Pour autant, la Rémoise de 32 ans prévient qu'elle n'est pas revenue "pour (s)e faire démonter" et rêve d'une victoire dans le Tour de France dans les trois années qui viennent avec son équipe Visma.
QUESTION : Vous retrouvez le cyclisme sur route onze ans après avoir gagné votre titre mondial. Quelles sont vos premières impressions ?
RÉPONSE : "Quand je suis arrivée au stage de décembre, l'entraîneur m'a dit: +tu as l'air surprise+. Je ne pensais pas que le niveau était aussi haut. Avant, c'était beaucoup plus hétérogène. La nutrition a beaucoup changé aussi et tient un rôle essentiel dans la performance. Les tactiques d'équipe sont devenues cruciales. C'est devenu vraiment un sport d'équipe."
Q : Justement, ça vous fait bizarre de vous retrouver en équipe après un fonctionnement plus solitaire en VTT ?
R : "C'est vrai que j'ai été plutôt isolée pendant des années. Quand on a cinq heures de vélo à faire, c'est plus sympa quand on est en groupe et qu'on peut discuter, ça passe un peu plus vite. Avant, j'étais en chambre toute seule, maintenant, je dois partager la chambre avec quelqu'un. C'est un sport complètement différent."
Q : Le cyclisme féminin a beaucoup évolué ?
R : "Il est en train d'évoluer comme il n'évoluera peut-être plus jamais. Je me rappellerai toujours d'une phrase que j'ai dite à ma mère quand j'avais huit ans : j'aurais bien aimé être un garçon pour faire le Tour de France. Aujourd'hui, les jeunes filles ont une chance inouïe de pouvoir avoir le Tour de France comme rêve. C'est aussi pour ça je ne voulais pas arrêter ma carrière. Je voulais vivre ça."
Q : Avec un objectif fort, le Tour de France que vous voulez gagner dans les trois ans ?
R : "C'est mon rêve. Avoir gagné les Jeux à la maison a été incroyable. Gagner le Tour de France serait, je pense, une sensation encore au-dessus. Mais ça ne va pas venir tout de suite. Je reste prudente car je ne sais pas du tout quel est mon niveau par rapport aux meilleures. Je n'ai pas envie de vendre du rêve et me retrouver je ne sais pas combientième."
Q : L'objectif est quand même de gagner rapidement des courses ?
R : "Clairement. Je ne suis pas revenue sur la route pour me faire démonter. Je vais peut-être prendre des claques. Finalement c'est un peu l'histoire de ma vie. Je pense être quelqu'un de résilient."
Q : Vous pensez déjà être compétitive ?
R : "Lors du dernier test en décembre, j'ai battu mon record de tous les temps sur cinq minutes, donc je pense être à un niveau correct. Je m'entraînais déjà beaucoup avant donc je n'ai pas à refaire cette base foncière. Mais j'ai perdu en explosivité. Et manger autant sur le vélo, c'est nouveau pour moi. En VTT, ce n'est pas forcément nécessaire, c'est une heure et demie de course. Mais quand tu fais 3h30 de course, qu'on te demande de manger six gels par heure, si tu n'as pas l'habitude, ton corps ne digère pas. C'est ce que m'est arrivée aux Mondiaux (abandon, en septembre à Zurich)."
Q : Quel type de coureuse pensez-vous être sur route aujourd'hui ?
R : "Je pense que je suis bonne un peu partout mais pas très bonne quelque part. Il va falloir que je me spécialise. Ça va être aussi le but des stages en altitude, avec des montées assez longues. Pour gagner aujourd'hui, il faut faire son meilleur effort sur cinq minutes en fin de course. Ça va être le but: être encore super fraîche au bout de 3h30 de course pour pouvoir attaquer."
Q : Il y aura beaucoup d'attentes. Vous êtes prête pour ça ?
R : "Les Jeux m'ont appris que savoir dire non n'est pas mauvais. Je n'ai plus 20 ans. J'ai assez de recul pour me préserver et me faire passer en priorité."