif consultante, nous avons optimisé le dispositif de captation. Cette saison, on a doté les consultantes de stats en live pour améliorer la ligne éditoriale. Donc, on continue effectivement à vouloir développer ce produit.
Par exemple, sur la première journée, il y avait eu un multiplex. Est-ce que ce sont des choses qu'on pourrait revoir ?
Oui, on fera un multiplex sur la J11 autour de Noël avec Canal+ notamment. On a un certain nombre de temps forts qui vont permettre de jalonner la saison. Nous devrons également pour différentes raisons, notamment avec la qualification de nos 3 clubs européens, décaler des rencontres. On n'aura donc rarement 4 matchs à 17 heures le samedi pour réaliser un multiplex. C'était par exemple le cas sur la J2, puisque le Paris FC a dû jouer le dimanche, parce qu'ils avaient joué le jeudi en Coupe d’Europe.
Est-ce que le fait que la majorité des rencontres de Première Ligue soient diffusées sur YouTube, avec juste deux caméras, c'est un peu un problème pour la visibilité du foot féminin français ?
Cela permet quand même d'avoir une offre gratuite. Pour augmenter la notoriété, c'est plus simple. Nous avons d’ailleurs des audiences en forte hausse sur le début de saison. Par ailleurs, si les stades continuent à s'améliorer en ce sens on pourra augmenter aussi le dispositif de captation et renforcer la diffusion.
Ce sont les aspects que vous maîtrisez, mais sur la médiatisation externe du championnat, dans les différents médias sportifs, comment jugez-vous la façon dont on parle de la Première Ligue ?
J'ai tendance à penser qu'il faut qu'on se mette dans une position proactive. Donc on travaille pour rencontrer les médias, les alimenter beaucoup plus directement, pour qu'ils puissent vraiment amplifier le traitement du championnat. Je ne dis pas qu'ils ne devraient pas faire plus, mais malheureusement on ne le maîtrise pas. Donc c'est à nous d'être vraiment le plus proactif pour améliorer ce point.
Et j'ai une dernière question, sur les sponsors, parce que finalement, sur l'Arkema Première Ligue, on a Arkema. On a eu récemment BetClic, mais on n'a pas énormément de nouveaux sponsors qui sont arrivés depuis la professionnalisation. Est-ce qu'il y en aura d’autres ? Est-ce que c'est un sujet aussi en interne de réussir à "conquérir" d’autres ?
C'est un sujet qui peut s'expliquer de différentes manières. On avait besoin de s'organiser pour être meilleurs dans les aspects commerciaux. Mais surtout, je pense qu'avant de vendre un produit il faut d’abord le construire et le développer. En ce sens, les avancées évoquées depuis 2 ans sont importantes avec l’arrivée de nouvelles "marques" dans le championnat, un niveau moyen qui se resserre, des infrastructures qui se développent et des audiences et affluences qui augmentent.
On rentre dorénavant dans une phase de promotion, c'est-à-dire, comment on est meilleur pour promouvoir le produit. Il y a des contacts en cours, BetClic est arrivé, on a des échanges au sujet d’un partenariat autour de la Coupe LFFP. Tout ça est en train de se mettre en place et on a déjà eu des premiers résultats positifs. On travaille avec une agence pour se faire accompagner sur la stratégie commerciale. Et donc, on va pouvoir être plus performants dans les semaines à venir.