Anauel Ngamissengue est peut-être à quelques heures d'un exploit monumental... qui télévisé en France en catimini (sur Fight Sports, canal 198 de la box de Bouygues). À Astana, le poids moyen invaincu (14-0-0) affronte Janibek Alimkhanuly, détenteur des ceintures IBF et WBO, lui aussi invaincu en 16 combats. Venu du Congo avec qui il a disputé les JO de Rio en 2016, le boxeur de 29 ans s'est formé avec Bob Sita, à Neuilly-en-Thelle dans l'Oise, à la française, c'est-à-dire avec plus de galères que de moyens, mais avec une force de conviction immense.
Sa victoire aux points dans un 8-rounds contre le Polonais Fiodor Czerkaszyn à Wroclaw en combat d'encadrement du duel Oleksandr Usyk-Daniel Dubois en août 2023 lui a servi de tremplin. Depuis, s'il a participé au tournoi de qualification aux JO de Paris avec son pays d'origine en mi-lourds sans parvenir à obtenir son sésage, il n'a boxé qu'une seule fois chez les rémunérés, contre le Géorgien Sandro Jajanidze (KO3) en juin 2024.
Tout à gagner contre l'héritier de Golovkin
Dans une catégorie toujours relevée, Ngamissengue, 9e au classement officieux de Boxrec, a saisi une opportunité immense pour entrer dans l'Histoire de la boxe hexagonale. La mission est d'envergure, car il est sur le point de défier pour son tout premier 12-rounds celui que Ring Magazine classe nº1 de la catégorie, dans l'attente qu'un boxeur ne s'installe sur le trône du champion. Celui qui est simplement appelé Janibek n'est pas un tendre et, à 32 ans, il veut s'affirmer comme la référence de la catégorie et unifier les 4 ceintures. Sur une série de 8 KO lors de ses 9 derniers combats, il veut faire le spectacle pour son retour au pays, près de 8 ans après sa dernière apparition au Kazakhstan avant de s'exiler à Oxnard, en Californie.
En somme, Ngamissengue est clairement mis dans la posture du challenger qui a perdu d'avance... à moins de se transformer en erreur de casting. "On sait très bien qu'ils ne le font pas venir pour qu'il gagne, confiait Nordine Oubaali à Flashscore en février dernier. Le meilleur conseil que je peux lui donner, c'est d'y croire à fond, de ne pas avoir de regrets". Après tout, Bruno Surace a signé un upset retentissant avec un seul crochet...
Paradoxalement, alors qu'Alimkhanuly est un poids moyen plus naturel que Ngamissengue (il a débuté à plus de 170 livres lors de ses deux premiers combats avant de progressivement arriver à 160 dès son 5e combat), le Kazakh est plus grand : 1.82m contre 1.76m. Ce sera donc au Français de venir casser la distance. Pour Hassan N'dam qui l'a affronté en 2021 (défaite au 8e), "Qazaq Style" est "très bon et facile quand c'est lui qui engage et qui mène le combat. Dans ces conditions, il est très dangereux". Sa préconisation ? "Ne jamais reculer. Lorsque je mettais un peu de pression, même si je ne l'ai pas fait beaucoup, il perdait ses moyens parce qu'il ne trouvait pas ses repères. Il faut toujours être vers lui, ne pas le laisser diriger le combat. Anauel pourra s'accrocher travailler en avançant. Il faut lui mettre la pression, lever les bras et l'empêcher de boxer. Sinon, ce sera très difficile de le battre".
A l'époque, "Fenomeno" s'est retrouvé en position de gatekeeper, alors qu'il revenait de deux blessures à l'épaule. Il a découvert un boxeur avec un grand potentiel : "quand on m'a contacté, c'était un no-name, il avait besoin de faire sa place et j'étais une sorte de test à passer pour lui afin de voir l'étape supérieure (10-0 en 2021, ndlr). J'ai découvert un boxeur compliqué à affronter car il est gaucher et car il a une vitesse et une intelligence incroyables". N'dam le compare même à une idole kazakhe : "il pourrait être le prochain Golovkin. Le problème, c'est qu'il n'est pas Américain. Golovkin a été très entouré alors que le promoteur de Janibek n'a pas l'air de le mettre suffisamment en valeur. Il a du talent et il n'a pas battu n'importe qui. Il demande à affronter de grands boxeurs mais on ne le lui accorde pas parce qu'il n'est pas assez bankable".
Dans un tel contexte, devant un public hostile, Ngassimengue doit réaliser le combat de sa vie, sans arrière-pensée car cette opportunité peut le faire passer dans une nouvelle dimension. Un grand combat, même avec une défaite, peut lui permettre d'assoir sa légimité au plus haut niveau et c'est en prenant ce genre de risque qu'une carrière prend un nouvel essor. Et s'il gagne, alors il entrera tout simplement au Panthéon du Noble Art.