Tout a commencé en 2012, quand le Trinidadien Keshorn Walcott a réussi ce qu'Ato Boldon n'avait pu réaliser : devenir champion olympique. Précision d'importance : ce n'est pas en sprint que l'archipel de la Caraïbe a remporté sa première médaille d'or olympique mais au javelot. Sans le savoir, le lanceur a initié un chemin qui fait de sa discipline la plus mondialisée.
Car si le Sud-Africain Marius Corbett s'est imposé à Athènes en 1997, il symbolisait une exception au sein d'une discipline traditionnellement squattée par les Allemands, les Russes, les Scandinaves et les Tchèques.
Or dans le sillage de Walcott, c'est une vraie mutation qui s'est opérée. En 2015, Julius Yego est devenu champion du monde devant Ihab Abdelrahman. Un Kenyan et un Égyptien devant le Finlandais Tero Pitkamaki !
Le podium 2017 a marqué un retour en grâce européen mais il ne fut que passager. Anderson Peters (Grenade) a de nouveau fait briller la Caraïbe avec deux titres en 2019 et 2022, tandis que l'Indien Neeraj Chopra, deuxième en 2022, s'est imposé en 2023 devant le Pakistanais Arshad Nadeem qui prendra sa revanche lors des JO de Paris, avec un podium 100% non-européen complété par Peters, vainqueur à Tokyo.
Cette année, l'Europe est au sommet des bilans, avec les 91,51m de l'Allemand Julian Weber au Letzigrund de Zurich le 28 août dernier. Mais à y regarder de plus près, le Vieux-Continent a quasiment déserté. Dans le Top 15 de la saison, il n'y a que deux autres Européens : le Biélorusse Aliaksei Katkavets est 6e au bilan, le Polonais Cyprian Mrzyglod 10e. Le premier Scandinave est 20e, le premier Tchèque 23e !
Chez les femmes, l'Europe aussi en recul
Les femmes ont suivi le mouvement, à la fin du règne de la grande Barbora Spotakova, recordwoman du monde depuis 2008, devenue triple champion du monde en 2017 après avoir été double championne olympique (2008 et 2012, troisième en 2026).
Déjà en 2017 à Londres, la Tchèque était accompagnée sur le podium par les Chinoises Li Lingwei et Lu Huihui. Celles-ci ont conservé leurs places en 2019 à Doha mais c'est l'Australienne Kelsey-Lee Barber qui s'est imposée, doublant en 2022.
C'est à Eugene précisément que l'Europe a été boutée hors du Top 5, se contentant des 6e, 8e et 10e places. En 2023, la tendance s'est confirmée : la Japonaise Haruka Kitaguchi (partie s'entraîner en... République tchèque) s'est imposée devant la Colombienne Flor Ruíz et l'Australienne Mackenzie Little, alors que seulement 3 Européennes étaient finalistes (4e, 5e, 9e) et que ne figurait aucune Tchèque ni Allemande !
2021 a marqué la dernière apparition d'une Européenne sur un podium international. La Polonaise Maria Andrejczyk a pris l'argent derrière la Chinoise Liu Shiying et devant Barber et la Turque Eda Tugsuz.
Qu'en sera-t-il pour le retour de l'athlétisme à Tokyo ? L'Autrichienne Victoria Hudson a signé la meilleure performance mondiale de l'année fin juin (67.76m) et 3 autres Européennes figurent dans le Top 5 de la saison, la Chinoise Ziyi Yan s'intercalant à la 3e place des bilans avec 65.89m. Pour autant, le Vieux-Continent est moins présent dans le paysage avec seulement 3 représentantes supplémentaires dans le Top 25 (9e, 15e, 25e).
