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Dans la forme de sa vie, Filippo Ganna peut-il refaire briller l'Italie sur Milan - San Remo ?

Le grand jour de Filippo Ganna ?
Le grand jour de Filippo Ganna ?Massimo Paolone/LaPresse/Shutter / Shutterstock Editorial / Profimedia
À 28 ans Filippo Ganna vient d'épater le peloton sur Tirreno-Adriatico. Deuxième de Milan - San Remo voilà deux ans, il est la principale carte pour aller chercher une victoire qui est devenue bien trop rare pour l'Italie sur la Primavera.

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En 2006, Filippo Pozzato remportait Milan - San Remo pour la première (et la seule) fois de sa carrière. Mieux, cette victoire au sprint massif était assortie d'un triplé italien, devant Alessandro Petacchi et Luca Paolini. Sept Transalpins dans les 10 premiers, et quelques mois plus tard, Ivan Basso allait prolonger une série de victoires italiennes d'affilée dans le Giro à 10 (elle monterait jusqu'à 11). Le cyclisme italien régnait alors sur ses propres épreuves. 

Près de 20 ans plus tard, l'internationalisation du cyclisme est passée par là. Depuis ce succès de Pozzato, Vincenzo Nibali demeure le seul Italien vainqueur de la Primavera. En 2018, Le Requin de Messine avait fait la différence dans le Poggio et résisté de justesse au retour des sprinters pour mettre fin à 12 ans d'attente pour une victoire locale. Depuis ce succès homérique, un seul Transalpin est monté sur le podium du premier Monument de la saison : Filippo Ganna

C'était en 2023, l'une des éditions de Milan - San Remo les plus excitantes de l'histoire récente. Une guerre des étoiles entre Mathieu van der Poel, Wout Van Aert et Tadej Pogačar à laquelle avait alors pris part l'Italien. S'il n'avait pu suivre la dernière attaque fatale du Néerlandais en haut du Poggio, il avait réglé le sprint pour la deuxième place, et prouvé qu'il pouvait appartenir à ce gotha des spécialistes des classiques, et qu'il n'était pas qu'un spécialiste du contre-la-montre. 

Une étiquette qui lui avait cependant été logiquement collée, puisque c'est dans cet exercice qu'il a remporté la majorité de ses grandes victoires. Double champion du monde, deuxième des deux dernières éditions, ainsi que des derniers Jeux Olympiques, 7 victoires d'étape dans l'effort solitaire sur des Grands Tours : nul doute, l'Italien est l'un des plus éminents spécialistes du genre. 

Et comme toutes les étiquettes, celle-ci est difficile à décoller. Il faut dire qu'on attend toujours le grand résultat qui serait venu confirmer cette magnifique performance de 2023. Notamment l'an dernier ici même, quand cette fois, il n'avait pu s'accrocher au groupe de tête, terminant à une anonyme 40ème place. Une sacrée déception à l'image de sa saison, sans titre mondial ni olympique, que ce soit sur route ou sur piste. 

Mais cette fois, il arrive sur la lancée d'une performance qui a quelque peu changé le regard posé sur lui depuis. Lors de Tirreno-Adriatico, s'il a raflé comme prévu le contre-la-montre inaugural (et avec la manière), il a défendu son maillot de leader du mieux possible, et il a bien failli réussir. Il a fallu un Juan Ayuso en pleine forme pour l'empêcher de devenir le premier Italien vainqueur de cette épreuve depuis 2013 et un certain... Vincenzo Nibali

Premier podium sur une course par étapes World Tour pour Ganna.
Premier podium sur une course par étapes World Tour pour Ganna.Stefano Cavasino / LiveMedia / DPPI via AFP

De quoi arriver à Milan - San Remo avec le plein de confiance. Et surtout, en forme. Cette fois, il n'est pas allé batifoler en Australie en janvier, ou en Argentine : il a accumulé les kilomètres sur le continent européen, montant en pression petit à petit. Dans une forme optimale, il a donc fait le travail pour arriver sur la Primavera dans les meilleures conditions. Suffisant pour envisager la victoire ?

En tout cas, son équipe INEOS - Grenadiers y croit, et lui a mis à disposition de nombreuses bêtes à rouler pour l'occasion. L'ancien champion du monde du contre-la-montre Tobias Foss, Connor Swift, en grande forme sur les Strade Bianche, Ben Turner et le légendaire Geraint Thomas, pour sa toute dernière apparition sur la Primavera. De quoi parfaitement entourer l'Italien pendant la majeure partie de la course. 

Mais ensuite ? En 2023, il avait prouvé sa capacité à suivre les meilleurs, et il semble que dans le Poggio, la bataille s'annonce une nouvelle fois splendide. Tout le monde s'attend à ce que les UAE Team Emirates - XRG de Tadej Pogačar fassent le tempo, un tempo élevé pour préparer une attaque de son leader dans le Poggio. Un scénario convenu, le seul possible ?

À moins que la meilleure défense ne soit l'attaque. Au vu du nombre de mines que l'Italien a dispensé sur Tirreno-Adriatico, est-il capable de prendre l'affaire à son compte dans le Poggio ? On a envie d'y croire, surtout parce que personne n'aime les courses qui se déroulent selon un scénario planifié à l'avance. Et surtout parce que la Primavera a souvent réservé des surprises.

Le fait que Jasper Philipsen passe le Poggio avec les meilleurs l'an dernier, l'inoubliable descente de Matej Mohorič en 2022, le coup fumant de Jasper Stuyven en 2021 : jadis promis aux sprinters, le premier Monument de la saison voit rarement le favori gagner depuis quelques années. Et s'il fera partie des premiers noms cochés sur la liste, Filippo Ganna ne sera pas le client n°1, rôle réservé à Tadej Pogačar. Et s'il sera quelque peu surveillé, il ne sera pas le centre des attentions. Sans doute sa meilleure chance pour mettre fin à 19 ans d'attente...