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C'est l'un des coureurs des 10 premiers jours de course sur le Tour de France, sans nul doute : Ben Healy (EF Education - EasyPost) a animé la plus grande course du monde. L'Irlandais est à la hauteur de sa réputation d'attaquant infatigable, toujours prêt à se projeter.
Il a mis seulement six étapes pour trouver l'ouverture. Au lendemain du contre-la-montre, il a pris place dans une échappée de costauds qui a eu un bon de sortie, et a ensuite totalement écœuré ses compagnons d'aventure en partant seul à 40 km de l'arrivée. Personne ne reverrait la machine à rouler, qui allait lever les bras du côté de Vire-Normandie.
Une belle récompense pour un des coureurs les plus offensifs du peloton. Souvent à l'attaque, rarement récompensé. Jusqu'ici, sa principale victoire était la 8ᵉ étape du Tour d'Italie 2023, et bien évidemment, elle avait été conquise en solitaire. Le tout juste après sa révélation sur la campagne de classiques ardennaises, avec une deuxième place sur l'Amstel Gold Race et une quatrième sur Liège-Bastogne-Liège. Déjà une belle collection d'accessits.
Mais s'il avait grappillé quelques étapes sur des tours secondaires depuis, il n'avait pas retrouvé le chemin de la victoire au niveau World Tour, jusqu'au Tour du Pays Basque en avril. Et même quand on arrive sur un Tour de France en forme, rien ne garantit une victoire d'étape, surtout quand on connaît la concurrence énorme sur la Grande Boucle. Néanmoins, il a sans doute bénéficié d'un sacré coup de pouce du destin quand son coéquipier Richard Carapaz, malade, a dû déclarer forfait.
Troisième du Tour d'Italie, maillot à pois sur le Tour de France 2024, l'Équatorien pouvait viser l'un ou l'autre de ces résultats. Mais son absence a rebattu les cartes dans la formation américaine. Pas de véritable leader pour le classement général, EF Education - EasyPost présentait une équipe homogène dans laquelle Ben Healy paraissait néanmoins le meilleur coureur.
Ce qui explique sans doute pourquoi son équipe n'a pas hésité à lui adjoindre les services de Harry Sweeny et Alex Baudin quand il est parti en échappée ce lundi sur la 10ᵉ étape. Deux équipiers qui ont fait un travail phénoménal toute la journée, mais lui non plus n'a pas été avare d'efforts, emmenant tous les autres favoris à la victoire d'étape sur un plateau dans la dernière heure de course… et a quand même trouvé le moyen de prendre la troisième place.
Mais bien évidemment, l'objectif était autre : Ben Healy a fait le travail pour prendre le maillot jaune. Avec moins de 4 minutes de retard sur Tadej Pogačar au départ de l'étape, l'objectif était réalisable, et il a été réalisé. Au prix d'un grand effort, certes, mais maintenant que c'est le cas, et qu'il le gardera probablement au moins 48 heures de plus, l'heure est venue de jouer au jeu préféré des amoureux du Tour de France : peut-il gagner la Grande Boucle ?
"Non" est la première réponse qui vient à l'esprit. Difficile d'envisager une victoire, ou même un podium à Paris, pour un coureur qui n'a clairement jamais assez prouvé en montagne. L'an dernier, il n'avait pas fait mieux qu'une 16e place lors de l'arrivée au Plat d'Adet. Mais il était dans un rôle d'artilleur qui pouvait choisir ses étapes, et n'a pas encore été vu dans celui d'un candidat au classement général.
Après l'arrivée, le changement de statut était déjà entendable dans ses déclarations. "À partir de maintenant, je vais me concentrer sur le classement général, par respect pour le Maillot Jaune, et essayer de le garder le plus longtemps possible." Logique, l'appétit vient en mangeant.
Néanmoins, il faut tempérer cet optimisme naissant. Outre le manque de références en très haute montagne, son équipe ne semble pas taillée pour cet objectif. Baudin et Sweeny sont de valeureux équipiers qui lui rendront sans doute de fiers services, mais le reste de l'emballage (Vincenzo Albanese, Neilson Powless, Kasper Asgreen et Michael Valgren) sont plutôt des baroudeurs, pas forcément taillés pour la montagne. Et, bien évidemment, il y a le niveau intrinsèque de Ben Healy.
On ne l'imagine pas à la hauteur de Tadej Pogačar ou de Jonas Vingegaard, qui restent les immenses favoris. Mais objectivement, une troisième place reste tout à fait envisageable. Même si Remco Evenepoel reste le candidat n°1 à ce dernier spot sur le podium, personne n'est totalement impressionnant en ce début de course. Un objectif réaliste pour l'Irlandais ?
On ne voit pas pourquoi il ne se mêlerait pas à la lutte pour le podium. Et avec le surcroit d'énergie que peut procurer un maillot jaune (tant d'exemples, tel Thomas Voeckler en 2011 pour ne citer qu'un des plus connus), avec "seulement" 27 jours de course en 2025 avant de démarrer le Tour, on peut imaginer – et on a pu de toute façon le voir – que sa condition est optimale.
À 24 ans, et avec un gabarit des plus adaptés sur le papier (1,75 m pour 65 kg), on pourrait bien assister à l'explosion attendue de Ben Healy. 38 ans après Stephen Roche, un nouvel Irlandais au Panthéon ?