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Travail, abnégation, passion : le fabuleux destin de Rui Borges au Sporting Portugal

Rui Borges lors de la rencontre Naples-Sporting.
Rui Borges lors de la rencontre Naples-Sporting. GIUSEPPE MAFFIA/NURPHOTO VIA AFP

Prochain adversaire de l'OM en Ligue des champions, le Sporting se présente comme un adversaire piégeux pour le club phocéen. À sa tête, Rui Borges, entraîneur des Lions depuis fin décembre 2024, est l'homme à la mode au Portugal, dont la hype connaît une montée fulgurante ces derniers temps. L'exemple d'un coach qui, par le travail, l'abnégation et des idées innovantes, a grimpé les échelons du football lusitanien rapidement.

C'est l'histoire d'un joueur de football dont la carrière est principalement passée par la deuxième et troisième division portugaise durant les années 2000 et 2010, devenu l'entraîneur à la mode en Liga Portugal en 2025. Rui Borges fait parler de lui depuis la saison 2023-2024 lorsque le club de Moreirense parie sur lui, après avoir obtenu des résultats probants en D2 portugaise.

Cette année-là, le natif de Mirandela égale le meilleur classement du club en première division, terminant la saison à la sixième place avec un total incroyable de 55 points, un record. Dans la foulée, c'est le gros club de la municipalité, le Vitoria Guimarães, qui l'embauche lors de la saison 2024-2025, et les résultats sont tout aussi convaincants, notamment en Conference League. Mais Rui Borges ne finira pas la saison avec les Vimaranenses puisque le Sporting vient le chercher le 26 décembre 2024 pour remplacer João Pereira, entraîneur qui avait pris le flambeau de Ruben Amorim

Résultat des courses, les Lions réaliseront le doublé national – exploit qu'Amorim n'est pas parvenu à faire –, le tout en battant un beau record : finir champion invaincu. Un exploit extraordinaire, même si le plus dur arrive à présent pour lui dans le club lisboète, puisqu'il est attendu à ce qu'il confirme sur une année complète. Mais pour cet homme né dans la région de Trás-os-Montes, l'une des plus pauvres du Portugal, rien ne semble impossible. Face à l'OM ce mercredi, seule la victoire compte, car cette dernière permettrait aux Portugais de cumuler 6 points après trois journées.

Au Sporting, Borges sait s'adapter et affirmer ses idées

Si Rui Borges s'est toujours démarqué avec le 4-2-3-1 comme système préféré, l'entraîneur de 44 ans a su s'adapter aux différents contextes du Sporting à son arrivée. La saison dernière, en raison du nombre élevé de joueurs blessés, il a fini par abandonner sa propre idée du jeu, conservant le modèle de l'entraîneur précédent, Ruben Amorim. En d'autres termes, il a notamment décidé de garder la structure avec trois défenseurs centraux.

Ce choix de garder les idées de son prédécesseur lui ont permis de remporter le championnat et la Coupe face au grand rival de la capitale, le Benfica, le tout en terminant la saison sans aucune défaite. Mais Rui Borges savait que cela n'allait durer qu'un temps. S'adapter et être donc pragmatique à son arrivée était nécessaire, mais le Portugais veut maintenant s'imposer au plus haut niveau avec son football et ses idées. 

C'est pourquoi il est revenu au 4-2-3-1, un système de jeu qui l'a accompagné tout au long de sa carrière, notamment après avoir vu plusieurs joueurs revenir de leurs blessures (Pedro Gonçalves, Hjulmand) et grâce au temps nécessaire pour travailler en pré-saison. Au départ, l'opinion publique a montré une certaine résistance au changement de système, mais l'entraîneur n'a pas renoncé à imposer ses idées. Aujourd'hui, le Sporting possède la meilleure attaque du championnat, avec 20 buts marqués, et, après huit journées, le club présente la deuxième meilleure attaque du XXIe siècle, et ce, après avoir perdu Gyökeres.

Une équipe caméléon, adepte du jeu intérieur

Alors tout n'est pas tout rose puisque c'est le FC Porto qui est en tête du championnat et qui réalise un début de saison extraordinaire avec Francesco Farioli, mais le Sporting (19 points) suit de près les Dragons (22 points) au classement. Et ce qui fait la force de l'équipe de Rui Borges est ce caractère caméléon qu'elle possède d'un point de vue tactique. Les Lions s'adaptent à leur rencontre, se montrent flexibles en fonction de leur adversaire, et peuvent pratiquer à la fois un football de transition, comme un football de position. 

Il convient également de souligner que c'est une équipe qui aime passer par l'intérieur. Debast, le défenseur central belge qui, la saison dernière, a même dû être repositionné au milieu de terrain par manque d'options à ce poste, est très important dans la phase de construction. Inácio, incertain pour l'OM à l'heure où nous écrivons ces lignes, se distingue également dans cette phase du jeu, tandis que Hjulmand est le cœur de l'équipe, étant un joueur très fort physiquement.

Ce sera la première fois que l'entraîneur portugais affronte une équipe française. Et de ce que Flashscore a pu savoir, ce dernier connaît très bien les idées de De Zerbi et qu'il apprécie pour la façon dont il fait jouer ses équipes. En tout cas, en France, cette nouvelle équipe du Sporting a déjà un adepte, puisque Paulo Fonseca, lors du Football Summit Portugal 2025, a récemment déclaré "aimer beaucoup les idées et le jeu offensif du Sporting, notamment son jeu positionnel en attaque".

Un parcours de besogneux auprès des siens

Mais avant d’être un entraîneur reconnu du football portugais, Rui Borges est avant tout un homme de valeurs, d’émotions sincères et d’attachements profonds à ses origines. Né à Mirandela, petite ville du nord du Portugal, il a grandi dans un environnement marqué par le travail, la simplicité et la famille. Des racines qui continuent de façonner son caractère aujourd’hui.

Le football est entré dans sa vie par le biais de son père, Manuel Borges, passionné de sport et première influence majeure dans son parcours. Dès son plus jeune âge, Rui apprend que la passion n’a de valeur que si elle s’accompagne de discipline et de curiosité. Cette curiosité, il la manifeste dès ses années de joueur : il pose des questions, cherche à comprendre le "pourquoi" des choses, s’intéresse à la tactique et aux entraînements. Déjà, on pressentait chez lui un futur entraîneur.

Son passage dans les divisions inférieures portugaises, loin des projecteurs, a forgé un homme lucide, travailleur et ancré dans la réalité. Joueur de couloir droit, connu pour sa précision sur coups de pied arrêtés, il portait en lui la rigueur et la persévérance qui caractérisent aujourd’hui son management.

Rui Borges sur le banc, avec sa montre Casio
Rui Borges sur le banc, avec sa montre CasioPhoto par FRAN SANTIAGO / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP

Hors du terrain, Rui Borges se distingue par une grande humilité et une simplicité désarmante. Il aime les choses ordinaires : regarder des séries, se lever tôt même les jours de repos, faire des blagues avec ses amis, y compris le concernant. Sa célèbre Casio à 20 €, qu’il porte depuis ses débuts à Mirandela, est devenu un symbole de son parcours : un rappel constant de ses débuts modestes et de son refus de perdre de vue ses origines. Cet accessoire, plus que tout autre, résume son approche de la vie : la fidélité aux valeurs avant la quête de reconnaissance.

Le poids des racines et l’importance des siens

Rui Borges est un homme de famille. Très lié à ses parents, Cândida et Manuel, il évoque souvent avec émotion la figure de son grand-père, Zé Pedro, cordonnier, qui a profondément marqué son enfance.

Sa femme et son fils occupent une place centrale dans son équilibre. Il les protège de l’exposition médiatique, conscient du tumulte qui accompagne la notoriété. Chaque pause dans sa carrière est une occasion de retour à Mirandela, où il retrouve les siens, ses amis, et le sentiment d’appartenance qui l’apaise. Lorsqu’il s'est engagé avec le Sporting, un des plus grands clubs portugais, il a choisi de quitter les réseaux sociaux, afin de préserver son entourage. 

Si Rui Borges a marqué tous les clubs où il est passé, c’est aussi par sa proximité avec les joueurs. Il écoute, dialogue, se renseigne sur les réalités familiales et personnelles de chacun. Pour lui, la cohésion d’un groupe passe par le respect et la transparence. Il n’hésite pas à sanctionner les manquements, comme l’exclusion d’un joueur pour non-respect des règles internes. Même ceux qui jouent peu bénéficient d’une explication, car il croit fermement à la dimension humaine du management. Il reste d'ailleurs en contact avec de nombreux anciens coéquipiers et entraîneurs rencontrés au fil de son parcours, entretenant des amitiés durables. 

Un parcours modeste qui lui a d'ailleurs inspiré une phrase qu'il a instauré comme une maxime depuis son arrivée au Sporting"Quand il n’y a pas d'idée, il doit y avoir du dévouement". Nul ne doute qu'il fera preuve d'idées au moment d'affronter l'OM, un club qui a laissé de mauvais souvenirs aux supporters des Lions, puisque le club portugais ne s'est jamais imposé face au club phocéen, en quatre confrontations (trois défaites, un match nul).