La première surprise de cette soirée au Metropolitano est venue avant même le coup d'envoi, lors de l'annonce de la composition d'équipe lilloise, avec trois jeunes de 19 ans : Matias Fernandez-Pardo (aile gauche), Ngal'ayel Mukau (milieu de terrain défensif) et Ousmane Touré (défense), ainsi qu'un novice à ce niveau, Mohamed Bayo, en pointe.
L'entraîneur Bruno Génésio a donc mis à exécution sa menace que l'on croyait ironique, glissée quelques semaines plus tôt lors d'une déclaration contre le calendrier qui impose à ses joueurs trois déplacements à Monaco, Madrid, puis Lens samedi (21h00) en seulement neuf jours : "Peut-être qu'à Madrid, on ira avec une équipe réserve pour se préserver pour le derby..."
Il faut dire que la liste des Lillois indisponibles est déjà bien longue, et Rémy Cabella l'a rejoint après un quart d'heure de jeu à Madrid. "Depuis l'annonce du calendrier, j'ai en tête de faire des équipes différentes à Monaco et ici, s'est justifié Génésio après la rencontre. Pour moi, ce n'est pas une équipe B."
Il n'empêche, ce pari a d'abord semblé fou, puis perdant quand Touré a offert d'une passe en retrait mal assurée l'ouverture du score à Julian Alvarez (8ᵉ). Mais ce n'étaient pas les titulaires qu'il fallait surveiller, plutôt les remplaçants.
Edon Zhegrova, entré en jeu prématurément à la place de Cabella, a égalisé (61ᵉ), Bafodé Diakité a amené de la sérénité à la défense en sortant du banc à la mi-temps, et Jonathan David, lancé à la 65ᵉ minute, a fait plier les Colchoneros d'un doublé (74ᵉ, 89ᵉ), inscrivant son deuxième but après une percée d'Osame Sahraoui, alors sur la pelouse depuis une minute.
Lille a plié, égalisé, puis résisté avant de faire entrer la cavalerie pour tout faire basculer. "À la mi-temps, j'ai dit à mes joueurs qu'il fallait faire durer le match, ne surtout pas encaisser un deuxième but", a expliqué Génésio. Pari gagné.
Trois buts chanceux
Si "Pep" Génésio, qui avait gagné ce surnom en dominant le City de Guardiola à Manchester avec son Olympique lyonnais en 2018, a encore ajouté un entraîneur de renom, Diego Simeone, à son tableau de chasse déjà garni de Carlo Ancelotti et José Mourinho, il a aussi bénéficié de beaucoup de réussite.
Quatre tirs, trois buts, tous chanceux. Certes, la frappe enroulée de Zhegrova était belle, mais aurait-elle trompé Jan Oblak si José Maria Gimenez ne l'avait pas déviée de la tête ? Et que dire du pénalty, sifflé malgré une main de Benjamin André, sans faute flagrante d'un Madrilène ? "Il n'y a rien, expliquez-moi pourquoi l'arbitre a sifflé, a pesté Simeone. Pour une main ?"
Le troisième but est tout aussi heureux : une reprise peu académique de David déviée dans ses cages par Reinildo, après une frappe totalement manquée de Gabriel Gudmundsson. Outre ces buts, les Dogues ont profité de trois ratés d'Alexander Sorloth (2ᵉ, 21ᵉ, 32ᵉ).
"Un braquage ? Peut-être un peu, en a convenu David en souriant. Mais on les a forcés à commettre des erreurs. On a su être opportunistes."
Chevalier en sauveur
Comme contre le Real Madrid, Lucas Chevalier a joué un rôle crucial dans cette prouesse. Le portier de 22 ans a multiplié les arrêts, certains de grande classe, comme lorsqu'il a repoussé d'une main ferme une tête de Gimenez (33ᵉ).
Abandonné par sa défense à Lisbonne face au Sporting (défaite 2-0), Chevalier éblouit sur la plus grande scène européenne, au point de relancer à chaque journée le débat concernant son absence de la sélection nationale. Didier Deschamps, attentif aux performances des joueurs en Ligue des champions, ne devrait pas tarder à faire de lui un Bleu.
D'ici là, le joueur formé au Domaine de Luchin continuera de briller dans les cages du club nordiste qui, avec six points après trois journées, ne s'interdit plus de rêver en Ligue des champions. Prochaine étape : la réception de la Juventus mardi 5 novembre. "On ne se met pas de limites", prévient David.