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Interview Flashscore - Pauline Peyraud-Magnin : "Gagner un titre avec les Bleues, j'y croirais toujours"

Interview Flashscore - Pauline Peyraud-Magnin : "Je rêve toujours de gagner un titre avec les Bleues"
Interview Flashscore - Pauline Peyraud-Magnin : "Je rêve toujours de gagner un titre avec les Bleues"Photo par MATTHIAS HANGST / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP

Après une élimination en quarts de finale à l'Euro cet été, l'équipe de France retrouve l'Allemagne lors de cette trêve à l'occasion des demi-finales de la Ligue des nations. Pauline Peyraud-Magnin, la gardienne des Bleues, s'est confiée à Flashscore sur la façon dont elle a encaissé cet échec, mais aussi sur ses nombreux espoirs pour la suite. À 33 ans, elle rêve toujours de gagner un titre avec la France.

Comment ça va ?

Ça va super. Ça va bien. On a repris le championnat il y a trois semaines nous, début octobre. Sinon, ça va, tout va bien. En règle générale, tout va bien.

La dernière fois que l’on s’est vu, vous ne trouviez "pas les mots" pour expliquer la défaite en quarts de finale de l’Euro. Aujourd’hui vous les avez ?

Non, j’ai l'impression que je n'ai toujours pas trop les mots. Sans vouloir se servir de ce match contre l’Allemagne à venir, je veux surtout repartir sur de bonnes bases parce que… Jusqu'à l'Allemagne on n'avait pas perdu de match et même dans le temps réglementaire, on n'a pas perdu de match. Je ne suis pas une personne qui parle trop du passé. Même aujourd’hui vous me demandez si j’ai les mots, mais non. Peut-être qu'avec le recul, peut-être que dans 10 ans on verra des choses qu'on n'avait pas vues. Mais pour l'instant, j'ai envie d'aller vers l’avant, de gagner. Je suis plus dans ce mood-là.

Vous avez revu le match ? 

Oui j'ai revu le match, plusieurs fois même. Il y a encore de la frustration un peu. On se dit que c'est dommage, il y a des faits de jeu, il y a tout. "C'est le foot", comme on dit. Il y avait beaucoup de frustration mais aujourd’hui c'est bon il faut passer à autre chose, sans oublier.

Comment vous avez réussi à digérer ça ?

Je pense que c'est avec l'expérience. On vit au jour le jour pour le foot, que ce soit dans la victoire comme dans la défaite. Je pense que c'est le fait de ne pas monter trop haut ni de descendre trop bas. Ensuite, moi, j'ai repris très vite le foot, ce qui m'a permis peut-être aussi de passer plus vite à autre chose. Parce que j'avais déjà des objectifs pratiquement 15 jours après. Donc, il a fallu aller vite. Mais avec l'expérience, il faut se dire que ce n'est pas une fin en soi. C'est dur, mais ce n'est pas une fin en soi.

Et les vacances ont pu faire du bien aussi ?

Je n'ai pas eu trop de vacances, mais oui ça m'a fait du bien au moins une semaine d'être avec ma famille, mes amis, de faire autre chose, de voir autre chose, de pas penser foot. On a coupé un petit peu. 

"Face à l'Allemagne, je ne vois pas de vengeance"

Vous parlez souvent de l’importance de la préparation mentale… Ça vous a aidé aussi ?

Clairement. À chaque fois je disais que le prépa mental donne des clés, peut-être à des portes qui n'ont pas encore été ouvertes, mais qui s'ouvriront dans l'avenir. Et je pense que oui, effectivement ça m'a beaucoup servi. Ça fait trois ans que je travaille avec un prépa mental et il m'a donné des clés. Et donc je ressens moins peut-être la colère ou je la digère peut-être un peu mieux, je la gère d'une autre façon. Ça m’aide à mieux passer à autre chose. 

Vous en avez parlé avec lui après l’élimination ?

J'avais déjà un peu les clés pour digérer tout ça et j'avais envie de me confronter à ça. Pas toute seule, parce qu’on n'est jamais vraiment seule, mais j'avais vraiment envie de voir comment j'allais réagir. Je trouve que ça s'est plutôt "bien passé". C'est toujours avec des guillemets quand tu dis ça. 

Et retrouver l’Allemagne en demi-finale de Ligue des nations, c’est un peu particulier ?

En fait, on savait qu'on allait rencontrer l’Allemagne bien avant qu'on les joue à l’Euro. Malheureusement, ça s'est mal passé à l'Euro. Mais aujourd'hui, c'était déjà écrit qu'on allait jouer contre l'Allemagne donc moi j'étais déjà prête par rapport à ça et j'y vois pas de vengeance à avoir ou quoi que ce soit. Je pense que ce sont des matchs qu'il faut prendre l'un après l'autre en ayant conscience de ce qui s'est bien évidemment passé à l’Euro. Mais il y a quand même pas mal de nouvelles aussi qui n'étaient pas à l'Euro donc tu ne peux pas leur imposer ça. Et donc on est obligé de partir sur quelque chose de nouveau, de composer avec ce qu’il s'est passé à l'Euro, mais d’avoir envie de montrer beaucoup plus. On a envie de montrer que la France est un grand pays du football.

Vous avez eu une première séance mardi. Est-ce que le staff a évoqué ce quart de finale avant de démarrer le rassemblement ?

On en a parlé, mais on n’en a pas fait des caisses. Puis là, on a switché vers les deux matchs qui nous attendent, qui sont ô combien importants, parce qu'au final, la Ligue des nations c'est quand même une compétition européenne de très, très, très haut niveau et donc on a à coeur d'aller en finale. Mais pour ça il faut passer les demies qui sont contre l’Allemagne.

Vous les aviez battues en plus en Ligue des Nations déjà avant de jouer en finale contre l'Espagne, c'est plutôt avec ce souvenir là que vous abordez les demi-finales ? 

On prend en compte tous les souvenirs. Et franchement ma DA du moment c’est vraiment d’aller vers l'avant et de vivre au jour le jour. Je suis clairement là-dedans parce qu'en fait se rappeler du passé, ça rend triste, de voir trop loin dans le futur, ça te fait stresser, alors que si tu restes dans ton présent, "here and now" comme on dit en anglais, ça te permet de rester focus sur ce que tu as à faire. Se rappeler de l’Euro ou des demi-finales de Ligue des nations de 2024, ça ne t’amène rien. Le mieux, c'est de dire avec ce qu'on a aujourd’hui, qu'est-ce qu'on peut faire demain.

"Notre objectif premier c'est la Ligue des nations"

Quand vous voyez tout le nouveau groupe qui a peut-être une nouvelle énergie, vous, vous y croyez ?

Moi j'y croirais toujours, j'y croirais toujours ! J’y croyais il y a trois mois en arrière, j'y croyais à fond. Et aujourd'hui bien sûr que j'y crois. On a des nouvelles têtes, des jeunes, des moins jeunes, de l'expérience, de la fougue. On a tout pour faire un très beau groupe, mais ça fait un an que c'est comme ça. 

Vous disiez dans une vidéo avec Deux nuits avec, que vous n’aviez aucun regret avec les Bleues mais vous auriez aimé quand même gagner un trophée…

Bien sûr. Là, il y a la Ligue des Nations qui arrive, c’est l'objectif, bien sûr. Je n'ai aucun regret avec les Bleues. J'ai vécu des aventures extraordinaires que je pense très peu de personnes auraient vécues ou peuvent vivre. Donc, je suis très reconnaissante par rapport à ça. Maintenant, c'est vrai qu’on est là pour aller chercher des titres. Et notre objectif premier aujourd'hui, c'est effectivement d'aller chercher cette Ligue des nations.

En plus, le format de la Ligue des Nations fait que vous arrivez directement là en demi-finale. C'est un peu une voie "simple" pour remporter un premier titre ?

Simple, oui et non. Parce que tu as l'aller-retour contre l'Allemagne. L'Allemagne qui est demi-finaliste de l'Euro, qui est une grande nation du football aussi. Donc oui et non. Chaque compétition a ses difficultés. Et la Ligue des nations en fait partie, parce qu'on est déjà en demies, certes, et après tu vas peut-être en finale. Mais d'abord, il faut jouer les deux demies contre une Allemagne qui a envie de montrer, qui a envie de tout arracher. Nous aussi, je ne dis pas le contraire. Mais non, il n'y a pas de facilité.

"Demain il y aura quelqu'un d'autre à ma place"

Le groupe a beaucoup changé depuis l’Euro, il y a plusieurs joueuses qui ont annoncé leur retraite internationale, des nouvelles qui sont arrivées, comment vous vivez tout ça ?

Je ne m’y attendais pas, je suis trop honnête. Et comment je le vis ? Comme on doit le vivre, encore une fois, au jour le jour. Ce n'est pas de notre fait, ce n'est pas de nos choix. Donc voilà, on voit, on regarde, on envoie des petits messages. Et voilà, tout simplement.

Perdre Amel Majri et Sandie Toletti, c'est un coup dur pour le groupe ?

Un coup dur, oui, bien sûr, parce que ce sont deux grandes joueuses internationales. En revanche, aujourd'hui, tu as beaucoup de talents qui sont arrivés aussi. Je ne sais pas comment dire, mais en fait, je vais reprendre les mots du coach, personne n'est indispensable. 

Et ça, vous le ressentez au quotidien, le fait de ne pas être indispensable ? Est-ce que ce n’est pas un peu stressant pour une joueuse de se dire... 

(elle coupe) lI ne faut pas le prendre comme ça. Tu sais très bien que dans le foot, ça peut aller hyper vite. Par contre si tu as la pression par rapport à ça, ne fait pas ce sport. Mais bien sûr que demain il y aura quelqu'un d'autre à ma place. Et j'en ai conscience. Et tout le monde en a conscience. Et tout le monde devrait en avoir conscience. C'est bien, ça veut dire que ça évolue, ça veut dire que les jeunes viennent, arrivent, nous poussent. Il y a un truc peut-être qui fait peur, mais moi, je le prends positivement dans le sens où ça fait de l'évolution et que l'évolution, moi, je l'ai été quand j'ai pris la place de quelqu'un et que… C’est comme ça.

Vous vous êtes la joueuse la plus âgée du groupe aujourd'hui. C'est comment au quotidien de vivre au milieu d'un groupe aussi jeune ?

Franchement, ça ne me change pas trop. Les filles sont hyper matures, moi je suis peut-être un peu plus gamine dans ma tête… L’âge ça ne veut rien dire finalement. Je ne me sens pas en décalage.

"J'ai toujours cette flamme en moi"

Dans le groupe il n’y a plus beaucoup de trentenaires, avec les retraites internationales récentes. C'est quoi votre clé pour garder votre place à chaque fois, malgré les changements ?

Je pense que c'est une sorte de résilience de tous les jours d’avoir envie de travailler au quotidien. Je travaille beaucoup en club. Quand je dis beaucoup, c'est beaucoup. Et voilà, pour garder un très haut niveau, j'ai toujours envie d'évoluer, j'ai toujours envie de montrer, j'ai toujours envie de... J'ai toujours cette flamme en moi qui fait que je reste ici, peut-être.

Pendant l'Euro, on a senti que vous, vous aviez pris un certain leadership au sein du groupe…

Ouais c'est vrai qu'avant les matchs… Je le fais déjà à la Juve, ce n’est pas un truc nouveau pour moi. Des fois je parle, je prends la parole devant le groupe, mais il y a des moments où je n’ai pas besoin de parler parce qu’on est un groupe qui vit bien et que lorsqu’il y a quelqu'un qui dit tout, il n’y a pas besoin d'en rajouter. Et on se passe un peu la balle comme ça. C'est très fluide. C'est ce que j'apprécie énormément aussi.

Pauline Peyraud-Magnin motivant les Bleues avant la séance de tirs au but en quarts de finale de l'Euro face à l'Allemagne, le 19 juillet 2025
Pauline Peyraud-Magnin motivant les Bleues avant la séance de tirs au but en quarts de finale de l'Euro face à l'Allemagne, le 19 juillet 2025Photo par CHARLOTTE WILSON / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP

C'est quoi, vous, votre place au sein du groupe ?

Je suis un peu partout. Je n'aime pas dire "caméléon" parce que tout le monde va prendre ça pour quelque chose de péjoratif alors que ça ne l'est pas du tout. Mais je peux avoir des conversations avec tout le monde. J'aime bien tout le monde. J'aime bien rigoler. Je n'ai pas une place "prépondérante", je ne suis pas là à vouloir me mettre en avant, je ne reste pas non plus trop en retrait. J'essaie de rester un peu au milieu.

Vous avez une importance vis-à-vis des jeunes qui sont arrivées, pour les intégrer ?

Je pense qu’il faut leur poser la question à elles parce que moi perso ce serait un peu arrogant ou égocentrique de te dire : "Oui, oui, j'ai tout à fait une importance vitale." Mais je pense que c'est à elles qu'il faut demander.

Comment vous percevez cette nouvelle génération qui arrive ? Grace Geyoro disait qu’elle avait vraiment confiance en elles, qu’elles avaient peu de gêne en arrivant chez les Bleues…

C’est vrai. Moi je me rappelle quand j'étais jeune, quand je suis arrivée en équipe de France, plus je me faisais petite, mieux je me portais. Alors qu'aujourd'hui elles arrivent, elles ont… Hormis le culot, je pense que c'est aussi une certaine forme de maturité qu'on leur apporte dans les clubs. Donc elles n’ont pas ce truc de ne pas se sentir légitimes. Elles y vont et et basta cosi comme on dit en italien.

Et c’est bien d’être dans un groupe pareil ?

Oui c'est bien. Puis ce sont des des filles qui ont beaucoup de respect pour les gens. Donc ça se fait très naturellement.

On disait qu’à l’Euro vous aviez pris un peu d'épaisseur. Est-ce que vous, vous vous verriez porter le brassard en Bleues ? 

La question ne se pose pas parce qu'on a une capitaine. 

Mais Sandie Toletti a laissé sa place chez les vice-capitaines…

Vous venez de me poser une colle parce qu'en fait, je ne m'étais jamais posé vraiment la question. Donc c’est au coach. Je l'ai porté une fois, ça a été incroyable. Et comme j'avais dit, si je ne devais le porter qu'une seule fois, c’était vraiment un moment incroyable pour moi donc ce ne sont que de bons souvenirs.

"On travaille ensemble pour mettre à l'aise celle qui joue"

Si on parle des gardiennes, votre trio a changé parce que Justine Lerond a laissé sa place et Mylène Chavas est arrivée, comment vous avez géré ça ?

Comme quand le groupe change, comme lorsqu’il y a des blessures… Après avec Mylène on se connait depuis un moment, j'avais déjà fait l'Euro 2022 avec elle. Il n'y a pas de différence en fait.

Vous étiez très amies toutes les trois avec Justine Lerond et Constance Picaud

Ouais ouais clairement, on s'entend hyper bien mais on a vraiment un bon groupe gardiennes et je ne parle pas uniquement de nous trois. On est cinq, six au total… Et qu'il y en ait une, que ça soit moi, Constance ou Mylène des trois qui change pour une autre il n'y aura pas de différence. On s’apprécie énormément, on travaille dans ce sens-là pour mettre à l'aise celle qui joue.

Et vous en tant que numéro un vous avez un rôle là-dedans, de faire en sorte que le groupe des gardiennes vive bien ?

On a un groupe qui vit bien, on a un groupe qui est cool, qui est top. On s’encourage, on se parle s'il y a besoin de parler. Et moi je vais faire un peu le rôle de "grande-soeur". Moi, je suis plus la marrante. J'aime bien le faire naturellement, je ne vais pas forcer le truc.

Et vous d'avoir un groupe comme ça qui vit bien aussi ça vous aide en tant que numéro 1? 

Clairement et je pense que ça aiderait n'importe qui. Quand tu as un groupe qui vit bien comme vous avez pu le remarquer à l’Euro… On a changé pas mal de joueuses, mais ça ne change pas parce que là c'est nous qui mettons le mood. On a vraiment un groupe qui vit très bien et j'étais hyper contente de retrouver l’équipe de France là.

Vous avez 33 ans, vous avez encore des rêves ?

J'en ai plein des rêves, moi. J'ai le rêve de... Je ne parle pas de maintenant, mais peut-être plus tard, parce qu’en tant que gardienne de but on peut jouer jusqu'à des âges un peu plus avancés. Donc moi mon rêve de base, c'était de jouer aux Etats-Unis. Peut-être pas maintenant, mais j'espère à l'avenir. C'était l'un de mes premiers rêves. Et en équipe de France, je rêve toujours de gagner un titre. Ça peut arriver très, très vite. Et ça, c'est cool.