Exclu' - Asmir Begovic n'a pas célébré son but en 2013 "par respect pour le gardien adverse"

Asmir Begovic à l’œuvre avec Leicester.
Asmir Begovic à l’œuvre avec Leicester.ČTK/Graham Hunt

Désormais à Leicester, Asmir Begovic aborde la dernière phase de sa carrière de joueur après plus de 250 apparitions en Premier League. Le gardien bosnien a accepté de revenir sur son parcours pour Flashscore.

Dans cette interview exclusive, nous avons échangé avec Begovic sur ses années à Stoke et Chelsea, le but célèbre qu’il a inscrit, les meilleurs attaquants qu’il a affrontés, et bien plus encore.

Comment se passe la saison pour Leicester et pour vous personnellement ?

« C’est un peu en dents de scie, mais notre ambition est claire : retrouver la Premier League. Nous sommes toujours bien placés. La semaine dernière a été positive, nous avons pris sept points sur neuf, et nous abordons la période chargée de Noël avec l’envie d’accélérer encore. »

Après tant d’années dans le football professionnel, qu’est-ce qui vous motive encore à jouer ?

« J’aime toujours autant le jeu et l’ambiance d’un groupe. J’adore essayer de gagner et faire partie d’un projet qui réussit. Physiquement, je me sens encore capable, et si le projet et l’équipe me conviennent, je continue avec plaisir. La retraite dure longtemps, donc il n’y a pas d’urgence. »

Votre préparation physique a-t-elle évolué par rapport au début de votre carrière ?

« Oui, clairement. Les sciences du sport ont beaucoup progressé, ce qui nous aide à mieux prendre soin de notre corps. Avec l’âge, la récupération et l’activation deviennent plus importantes, et c’est un aspect sur lequel je me concentre beaucoup plus aujourd’hui. »

À Leicester, vous êtes principalement gardien remplaçant. Ce rôle implique-t-il de guider les plus jeunes ?

« Oui, il y a une part de mentorat. En tant que joueur expérimenté, je transmets volontiers mon vécu et j’aide les jeunes gardiens. Le leadership est aussi essentiel : montrer l’exemple contribue à la culture du groupe. »

Statistiques de Begovic depuis 2020
Statistiques de Begovic depuis 2020Flashscore

Avec le recul, quels moments ont été les plus marquants dans votre carrière ?

« Portsmouth a été déterminant. J’y suis arrivé à 16 ans et j’ai progressé étape par étape grâce à des prêts et différentes expériences. Stoke City, c’est là où je me suis imposé en Premier League et en sélection nationale. Chelsea, c’était le sommet, avec la lutte pour les trophées et la Ligue des champions.

« Ces trois clubs, dans cet ordre, ont été essentiels pour ma carrière. »

Vous êtes resté le plus longtemps à Stoke City. Quel regard portez-vous sur cette période ?

« J’en garde un excellent souvenir. C’était une période réussie et, d’une certaine manière, nous avons dépassé les attentes. Nous avions notre propre style, adapté aux joueurs, à la ville et aux supporters. Tout était aligné, et nous avons accompli de belles choses ensemble. »

Stoke était réputé pour son efficacité plus que pour le spectacle. C’est juste ?

« Nous étions très efficaces et engagés. Il y a plusieurs façons de jouer au football, et notre travail, notre solidarité et notre mentalité étaient remarquables. On se souvient des longues touches et des coups de pied arrêtés, mais nous savions aussi montrer de la qualité aux bons moments. »

Vous avez marqué un but depuis 92 mètres avec Stoke. Quel souvenir en gardez-vous ?

« C’était totalement inattendu. Quand on imagine marquer en tant que gardien, c’est plutôt un but égalisateur à la dernière minute, pas dix secondes après le coup d’envoi. Avec le recul, on se rend compte à quel point c’était rare et spécial. »

Vous n’avez pas vraiment célébré. Pourquoi ?

« Par respect pour le gardien adverse, et aussi parce que je ne savais pas quoi faire. Je ne suis pas du genre à exprimer de grandes émotions sur le terrain de toute façon. »

Passer de Stoke à Chelsea signifiait accepter un rôle de doublure. Comment avez-vous vécu ce choix ?

« Chelsea était champion, Jose Mourinho était l’entraîneur, et c’était l’occasion de me tester au plus haut niveau. Je n’ai aucun regret. C’est l’une des meilleures décisions de ma carrière. »

Qu’est-ce qui a été le plus difficile dans l’adaptation à un grand club comme Chelsea ?

« La pression. Chaque match comptait, tout était scruté, et le calendrier était infernal. Il fallait s’adapter très vite. »

Était-ce compliqué d’accepter de ne pas jouer chaque semaine ?

« Très difficile. J’étais au sommet de ma forme et je voulais jouer, mais lutter pour des trophées et faire partie d’un projet plus grand était une énorme motivation. »

Quel regard portez-vous sur Petr Cech, surtout en tant que successeur à Chelsea ?

« Pour moi, c’est le plus grand gardien de l’histoire de la Premier League. Le remplacer était un immense honneur et une grande responsabilité. J’ai un respect total pour ce qu’il a accompli. »

Quel est l’aspect le plus exigeant du poste de gardien en Premier League, le physique ou le mental ?

« Le mental est primordial. On est sous pression constante, et nos réflexes vont à l’encontre de la nature humaine : il faut aller vers le ballon, pas s’en écarter. Les exigences physiques sont aussi plus élevées que jamais, mais les fondamentaux et la répétition restent essentiels. »

Être gardien, c’est vraiment le meilleur poste du football ?

« Pour moi, oui. Réaliser un arrêt décisif à un moment clé, c’est la meilleure sensation du jeu. »

Combien de préparation demande le fait d’affronter des attaquants de haut niveau chaque semaine ?

« Beaucoup. On analyse les adversaires, on utilise la vidéo et les données, mais les grands joueurs sont imprévisibles. Au final, il faut se faire confiance et être prêt à tout. »

Quels ont été les attaquants les plus difficiles à affronter ?

« Cristiano Ronaldo à son meilleur niveau était parfois inarrêtable. Sergio Aguero était un cauchemar avec ses déplacements et sa finition. Luis Suarez, Fernando Torres, Andy Carroll... La Premier League était impitoyable. Chaque semaine, un nouveau défi. »

Begovic encaisse face à Sergio Aguero en 2015
Begovic encaisse face à Sergio Aguero en 2015PAUL ELLIS / AFP / AFP / Profimedia

La Premier League était-elle plus relevée pour les attaquants il y a dix ans qu’aujourd’hui ?

« En termes de variété et de profondeur, je suis d’accord. À l’époque, il y avait tellement de profils différents – Rooney, Drogba, Suarez, Aguero, Defoe, Crouch. Les attaquants étaient davantage au centre du jeu. »

Comment le rôle du gardien a-t-il évolué au fil de votre carrière ?

« Aujourd’hui, un gardien doit tout faire : relancer, couvrir l’espace, jouer haut. Mais une chose n’a pas changé : empêcher le ballon d’entrer. Les fondamentaux restent la base. »

Les gardiens sont-ils jugés plus durement aujourd’hui à cause des réseaux sociaux ?

« Absolument. Tout est analysé et partagé instantanément. On ne peut pas cacher ses erreurs, mais les bonnes performances sont aussi mises en avant. »

Les données et statistiques vont-elles parfois trop loin ?

« Elles sont utiles, mais on peut trop réfléchir. Au final, il faut rester naturel pendant 90 minutes. »

Qui est le meilleur gardien du monde actuellement ?

« Gianluigi Donnarumma. Il y a beaucoup de grands gardiens, mais sa régularité sur plusieurs années est remarquable. »

Quel est votre favori pour la prochaine Coupe du monde ?

« L’Angleterre. Ils ont un excellent sélectionneur et une grande profondeur d’effectif. Si tout le monde est en forme, ils seront parmi les favoris. »

Combien de temps pensez-vous encore jouer ?

« Je prends saison après saison. Peut-être que celle-ci sera la dernière, peut-être une de plus, on verra. »

Avez-vous déjà des projets pour l’après-carrière ?

« J’aime travailler dans les médias, je dirige des académies de gardiens et je m’intéresse à l’entraînement ou à des rôles techniques. Je veux rester dans le football. »

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes, pas seulement aux footballeurs ?

« N’abandonnez jamais votre rêve. Travaillez dur, soyez patients et croyez en vous. Il n’y a pas de chemin tout tracé, les choses arrivent quand elles doivent arriver. Faire ce qu’on aime, c’est essentiel. »