En ce mardi 19 août, le Barça féminin s’envole pour sa tournée de pré-saison au Mexique. Dans le groupe qui s’envole pour disputer deux matchs amicaux contre les All Stars de la LigaMX féminine et le Club America, seules 17 joueuses disposent d’une inscription comme joueuses de l’équipe première. Avec elles, huit joueuses issues de l’équipe réserve, dont Sydney Schertenleib et Lucia Corrales qui devraient être promues cet été, complètent l’effectif.
Des jeunes joueuses qui ont déjà fait leurs preuves quatre jours plus tôt, en remportant la finale de la Coupe de Catalogne face à Levante Badalona (victoire 1-0), autre club de première division espagnole de la région de Barcelone. Alors que l’essentiel des titulaires barcelonaises revenait tout juste à l’entraînement collectif après une finale d’Euro perdue face à l’Angleterre.
Une arrivée, cinq départs
L’été du Barça féminin a été particulièrement mouvementé : après l’arrivée très attendue de Laia Aleixandri, de retour au Barça après la fin de son contrat à Manchester City, le mercato blaugrana a surtout été rythmé par les départs : Ingrid Engen d’abord, partie à l’OL après la fin de son contrat, Ellie Roebuck, dont le contrat a été résilié, Martina Fernandez, transférée à Everton, Bruna Vilamala, transférée au Club America, Fridolina Rolfö, libérée de son contrat juste avant l’Euro. Le dernier en date, celui de Jana Fernandez vers London City Lionesses, défenseure centrale de 23 ans et première joueuse à être passée par toutes les catégories de la Masia à éclore en équipe première, est celui qui tire la sonnette d’alarme.
Au-delà du côté affectif de voir une joueuse de "la maison" quitter le club alors qu’elle semblait enfin prendre sa place dans l’équipe première, la presse catalane révèle surtout que son départ est contraint, le Barça féminin devant économiser de la masse salariale. L’indemnité de transfert, estimée à 300 000 euros, et l’économie de son salaire doivent permettre à la section féminine barcelonaise de rentrer davantage dans les clous du FairPlay financier très strict imposé par la Liga.
Un FairPlay qui est LE nerf de toute cette crise estivale : l’encadrement de la masse salariale par l’instance gérant le championnat espagnol comprend les salaires de l’équipe première masculine du Barça, mais aussi toutes les autres sections : du basket au hand, en passant par les féminines et les jeunes du centre de formation. "Nous aimerions que chaque section ait son propre FairPlay et ne dépende pas de la Liga, mais nous devons accepter les règles qui existent aujourd’hui", plaide Xavi O’Callaghan, le directeur des sports professionnels du FC Barcelone, lundi en conférence de presse.
Une section féminine aussi impactée par la situation financière globale
Le Barça féminin dispose d’une masse salariale de 13,75 millions d’euros, prenant en compte les salaires des joueuses et du staff. Soit presque trois fois plus qu’en 2021, où la masse salariale des féminines était de 4,9 millions. "L'équipe féminine a augmenté sa masse salariale d'un million d’euros, elle a donc de l'argent, mais le marché gonfle. Pour conserver les joueuses les plus importantes, il faut dépenser plus d'argent, il faut donc se tourner vers le système de formation", explique le dirigeant blaugrana.
Même si la section féminine catalane a souvent été bénéficiaire, et donc autosuffisante, et que la saison passée encore, elle a rempli les objectifs financiers fixés par la direction, elle doit se plier à la situation économique globale du FC Barcelone, qui affecte chacune de ses sections. L’équipe première masculine a été la première à en subir les conséquences, avec le départ forcé de Lionel Messi mais aussi des recrues bien en deçà des standings du club, puis la section basket a elle multiplié les ruptures de contrats de ses stars… Tout ça sous la contrainte du FairPlay financier de la Liga.
Étonnamment, le Barça féminin lui s’est développé durant cette période, remportant trois Ligue des champions (2021, 2023 et 2024), quand l’équipe masculine attend depuis plus de dix ans de soulever à nouveau la coupe aux grandes oreilles. Mais sa croissance exponentielle est freinée par une situation financière qui impacte aujourd’hui aussi les féminines, là où le peu de masse salariale qu’elles représentaient auparavant était moins problématique.
Moins de gros salaires mais des cadres mieux valorisées
Le Barça féminin doit aussi faire face à une concurrence étrangère de plus en plus accrue, dans des championnats qui se développent plus vite qu’une Liga F encore peu compétitive dans son ensemble. Avec des clubs qui sont donc en mesure de proposer des contrats nettement plus avantageux. "La WSL est en pleine croissance (sur le marché), ce qui nous rend plus difficile d'atteindre le niveau de compétitivité que nous souhaitons. Nous sommes dans une situation qui nous complique les choses", concède Xavi O’Callaghan.
En résumé, pour ne pas dépasser les 56 millions d’euros de masse salariale fixés pour l’entièreté des sections hors équipe première masculine, les dirigeants du Barça féminin ont préféré miser sur les cadres pour mieux les rémunérer et éviter qu’elles partent. Quitte à sacrifier des jeunes promesses comme Jana ou Bruna. Pour rentrer dans les clous du FairPlay financier global imposé au club et non pour permettre l’inscription de Rashford, comme certains ont pu l’avancer avant que l’international anglais ne soit finalement inscrit avant la première journée de championnat. Le salaire de Jana Fernandez ne représentant évidemment pas grand-chose face aux 5,4 millions nets perçus par saison par Rashford.
"Le club continuera à miser au maximum sur le football féminin, promet le dirigeant des sections sportives. Je suis sûr que l'équipe continuera à être compétitive et à être à la hauteur. Nous devons construire à partir de la formation pour créer notre projet et le rendre durable." Le centre de formation lui sera pleinement impliqué dès cette saison 2025-26, et ce alors que pour la première fois depuis la saison 2022-23 l’équipe réserve du Barça féminin n’a pas terminé en tête de la deuxième division espagnole.
Un Barça féminin qui se veut toujours compétitif
"Je suis convaincu que nous avons toujours l'effectif nécessaire pour rivaliser avec tous nos adversaires et pour tout gagner. Je pense que nous allons faire une très bonne saison”, assure tout de même Pere Romeu, entraîneur maintenu à la tête des féminines malgré les critiques sur son niveau tactique après la défaite en finale de Ligue des champions féminine. Il estime que les joueuses de l’équipe réserve vont "beaucoup aider" le club et qu’elles ont “un très bon niveau”.
Reste à savoir si ces jeunes propulsées en équipe première pour palier aux nombreux départs seront au niveau de ce qui se fait de mieux sur la scène européenne. Car c’est en tout cas le projet voulu sur le long terme par le Barça, comme ce qui a été fait dans une certaine mesure avec l’équipe première masculine. Le FC Barcelone dans son ensemble lui devrait retrouver de la stabilité financière à la fin des travaux du Camp Nou, avec plus de 105 000 spectateurs à chaque match. En attendant, le bateau tangue et le club cherche à limiter la casse.