Il n'y a pas à dire, lorsqu'il est question de se livrer, Medhi Benatia ne fait pas les choses à moitié. Interrogé par l'Equipe ce jeudi, le directeur du football de l'Olympique de Marseille a abordé plusieurs grandes thématiques liées au club.
Mercato et transferts
L'ex-joueur est rentré tout de suite dans le vif du sujet en s'exprimant sur les transferts de ce mercato hivernal. Après les transferts effectués à l'été 2024, certains ajustements devaient être faits. Lilian Brassier n'arrivait pas à se faire une place sur le terrain, par exemple. "Tu prévois des choses, tu fais sortir des joueurs pour lesquels tu as compris que ça n'allait pas passer, à l'image d'un Lilian. Il ne faut pas insister. Il n'y a pas de mauvais joueurs, il n'y a que des mauvais contextes", a-t-il par exemple déclaré.
Elye Wahi a également représenté un grand objectif cet hiver dans le mercato du club. Acheté cet été, le joueur ne s'est jamais vraiment imposé au sein de l'équipe. Problème lorsqu'il s'agit d'un attaquant censé mettre beaucoup de buts. Après 13 matchs de Ligue 1 cette saison, 3 buts, et un interminable feuilleton de transfert, il a finalement été vendu à Francfort. Un soulagement pour l'OM qui a pu se tourner vers Amine Gouiri avant le mois de février. "On a étudié beaucoup de profils, certains étaient inatteignables. Après, des observateurs font passer Amine pour un "panic buy", ce qui est faux, on sait ce qu'il peut nous apporter, et en vingt-cinq minutes, dimanche contre Lyon (3-2), on a tout de suite compris. J'aimerais bien être comme Manchester City, avoir des moments plus difficiles comme le passage Lille-Strasbourg-Nice et être capable de claquer 120 M€. Ce n'est ni notre réalité ni notre vie. On doit anticiper..."
Revenu sur les raisons pour lesquelles ces joueurs n'arrivent pas à s'intégrer, Benatia a rappelé qu'il souhaitait avoir des joueurs mobilisés et réellement impliqués à Marseille. "Tu recrutes un joueur (...) son caractère, tu ne le découvres qu'après la signature. Au début, tout est beau, tout est rose. Mais quand le joueur commence à faire deux, trois matches sur le banc, quand il te fait des réflexions parce qu'on lui demande plus, dans l'intensité, sur la rigueur, le travail, le sacrifice, la réaction au ballon perdu et qu'il répond : "C'est la faute de l'autre, pas la mienne, ou c'est le coach, etc.", là, tu te dis : ça va être plus compliqué que prévu pour en tirer le maximum".
En se confiant sur les transferts, le directeur sportif a répondu aux questions concernant Paul Pogba. Depuis que le joueur est redevenu disponible après une interdiction de toute compétition suite au contrôle positif de tests de stupéfiants, des rumeurs circulent quant à son prochain environnement. Et certaines l'envoient à l'OM.
"C'est un homme qui, dans un groupe, est important, un leader, un vrai mec de football, un passionné. Malheureusement, Paul a eu des blessures depuis quelques années, il a eu sa suspension. On y a réfléchi, on voulait le faire. Le problème : si on fait venir un Paul Pogba qui n'est pas encore "fit", est-ce que ça a du sens de faire basculer les équilibres, avec le côté médiatique autour, pour un joueur qui ne pourra pas participer à cette fin de saison ?".
Son mandat
Cela fait maintenant 15 mois qu'il se trouve au poste de directeur du football de Marseille. Au cours de ces derniers, Benatia a été confronté à plusieurs défis, et a aussi dû subir les conséquences de ses prises de paroles - notamment à l'encontre de l'arbitrage. "Je suis très diplomate, mais je dis ce que je pense. Jusqu'au dernier jour, je vais toujours défendre l'institution, les joueurs tant qu'ils sont défendables, mon entraîneur. Si c'est un échec, le coach, ce sera mon échec (...) Si j'écoute les gens, je suis parano, je me fais des films toute la nuit (...) Des gens qui arrivent dans certaines fonctions à l'OM, après un mois et demi, ils se sentent pousser des ailes. Étant donné que moi, je suis radical dans ma façon de faire les choses, ces gens ne te disent pas en face : "Oh pourquoi il me dit ça ?" Ils font semblant d'avoir compris et derrière, ils vont te casser, t'empêcher de travailler".
Justement interrogé au sujet de sa descente contre l'arbitrage lors du match entre le LOSC et l'OM datant de la mi-janvier (gagné 1-1, 3 tab à 4 par Lille). Benatia avait notamment interpellé le 4e arbitre de façon véhémente et donc ecopé d'une suspension de trois mois. "Ce que j'ai vécu contre Lille... l'une des plus grosses humiliations de ma vie. Je viens pour calmer mon coach, pour apaiser la situation. À l'arrivée, ça se chauffe, je n'ai rien à voir là-dedans, le match est terminé, je ne viens pas mettre la pression, je dis seulement au quatrième arbitre : "Dites-lui quand même qu'il y avait penalty là-bas" (...) Tu te sens minable, pas traité comme les autres".
En outre, il est revenu sur sa propre perception de son mandat. Pas toujours faciles, les six premiers mois ont vu le directeur être confronté à un mercato réglementé et donc peu de moyens à sa portée. Il a également été confronté au "bordel dans le club". Il a ensuite agi en conséquence, ce qui lui a permis d'améliorer certains points lors de la suite de l'exercice de ses fonction.
"En fin de saison, j'ai dit : "Soit on décide de prendre des décisions radicales, soit on risque de foncer dans le mur." On a ramené un directeur de la performance, on a changé des choses à la formation. On leur met des séances vidéo, on a ramené un psychologue. On a développé le "player care". Sauf qu'à Marseille, quand tu changes, tu te fais des ennemis à l'intérieur".
Son rapport à l'OM
En tant qu'ancien joueur formé à Marseille, Benatia possédait déjà des liens avec le club. Ces derniers se sont forcément renforcés depuis sa prise de poste en tant que directeur sportif. Cela lui permet aujourd'hui d'aborder son rapport à l'OM dans cette interview.
"Ce club m'est cher. Je ne sais pas combien de temps je resterai, sûrement pas longtemps, et je n'ai pas peur de le dire. C'est usant mentalement, physiquement. La seule garantie : je vais tout donner jusqu'au dernier jour. Je suis au contact des Marseillais au quotidien, de tous niveaux. Je sais pourquoi c'est important pour eux, pourquoi c'est important pour moi. Je suis en mission ; pour moi, ici, c'est une mission".
Enfin, il a abordé la question de la discipline au sein de l'Olympique de Marseille.
"Aujourd'hui, vous dire qu'on va aller en Ligue des champions, c'est impossible, je ne sais pas. Par contre, quand je prends le dernier match, je vois du caractère, une équipe qui me ressemble, qui ressemble à mon entraîneur, qui ressemble à mon président".