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Interview Flashscore - Sonia Bompastor : "Dans ma carrière, je n'ai aucun regret"

À la tête de Chelsea depuis le début de la saison, Sonia Bompastor est toujours invaincue.
À la tête de Chelsea depuis le début de la saison, Sonia Bompastor est toujours invaincue.IAN MACNICOL/AFP

Légende de l'équipe de France féminine, première à avoir remporté la Ligue des champions en tant que joueuse et coach et actuelle entraîneure d'un Chelsea invaincu depuis le début de la saison, Sonia Bompastor se livre dans un livre intitulé "Une vie de foot" paru ce mercredi aux éditions Arthaud. L'occasion pour l'ancienne de l'OL de revenir sur sa carrière singulière, mais aussi d'évoquer pour la première fois sa relation avec Camille Abily, compagne dans la vie et adjointe sur le terrain.

Flashscore : Vous démarrez votre livre par cette anecdote sur des crampons vissés taille adulte, dans lesquels vous êtes obligé de mettre du coton, pour disputer une finale de Ligue des champions. Pourquoi un tel choix ?

Je dois dire que c'est l'idée de Farid (Haroud, avec qui elle co-écrit le livre). Il me dit depuis le début quasiment de l’expérience : "Sonia, j'ai le début de ton livre. Je vais démarrer par cette anecdote de la finale de la Ligue des champions." Il faut savoir que Farid, il est présent ce jour-là et fait partie des rares journalistes accrédités pour venir à la finale de la Ligue des champions 2011, donc il croyait déjà en nous. Il est convaincu dès le départ que les gens vont aimer cette anecdote. Et quand je relis le livre je me dis que finalement c'est pas mal. C'est une réalité surtout, on est en 2011 et je joue certainement le match le plus important de ma carrière à ce moment-là et j'ai l'outil le plus important finalement de la footballeuse qui n’est pas du tout adapté aux circonstances, c'est incroyable. Et ça n'empêche pas d'avoir un bon résultat à la fin. Mais c'est vrai que sur la performance, c'est compliqué quand même.

Ça dit aussi beaucoup finalement de votre parcours en tant que joueuse, d'avoir lutté avec parfois les moyens du bord.

Oui, c'est paradoxal parce qu'en fait, je le raconte dans le livre parce que je me livre et que je raconte ce que j'ai effectivement vécu tout au long de mon parcours. Mais moi, en avançant dans mon expérience, à la fois de joueuse, de femme, de petite fille, je ne le vis pas comme ça. Je suis dans le moment présent et à chaque fois qu'il y a un obstacle, qu'il y a une barrière, je me dis que c'est presque normal que ça se passe comme ça. Ce n'est "que" du foot féminin et il faut que j'arrive à faire avancer les choses pour continuer à pouvoir jouer au foot ou vivre de ma passion.

Dans le livre, il y a énormément d'anecdotes sur plein de matchs, sur plein de choses de votre vie. Comment vous avez fait pour vous souvenir de tout ça ?

C'était dur. J'ai eu besoin de Farid, il a été exceptionnel là dessus parce qu'il a fait un travail de recherche énorme pour remettre dans son contexte ou rectifier certaines choses. J’ai aussi Camille (Abily, sa compagne) qui parfois quand je rentrais le soir à la maison, je lui racontais un peu les échanges qu'on avait eu avec Farid et elle me disait : "Non mais en fait Sonia t'as dit ça, mais c'est plutôt ça." Donc sur l'entretien suivant on rectifiait un petit peu. Ça a été un bel exercice parce que ça m'a permis d'essayer de me rappeler d'un maximum de choses que j'avais vécu. Et je n’ai pas une très très bonne mémoire donc ce n'était pas toujours simple.

Quand on est entraîneure de l’OL, on a le temps de faire tout ça ?

Ouais je l'ai fait sur mon temps personnel, ça passait toujours après le boulot. J’aurais pu passer un peu plus de temps avec mes enfants mais je consacrais du temps à Farid et à ce livre-là. Après on s'est vus de manière assez assidue, ça a duré quasiment un an où au moins une fois par semaine sur deux-trois heures. C’était franchement beaucoup de plaisir des bons moments et j'en retiens beaucoup de positif.

 "Quand je débarque on est complètement amateur, puis on tend vers le semi-professionnalisme et je termine ma carrière de joueuse avec le professionnalisme."

Votre histoire c’est aussi celle d’un foot féminin français émergeant, qui se professionnalise…

Je sais que j'ai vécu des périodes de transition dans le football féminin. Quand je débarque on est complètement amateur, puis on tend vers le semi-professionnalisme et je termine ma carrière de joueuse avec le professionnalisme. Je vis à la fin dans mes dernières années de footballeuse de ma passion mais oui, il y a eu beaucoup de chemin parcouru entre le départ et la fin de ma carrière.

Vous racontez d’ailleurs un écart entre l’exigence à l’OL et l’amateurisme des Bleues. 

Ce moment-là était dur à vivre pour moi mais je pense aussi pour l'ensemble des Lyonnaises, dans le sens où avec Jean-Michel Aulas, on était déjà dans le professionnalisme en club. Et en tant qu'athlète, on attend d'une fédération ou de ce qui se fait au plus haut niveau féminin, au moins autant de professionnalisme que dans les clubs, voire plus. Mais il y avait un décalage énorme, assez compliqué à vivre. En équipe de France, on était encore dans l’amateurisme de par le mode de fonctionnement. Et ces deux vitesses, quand on regarde l'histoire du football féminin, ça a toujours plus ou moins existé. Parce qu'il y a toujours eu un club, celui de l'Olympique Lyonnais, qui a fait figure de locomotive et qui essaye depuis des années de tirer tout le monde vers le haut. Et puis d'autres clubs qui essayent de suivre et des clubs qui sont là mais qui ne croient pas vraiment. On peut parler d’un foot féminin à deux voire trois vitesses.

Vous l’avez constaté en étant entraîneure à l’OL ?

Oui. Moi à l’OL j’avais toutes les conditions pour performer, même s'il y avait beaucoup de pression sur les résultats. J’avais une équipe de championnes à manager, mais j’avais des collègues qui au quotidien dans leur club devaient tout faire quasiment : intendant, dirigeant, entraîneur… Ils devaient même gérer les joueuses à côté. C'est difficile de se concentrer sur le sportif et sur la performance quand vous avez tous les à côté à gérer.

Dans votre livre vous racontez vos passages avec l'équipe de France et on se rend compte que même si vous êtes une légende de l'équipe de France, ça n'a pas toujours été très évident avec les Bleues, que ce soit à l'arrivée à Clairefontaine, avec des désaccords parfois avec les plus anciennes, vos désaccords avec Bruno Bini…

Ça fait partie de la vie d'un groupe. Ce sont des choses qui souvent appartiennent au groupe et qui ne sortent pas toujours en public. Là je le raconte parce qu'à partir du moment où j'écris ce livre et je me livre, ce sont des choses aussi qui ont été marquantes dans ma carrière de joueuse. Mais forcément la vie d'un groupe n'est jamais toujours linéaire et il y a toujours des hauts et des bas. Après, forcément, quand j’arrive il y a un décalage de génération, tout simplement. Il y a un décalage aussi par rapport à l'approche du football féminin où je disais, moi, dans ma tête, même si c'était ma passion et que j'étais complètement amateur, je voulais jouer au foot de la manière la plus professionnelle possible. Et sur la fin de la carrière, il y a des désaccords avec Bruno, parce que principalement, ce qu'on vivait en club, c'était extrêmement éloigné quand on allait en sélection. Et sur le professionnalisme, c'était difficile à vivre pour moi.

"Si tu me demandes, est-ce que tu aurais aimé vivre maintenant, à cette époque-là, par rapport à ton époque, je te réponds non."

Cet "écart de génération" vous le vivez aujourd’hui à Chelsea, avec des joueuses qui bénéficient d’infrastructures exceptionnelles, qui sont professionnelles… Vous n’avez pas vraiment de rancoeurs de vous dire que vous auriez aussi pu vivre comme ça ?

Non, dans ma carrière, je n'ai aucun regret. Je suis très contente de ce que j'ai vécu sur des périodes différentes, ça fait partie de mon histoire et elle est très riche. Donc là-dessus, je n'ai vraiment aucun regret. Je suis très contente que le football féminin ait malgré tout évolué par rapport à ce que j'ai pu vivre et que les futures générations puissent bénéficier de meilleures conditions. Ça, c'est top pour elles. On a fait avancer des choses mais il reste encore du travail et il faut continuer à avancer. Mais si tu me demandes, est-ce que tu aurais aimé vivre maintenant, à cette époque-là, par rapport à ton époque, je te réponds non. Parce que je pense qu'on a vécu des choses qui étaient assez fortes, sur le plan des émotions, et je n’y changerais rien parce que c'est aussi comme ça que je me suis construite.

Justement, vous parlez beaucoup de l'importance de votre caractère au quotidien. Déjà, pour convaincre votre maman de vous inscrire au foot. Vous pensez que sans ça, vous n'auriez jamais été joueuse professionnelle ?

En tout cas, c'était mon point fort, on va dire. L'aspect mental et ce caractère bien trempé. Il faut un équilibre entre la confiance en soi et aussi la remise en question c'est très important, mais aujourd'hui quand je suis convaincue d'un truc dans ma tête j'ai beau avoir en face de moi des personnes de pouvoir, des personnes qui peuvent influencer les choses… Je vais dire les choses de manière directe et honnête, je vais essayer d'être transparente et c'est toujours avec le souci de faire avancer les choses. J'essaye toujours plutôt que de penser à moi personnellement de penser aussi à ce qui peut être le mieux dans l'intérêt général et et si à un moment donné il y a une décision à prendre, on doit aller vers cette décision.

Tout au long de votre carrière, vous racontez aussi cette haine de la défaite, c'est quelque chose que vous avez encore aujourd’hui ?

Je ne sais pas trop comment l'expliquer parce que c'est depuis le plus jeune âge. Je pense certainement que les parties de ping pong ou de foot avec mon grand frère ont joué. À chaque fois il me battait et je me sentais complètement impuissante parce qu'il a quatre ans de plus que moi et que c'est juste normal qu'il soit meilleur. Mais pour moi ce n'est pas possible. À chaque fois que je m'engage dans une tâche, encore plus dans le foot ou au boulot, je ne peux pas accepter ni la défaite ni l’échec. J'ai beaucoup de mal avec ça donc je fais en sorte que ça ne se passe pas.

Être maman aide à relativiser, à donner du sens aux priorités. Quand vous êtes maman de quatre enfants et vous avez un poste à responsabilité, les résultats sont importants, c'est évident. Mais après vous vous dites qu’une défaite dans le football ça reste quelque chose de mineur par rapport à plein d'autres choses qui peuvent se passer dans la vie. Donc vous relativiser, mais c'est quand même des choses qui sont dures à digérer parce que c'est un métier passion et quand vous avez un métier passion, vous êtes dans les extrêmes dans le positif comme dans le négatif.

C’est Lauren James qui racontait hier dans une interview pour le Telegraph que vous seriez prête à l’affronter sur n’importe quoi, tant que vous avez une chance de la battre.

Avec Lauren, on a construit une relation d’entraîneur-entraînée, mais il y a des joueuses comme ça qui ont besoin d'avoir une proximité avec leur coach, parce que c'est une joueuse qui a énormément de talent, mais qui doute beaucoup d’elle-même. Ça peut ne pas transparaître quand elle est sur le terrain, mais elle a tout simplement besoin d'avoir cette relation de confiance avec son entraîneure. Donc on a aussi par moments, en dehors du terrain, des petits jeux comme ça, où parfois je la challenge pour aller la titiller un petit peu dans son égo. C'est sympa.

"Il y a une petite différence dans le management quand j'étais à Lyon et aujourd'hui à Chelsea"

Vous dites dans une interview pour la BBC que vous êtes comme une mère pour certaines joueuses de Chelsea.

Il y a une petite différence dans le management quand j'étais à Lyon et aujourd'hui à Chelsea. Tout simplement parce qu'à Lyon, j'avais joué avec certaines joueuses. Entre le moment où j’arrête et le moment où je deviens la manager, il y a huit ans que je passe à la tête de l’académie et qui me permettent quand même déjà de prendre pas mal de distance. Mais malgré tout, coacher des joueuses avec qui vous avez joué, c'est particulier. Je me suis aussi un peu forcée à mettre encore plus de distance avec le vestiaire parce que justement, je ne voulais pas donner l'impression qu’avec certaines joueuses, on avait une relation différente parce qu'on avait été coéquipières. En arrivant à Chelsea, l'avantage c'est que les joueuses ne me connaissaient ni en tant qu'ancienne joueuse, ni en tant qu’entraîneure. On a pu instaurer une relation un peu différente. C'est vrai qu'avec certaines joueuses du vestiaire à Chelsea, on va dire qu'on apporte beaucoup de considération sur le terrain, mais aussi en dehors, il y a des joueuses qui parfois peuvent venir se confier sur des sujets de leur vie personnelle. 

Comment on fait pour être mère de quatre enfants et en avoir une vingtaine d'autres dans un club ? 

Il y a parfois Sonia la coach et Sonia l’être humain. Les joueuses sont soumises à des rythmes qui sont de plus en plus difficiles, donc, il y a des moments où elles sont dans le doute, il y a des moments où elles sont fatiguées… Il faut être présente dans ces moments-là et leur apporter du soutien. 

Pour le côté maman, ça demande une grosse organisation, on a besoin d'avoir du soutien de la part de la famille ou parfois un soutien extérieur. À Londres, on a la sœur de Camille qui vit avec nous. Elle était déjà installée à Londres avant, elle est infirmière, elle vit avec nous et elle prend le relais quand on n'est pas là, notamment la nuit. Et on a une nounou aussi qui nous soulage pas mal, soit sur les journées quand on n'est pas là, quand on est en déplacement, mais aussi sur des moments où on a parfois des réunions au niveau du boulot.

Ils viennent en tribunes pour voir les matchs ?

Ils aiment bien venir aux matchs, ils sont régulièrement en tribunes et dès la fin du match, on passe du temps avec eux. Ils viennent aussi voir les joueuses, ils aiment bien ça. C'est sympa pour eux, ils ont la chance de connaître beaucoup de grandes joueuses du football féminin entre Lyon et Chelsea… Et c'est marrant, parce que quand on est arrivé à Chelsea, Gabin a vu Sam Kerr pour la première fois et il m’a dit : "J’ai de la chance, c’est la femme de Kylian Mbappé !" Parce qu'il l'a vue sur la couverture de FIFA. Je lui ai dit "non pas trop" mais c’était rigolo.

"Il n'y a pas que le sujet de l'homosexualité qu'il est important de mettre en avant. Pour moi, ce sont toutes les différences"

Dans le livre, Camille Abily, une place importante tout au long du récit, mais essentiellement en tant que coéquipière. Pourquoi vous attendez un des derniers chapitres pour évoquer votre relation ?

Sur le choix des chapitres, c'est plutôt Farid qui a fait ce choix dans la construction du livre. Mais en fait, ça me va bien aussi, dans le sens où, comme je le dis, c'est un sujet... Je décide d'écrire un bouquin, je ne peux pas faire autrement, parce que c'est ma personne et ce chapitre de ma vie c'est à la fois une fierté, un moment important donc je ne peux pas décider d'écrire un livre et d'occulter ce passage de ma vie. Et en même temps ce n’est pas un sujet que je suis très à l'aise d’évoquer. Donc le fait qu'il arrive sur la fin, c'est un peu aussi dans l'expérience qu'on a vécue, dans l'ordre des choses. C'est vrai que c'est un sujet qui intéresse beaucoup les médias. Mais personnellement, je ne suis pas complètement à l'aise d’évoquer.

C'est un sujet qui est beaucoup ressorti dans les premières interviews que vous avez données. Ça vous touche ou vous auriez préféré qu'on axe sur autre chose ?

Pour être honnête, j'aurais préféré qu'on axe sur autre chose. Après, je comprends que pour les journalistes c’est aussi un sujet de société donc c'est un sujet important à aborder. Je pense qu'ils connaissent beaucoup de choses de Sonia Bompastor, la joueuse, la coach et c'est peut-être des passages qu'ils connaissent un petit peu moins donc ils ont envie de creuser et qu'ils ont envie de mettre en avant. Donc voilà, je le comprends. C'est juste que sur un plan plus personnel, ce n'est pas très naturel pour moi d'en parler.

C’est difficile, en France, de faire son coming-out ?

Quand j'écris le livre, ce n'est pas une volonté de mettre fin à ces 13 ans de mensonges. Quand j'écris le livre, la volonté, c'est de laisser une trace à mes enfants, de qui je suis, de mon parcours, de raconter un peu tout ce dont j'ai pu faire face. Par contre, pour moi, ce qui est important de dire, c'est qu'il n'y a pas que le sujet de l'homosexualité qu'il est important de mettre en avant. Pour moi, ce sont toutes les différences. Quand on parle des différences de sexualité, j'aimerais qu'on soit capable aussi d'évoquer les différences de couleur de peau, les différences de religion, qui aujourd'hui, pour certaines personnes, ne sont pas acceptées. Et c'est là où, pour moi, ce n'est pas tolérable. Toutes ces différences, aujourd'hui, à l'époque à laquelle on vit, dans notre société, en France, ce sont des sujets qui devraient être beaucoup mieux acceptés. Ou en tout cas, si ce n'est pas accepté, au moins qu'on n'aille pas dans la rue pour manifester contre ces sujets de différence, où là, ça devient complètement ridicule. On ne peut pas faire l'unanimité, être apprécié de tout le monde. Mais si j'ai un message à faire passer c'est plus sur la tolérance et le fait que face à des différences, à partir du moment où les personnes vous respectent, fichez leur la paix, laissez vivre les gens comme ils ont envie de vivre.

Dans votre livre vous parlez aussi de comment votre grand père tolérait très peu justement le fait que vous jouiez au foot. Vous parlez aussi de vos parents qui sont d'origine immigrée et qu'à l'époque ça ne posait de problème à personne. C'est un peu l’histoire de votre vie, cette histoire de différence.

Oui, c'est sûr. Grâce au football j'ai beaucoup voyagé, j'ai vu beaucoup de choses, j'ai, à travers les différents voyages que j'ai effectués, pu percevoir qu'au final, on est très heureux de vivre en France. On est très heureux de vivre en France, dans un pays civilisé où on a beaucoup d'avantages aussi. Et finalement, il faut avoir conscience de ça. Mais c'est sûr que, je me rappelle, effectivement, il y a quelques années en arrière, la mentalité au Portugal, c'était difficile, notamment pour la condition de la femme. Et moi, je l'ai vécu à travers le jugement que mon grand-père a pu porter par rapport au fait que je voulais faire du foot. Mais je l'ai vu aussi quand, à un moment donné, je voyais mes tantes ou ma grand-mère, leur manière de vivre là-bas au Portugal, c'était difficile.

"Je suis sûre que dans quelques mois ou quelques années, il y aura encore d'autres choses à raconter"

Vous racontez aussi l’omniprésence de la pudeur au sein de votre famille, au point que vous avez très peur de révéler le fait que vous êtes vous allez être maman avec Camille. Ce sont des regrets ?

Je pense que mes parents n’auraient pas pu faire différemment dans le sens où c'est certainement l'éducation qu'ils ont reçue. Et à cette époque, ils n'avaient pas le mode d'emploi pour faire différemment. Aujourd'hui, moi, je me nourris de ça et j'agis différemment avec mes enfants. Le regret, il existe, effectivement, sur le fait qu’à un moment donné ta maman elle part et tu n’as même pas eu "le courage" de lui dire je t'aime alors que c'est des mots qui sont très courts et assez simple à prononcer. 

Avec nos enfants, on veut vraiment instaurer ce dialogue avec eux et ne pas avoir certains regrets que j'ai pu avoir avec mes parents de ne pas aborder certains sujets avec eux par pudeur. J'ai complètement envie que ce soit différent avec mes enfants et que tous les sujets on puisse les aborder sans aucune pudeur et sans sujet tabou.

Il y a très peu de mots sur votre carrière d’entraîneure. C’était une volonté de se concentrer sur votre récit de joueuse ? 

Au moment où on fait le livre avec Farid, je suis sur ma dernière année avec avec Lyon quand on commence, il me restait un an de contrat. J'étais en plein milieu de mon expérience lyonnaise. Je n'avais pas le recul nécessaire pour aborder cette expérience-là. Au moment où on termine le livre, je sais que je vais partir avant la fin de mon contrat à Lyon et que je vais aller à Chelsea. On ouvre juste le chapitre en disant que le futur sera à Chelsea donc peut-être qu'à un moment donné on évoquera aussi de manière plus précise cette carrière d’entraîneure… Je ne sais pas. Mais c'était difficile d'avoir un vrai jugement sur les trois ans que j'ai fait à Lyon sans avoir forcément de point de comparaison avec autre chose.

Vous êtes invaincue depuis votre arrivée à Chelsea, on apprend aussi dans L’Équipe que Camille voudrait devenir entraîneure numéro un et vous, pourquoi pas sélectionneure. On va avoir un tome 2 ?

Ouais pourquoi pas ! En tout cas je suis sûre que dans quelques mois ou quelques années, il y aura encore d'autres choses à raconter. Mais je n'ai pas de plan de carrière, je vis assez au moment présent et quand je me sens bien quelque part, je ne cherche pas forcément à aller voir ailleurs. Quand vous faites trois ans à Lyon, là on a un contrat de 4 ans à Chelsea, vous avez un CV qui forcément va intéresser des personnes. Mais franchement je ne suis pas fixée. On a parlé de l'équipe de France, peut-être qu'à un moment donné ça pourrait être quelque chose qui m’intéresserait. On verra comment les choses se présentent. J'ai aussi quatre enfants et ça se trouve à un moment donné je déciderai aussi de consacrer un peu plus de temps à ces quatre enfants qui vont grandir, vont devenir des adolescents et auront aussi certainement besoin d'avoir leur maman à leur côté.