La bataille des airs s'annonce passionnante à l'Emirates entre deux équipes à dix points (trois victoires, un nul, une défaite), qui ont transformé les coups de pied arrêtés en menace N°1, quitte à créer une certaine dépendance.
En Angleterre, les Gunners ont gagné un nouvel surnom : celui de "Corner Kings" (les rois du corner), apparu après la victoire contre Manchester United (2-0) et confirmé après le nul contre Fulham (1-1), samedi.
De fait, les Londoniens ont marqué leurs trois derniers buts sur corners, ce qui porte à 22 leur total depuis le début de la saison dernière. Aucune autre équipe n'a fait mieux dans les grands championnats européens.
Sur la même période en Premier League, ils ont inscrit 31 de leurs 120 buts sur coups de pied arrêtés (hors pénaltys), une réussite à mettre au crédit du Français Nicolas Jover, l'entraîneur adjoint en charge de l'exercice.
Saliba, le défenseur-buteur
L'AS Monaco n'atteint pas les mêmes sommets en Ligue 1, mais elle se distingue aussi par sa maîtrise du sujet. "Nous travaillons à quatre sur ces phases, avec mes trois adjoints ainsi qu'un analyste vidéo. C'est ce qui explique qu'on fait un boulot fantastique dans le secteur", se réjouissait l'entraîneur Adi Hütter le mois dernier.
Samedi contre Toulouse (2-0), les Rouge et Blanc ont encore débloqué la partie sur un coup franc, parfaitement tiré par Lamine Camara pour la tête de Wilfried Singo au second poteau.
Les bons tireurs ne manquent pas en principauté, de Caio Henrique à Maghnes Akliouche en passant par Eliesse Ben Seghir et Aleksandr Golovin. Et à la retombée, il y a de sacrés clients, à commencer par Thilo Kehrer.
Du côté d'Arsenal, Declan Rice et Bukayo Saka se tirent la bourre depuis le point de corner. Et pour convertir leurs offrandes, le plus brillant actuellement s'appelle William Saliba. Buteur de la tête contre Manchester, du pied face à Fulham, le défenseur français a désormais marqué sept buts en 103 matches avec Arsenal, contre un seulement durant les 110 joués avec Nice, Saint-Étienne et Marseille.
Sur corner, les Gunners varient les plaisirs, constamment, pour continuer à surprendre leurs adversaires. "Parfois, ils tirent au premier poteau, puis au second, et parfois ils vont trouver (le défenseur) Gabriel au milieu. La clé pour Arsenal, c'est d'être capable d'alterner", a analysé Micah Richards, ancien défenseur de Manchester City, dans l'émission Match of the Day.
Pas "d'autres idées" ?
Ils ont aussi l'habitude de gêner le gardien adverse, comme l'a constaté l'entraîneur de United, Ruben Amorim : "Ils placent beaucoup de joueurs près du gardien et il est presque impossible de se battre pour le ballon".
Arsenal a instillé le doute dans l'esprit des adversaires et ces derniers hésitent parfois à jouer le duel, a relevé Jamie Redknapp sur Sky Sports.
"Si vous avez des joueurs qui peuvent attaquer le ballon comme Gabriel, vous devez faire pareil, vous devez essayer de mettre la tête", a dit l'ancien milieu de Tottenham. Or, face aux Gunners et leur engagement, "tout le monde a trop peur d'attaquer le ballon".
En Angleterre, une petite musique commence néanmoins à se faire entendre : la réussite d'Arsenal sur coups de pied arrêtés ne masque-t-elle pas sa difficulté à marquer dans le jeu?
C'est la théorie qu'a défendue Nigel Reo-Coker, ancien milieu de West Ham, dans le podcast Football Daily : "Ils ont du mal à avoir d'autres idées", a-t-il soutenu, en évoquant l'absence "d'attaquant naturel". Mikel Arteta préfère utiliser Kai Havertz en "faux N°9" plutôt que Gabriel Jesus, l'unique avant-centre de son effectif, cantonné à un rôle de remplaçant.
À Monaco, les attaquants de pointe Embolo, Balogun ou encore Ilenikhena marquent peu. Les coups de pied arrêtés n'en sont que plus précieux.