Après les deux premiers rassemblements de l’ère Bonadei, on avait laissé les Bleues sur un bilan en demi-teinte : deux victoires, mais aussi deux défaites, au gré de matchs amicaux qui ont été l’occasion pour le nouveau sélectionneur de l’équipe de France de faire une large revue d’effectif et de donner sa chance aux plus jeunes. Un choix salué par les observateurs des Tricolores, habitués aux listes copiées-collées de Hervé Renard. Après tout, les matchs amicaux c’est fait pour ça. Le dernier en date - une défaite 2-4 face à une équipe bis de l’Espagne - laissait tout de même beaucoup de doutes sur la suite.
Le début de campagne des Bleues en Ligue des nations se chargera de les balayer. L’écrémage est fait, le groupe se restreint à 23 joueuses et ressemble grosso modo aux têtes habituelles de l’ère Hervé Renard, le retour du 4-3-3 et de Pauline Peyraud-Magnin comme titulaire dans les cages… et la France enchaîne les victoires : 1-0 contre la Norvège, 3-2 contre l’Islande, 2-0 contre la Suisse. L’équipe de France est largement en tête de son groupe 2 de Ligue A, avec 9 points, devant une Norvège qui n’en compte que 4. Elle pourrait même être qualifiée directement pour le Final Four en cas de victoire mardi face à la Norvège à Oslo, qui n’a plus battue les Bleues depuis 2003.
Une Ligue des nations valorisée faute de mieux
"On va aborder cette rencontre avec l'ambition de gagner et de se qualifier, car c'est ce que les filles veulent aussi. Il faut avancer étape par étape, prendre les choses au fur et à mesure", assurait Laurent Bonadei au micro de France 4 après la victoire nette 2-0 vendredi soir face à la Suisse. Le sélectionneur le sait : cette compétition souvent critiquée est surtout le chemin le plus court pour les Bleues d’accéder à une finale, voire même d’enfin soulever un trophée, après des années de disette qui commencent à peser sur les troupes. C’est via ce même format que Hervé Renard avait envoyé l’équipe de France féminine disputer sa première finale historique d’un tournoi officiel, qui se conclura par une défaite 2-0 face aux championnes du monde espagnol.
Au sein d’un groupe qui a trop souvent connu l’échec en quarts de finale, cette qualification en finale avait été vécue comme une libération, preuve que ces Bleues n’étaient pas si maudites. Méprisée chez les garçons, elle a une saveur particulière pour le groupe féminin. Sakina Karchaoui appuie : "La Ligue des Nations, il y en a beaucoup qui râlent parce que ça rajoute des gros matchs à haute intensité, etc. Mais moi, j'aime beaucoup. J'aime beaucoup parce que ce sont des matchs véridiques, dans le sens où on travaille tous les aspects."
"Ça reste une compétition, donc il y a un état d'esprit à avoir. L'année dernière, on est allé en finale. Cette année, il faut faire mieux. Il faut aller gagner cette compétition, aussi pour être mentalement prête", lance-t-elle, alors même que l’aspect mental est souvent évoqué pour expliquer les échecs de cette équipe de France féminine. Même si la joueuse de 28 ans semble oublier que le fameux Final Four ne se disputera qu’en octobre et décembre prochain, soit après l’Euro estival. Voilà pourquoi Laurent Bonadei ne s’est pas trop avancé sur l’objectif final de cette compétition, dont la phase de poules sert davantage de préparation pour le championnat d’Europe.
Pas vraiment suffisant pour jauger le niveau des Bleues
Disciple de "prendre les matchs les uns après les autres", l’ancien adjoint de Hervé Renard promu à l’issue de l’échec aux Jeux olympiques préfère louer la qualité de chacune des équipes rencontrées par la France dans ce groupe 2, qu’il s’agisse de la jeunesse suisse ou de la redoutable Ada Hegerberg chez les Norvégiennes… La vérité c’est que si ces équipes sont effectivement placées dans la première division de la Ligue des nations, aucune d’elles ne figurent devant la France, 11e, au classement FIFA : l’Islande, troisième du groupe est 13e, la Norvège est 15e, quand la Suisse est… 23e.
Loin derrière les nations qui devraient être les vraies adversaires des Bleues cet été en Suisse : l’Espagne, 2e, l’Allemagne, 3e, l’Angleterre, 4e, la Suède, 6e, et les Pays-Bas, 10e. Voir l’équipe de France dominer son groupe de Ligue des nations est donc rassurant certes, mais surtout logique. L’Euro et le groupe très relevé des Bleues pour cette compétition - Angleterre, Pays-Bas, Pays de Galles - sera le vrai baromètre sur lequel on pourra juger ou non de l’efficacité de la méthode Bonadei.
Des Bleues qui retrouvent le sourire
En attendant le juge de paix, chaque sélection ménage ses troupes, avec notamment des précautions prises pour Kadidiatou Diani, victime d’une commotion cérébrale avec son club et laissée au repos, ou Wendie Renard, absente face à la Suisse après un coup au pied et finalement forfait mais pas remplacée pour affronter la Norvège. Preuve encore de l’importance moindre de cette Ligue des nations. Griedge Mbock et Sandy Baltimore les remplaceront au pied levé, sans que les performances des Bleues n’en soient pour autant impactées.
Un énième bon signal pour cette équipe de France qui au-delà d’un titre, cherche aussi à oublier ses deux échecs en deux ans, et peut se targuer d’avoir un groupe qui "grandit et se construit au fil des rencontres", comme aime le souligner Laurent Bonadei. La qualification au Final Four mardi ne serait que la première pierre d’un plus grand édifice qu’il reste à bâtir.