Mais qui est cet énergumène qui tape une 4e place sur la sprint et une 5e le dimanche lors de ses grands débuts en MotoGP ?
En 2024 a vu naître Pedro Acosta, 2025 Ai Ogura. Le champion du monde de Moto2 est monté de catégorie et son weekend de bizutage en Thaïlande s'est transformé en démonstration. Sur la Trackhouse équipée par Aprilia, le Japonais avait déjà fait fort en signant le 5e chrono de la Q2, à 352 millièmes de Marc Márquez. Encore fallait-il confirmer. Cela fut fait, au nez et à la barbe des deux pilotes officiels Aprilia, Marco Bezzecchi (12e du la sprint, 6e du GP) et Lorenzo Savadori (deux fois 20e) qui remplace temporairement le champion du monde en titre Jorge Martín, blessé. Avec l'absence du Martinator, sans omettre les potentielles séquelles de ses blessures, le team officiel est déjà mis sous une pression maximale par Trackhouse.
Une décision courageuse qui change tout
Si l'arrivée de Fermín Aldeguer était attendue, celle d'Ogura a été moins médiatisée. Pourtant, le pilote de 24 ans est devenu champion du monde de Moto2 et, en plus, il n'a pas hésité à quitter Honda pour s'imposer. Un Japonais qui quitte une telle institution, voilà de quoi susciter l'intérêt. PDG de PromoMedia, Jordi Pons connaît bien Ogura car sa société s'est occupée notamment du scouting des meilleures promesses asiatiques : "en 2023, il m'a demandé de l'aider à trouver une équipe, a-t-il rembobiné pour Motorsport.com. Je ne sais pas si les gens s'imaginent ce que c'est pour un Japonais qui a grandi avec Honda d'aller voir le HRC pour leur dire qu'il s'en va".
Pas de place pour les sentiments. Mais un calcul payant car, outre le titre dans la catégorie inférieure, Ogura a convaincu Trackhouse de lui faire confiance. Toujours pour Motorsport.com, Davide Brivio, le team manager de l'écurie américaine, a avoulé de pas avoir "tellement suivi dans les étapes précédentes de son parcours. Mais, l'année dernière en Moto2, j'ai été frappé par sa capacité à se sortir de situations compliquées. En même temps, j'ai remarqué son style de pilotage, qui m'a semblé assez adapté au MotoGP".
Le pilote essayeur Matteo Baiocco a poussé en faveur d'Ogura, même si le Japonais n'avait pas pu effectuer de tests. Cette prise de risque s'avère payante dès le début de championnat. Pour Brivio, qui en a vu d'autres dans sa carrière, est extatique : "nous avons trouvé un diamant que nous devons maintenant polir. Il est très humble mais aussi très alerte. Il apprend vite et ne s'arrête jamais. Quand il a appris une chose, il passe à une autre".
Cela s'est vérifié lors de ce weekend inaugural en Thaïlande. Certes, Ogura appréhende mieux les fortes chaleurs sur les circuits asiatiques, comme il l'a d'ailleurs avoué : "dans des conditions comme celles-ci, j'ai un avantage. je pense que c'est plus difficile pour d'autres pilotes". Sa gestion des pneus a été impeccable, malgré un dernier tiers de GP délicat, mais rien de préjudiciable pour le Japonais qui avait anticipé la dégradation de ses gommes pour finir dans les meilleures condition.
Son bilan est excellent : il termine premier pilote non-Ducati samedi et dimanche. Une performance qui ne passe pas inaperçu, même si lui refuse de s'enflammer, évoquant "l'expérience fantastique" de rouler derrière les frères Márquez, Pecco Bagnaia et Franco Morbidelli : "c'est un bon départ, c'est sûr, mais je suis un rookie et ce sera peut-être complètement différent sur d'autres circuits. Je veux poursuivre mon chemin, je suis très ouvert à accueillir le bon et le mauvais, alors on verra en Argentine".