La chambre du conseil de la cour d'appel de Monaco a tiré les conséquences d'une décision de juin 2024 de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) jugeant illégale la fouille du téléphone de l'avocate de M. Rybolovlev, à l'origine de l'enquête.
Toutes les pièces du dossier liées à l'analyse de ce téléphone sont annulées, y compris l'ouverture de l'instruction et donc toutes les inculpations (NDLR: l'équivalent des mises en examen dans le droit monégasque). Sous réserve d'un hypothétique pourvoi en révision, cette décision laisse s'évaporer toute perspective du procès choc envisagé.
L'affaire remonte au milieu des années 2010 et au conflit judiciaire - clôturé en 2023- entre M. Rybolovlev, propriétaire de l'AS Monaco, et le marchand d'art genevois Yves Bouvier, après la vente d'une impressionnante collection de tableaux.
En 2017, l'avocate du milliardaire russe, Me Tetiana Bersheda, avait remis son téléphone aux enquêteurs pour prouver qu'elle n'avait pas tronqué un enregistrement déposé dans le cadre de ces procédures.
Le juge d'instruction Edouard Levrault, magistrat français à l'époque détaché à Monaco, avait alors ordonné une expertise poussée de l'appareil, qui avait révélé de nombreux échanges avec de hauts responsables monégasques montrant, selon l'accusation, que M. Rybolovlev avait utilisé son entregent à Monaco pour tenter de piéger M. Bouvier.
Suite à la découverte de ces éléments, le milliardaire et son avocate avaient été inculpés pour corruption active et trafic d'influence, au côté d'anciens ministres ou dirigeants de la police ou de la justice monégasques. Tous ont toujours réfuté les charges et clamé leur innocence.
La validité de l'expertise du téléphone, contestée par les personnes mises en cause et par le parquet, avait été reconnue à tous les échelons de la justice monégasque, jusqu'à l'intervention de la CEDH.
Chargée d'assurer le respect de la Convention sur les droits de l'Homme dans les 46 États membres du Conseil de l'Europe, la CEDH a estimé en juin 2024 que l'expertise ordonnée par le juge, apparentée à la perquisition du bureau d'une avocate, était beaucoup trop large par rapport aux faits dont il était saisi.